Sri Lanka. Un ministre accusé d’avoir menacé des prisonniers tamouls d’une arme doit faire l’objet d’une enquête

Réagissant à des informations selon lesquelles Lohan Ratwatte, ministre sri-lankais de la Gestion des prisons et de la Réinsertion des détenus, s’est introduit de force dans une prison d’Anuradhapura le 12 septembre, a tenu en joue des personnes incarcérées en vertu de la Loi relative à la prévention du terrorisme (PTA) et a menacé de les tuer, Yamini Mishra, directrice pour la région Asie-Pacifique à Amnesty International, a déclaré :  

« Ces informations sidérantes montrent bien que nos inquiétudes persistantes concernant le sort réservé aux détenu·e·s par le Sri Lanka, en particulier les actes de torture et autres traitements inhumains et dégradants infligés aux personnes incarcérées au titre de la PTA, sont tout à fait fondées. Elles illustrent par ailleurs le degré d’impunité caractérisant certains comportements criminels tolérés au plus haut niveau du gouvernement. Une enquête impartiale et approfondie doit être ouverte dans les meilleurs délais et le ministre doit être amené à répondre de ses actes. 

« Lors de la session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies de mardi 14, le ministre sri-lankais des Affaires étrangères s’est vanté de la libération anticipée de 16 membres des Tigres tamouls, à la faveur d’une grâce présidentielle. Il était en réalité déjà prévu que ces hommes soient remis en liberté. Les faits attribués à Lohan Ratwatte compromettent encore davantage les efforts consentis au coup par coup par le gouvernement afin d’améliorer les conditions de détention des personnes condamnées au titre de la PTA, efforts censés s’inscrire dans une politique de réconciliation.  

« Le ministre des Affaires étrangères a par ailleurs rejeté le mécanisme établi afin de recueillir et préserver des éléments de preuve en prévision de futurs processus d’obligation de rendre des comptes en relation avec des violations graves des droits humains au Sri Lanka, affirmant que les processus nationaux “répondent avec vigueur aux problèmes qui se posent”. Ces paroles ne pourront être prises au sérieux que si Lohan Ratwatte est amené à rendre des comptes pour ses agissements criminels. »

Complément d’information

Le ministre Lohan Ratwatte aurait démissionné de ses fonctions ayant trait aux prisons il y a quelques heures, mais reste ministre au gouvernement. Selon des informations relayées par les médias, il est entré par la force dans la prison d’Anuradhapura le 12 septembre, et s’est mis à la recherche de prisonniers tamouls détenus en vertu de la Loi relative à la prévention du terrorisme (PTA). D’après des articles de presse, Lohan Ratwatte s’était également introduit de force dans l’enceinte de la prison de Welikada le week-end précédent. Accompagné d’autres personnes, il était en état d’ébriété et a insulté le personnel carcéral. La violence employée de longue date dans les prisons sri-lankaises reste impunie. Deux massacres de détenus ont eu lieu à Welikada, en 1983 et en 2012. 

Lohan Ratwatte a été inculpé du meurtre de 10 jeunes musulmans à Udathalawinna en 2001. Lohan Ratwatte et son père, un ancien ministre adjoint de la Défense, ont été acquittés de toutes les charges par la haute cour de Colombo en 2006. Cinq membres des forces de sécurité et gardes du corps de leur famille ont été déclarés coupables et condamnés à mort. 

Les faits les plus récents sont survenus alors que se déroule la 48e session du Conseil des droits de l’homme, où la haute-commissaire a fait état lundi 13 septembre de son inquiétude sur les morts en détention et les allégations persistantes attribuant des actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements aux responsables de l’application des lois au Sri Lanka. Faisant écho aux préoccupations de la haute-commissaire, Amnesty International a exhorté le gouvernement à abroger immédiatement la PTA, qui continue à être invoquée afin de maintenir des centaines de personnes en détention sans procès pour des périodes prolongées.