Pologne. L’état d’urgence risque d’aggraver la situation déjà difficile de 32 personnes en quête d’asile bloquées à la frontière

Des porte-parole sont disponibles pour des entretiens

L’état d’urgence décrété par le gouvernement polonais à la frontière avec le Bélarus présente de sérieux risques pour les personnes demandant l’asile qui tentent d’entrer en Pologne et menace d’aggraver la situation déjà difficile de 32 Afghan·e·s, dont quatre femmes, 27 hommes et une adolescente de 15 ans, qui sont retenus sur place sans recevoir suffisamment de nourriture et d’eau depuis plus de trois semaines, après avoir été refoulés par les autorités polonaises, a déclaré Amnesty International.

Cet état d’urgence va restreindre l’accès déjà limité et le travail des journalistes couvrant cette situation, car il interdit l’utilisation de matériel d’enregistrement dans la zone. Il va également compliquer le travail des avocat·e·s qui aident les personnes en quête d’asile, ainsi que celui des ONG et des militant·e·s qui effectuent un travail essentiel d’observation de la situation des droits humains.

“L’état d’urgence permet à un État de restreindre certains droits fondamentaux dans des circonstances extrêmes où il existe une “menace pour la vie de la nation”. Aucune menace de ce type n’existe en Pologne, où les autorités tentent d’exploiter cyniquement ce pouvoir pour cibler les demandeurs d’asile et les personnes qui les aident.” 

Nils Muižnieks, directeur pour l'Europe à Amnesty International

Le 1er septembre, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et la Croix-Rouge bélarussienne, avec le soutien de la Croix-Rouge polonaise, ont apporté une aide humanitaire au groupe d’Afghan·e·s demandant l’asile qui sont retenus à la frontière.

« Bien qu’une aide essentielle ait été apportée par le HCR et la Croix-Rouge, nous rappelons aux autorités polonaises qu’elles sont tenues d’appliquer pleinement la décision rendue la semaine dernière par la Cour européenne des droits de l’homme, qui leur a ordonné de fournir de l’eau, de la nourriture, des vêtements, des soins médicaux adaptés et des abris aux personnes bloquées à la frontière. Elles doivent également garantir l’examen au cas par cas de toutes les demandes d’asile et autoriser les organisations, les avocat·e·s et d’autres organismes à accéder librement à ce groupe de personnes », a déclaré Nils Muižnieks.

Selon certaines informations, des garde-frontières bélarussiens aident des gens à passer en Pologne, en Lituanie et en Lettonie. Le 6 juillet, le président du Bélarus, Alexandre Loukachenko, a fait savoir qu’il n’empêcherait personne de franchir la frontière vers ces pays. Toutefois, cela ne doit pas servir d’excuse pour procéder à des renvois forcés illégaux et priver des personnes d’accès à la procédure de demande d’asile.

Aux termes du droit européen et international relatif aux personnes réfugiées, la Pologne doit garantir l’examen au cas par cas de toutes les demandes d’asile. Amnesty International appelle les autorités polonaises à cesser les renvois forcés illégaux, à permettre aux personnes en quête de protection d’entrer sur le territoire et à fournir immédiatement une aide humanitaire essentielle aux réfugié·e·s retenus à la frontière avec le Bélarus.

Action urgente d’Amnesty International concernant la situation à Usnarz Górny

Le 24 août, une délégation d’Amnesty International s’est rendue à Usnarz Górny, où ce groupe de personnes réfugiées était retenu depuis plus de 15 jours. Amnesty International a obtenu des informations selon lesquelles les garde-frontières polonais ont recouru à la force et menacé d’employer la violence lorsqu’ils ont renvoyé le groupe vers le Bélarus.

Depuis que ces personnes sont arrivées à la frontière, le gouvernement polonais a annoncé des modifications dans deux lois, dont une porte sur les ressortissant·e·s étrangers, et l’autre sur les protections accordées à ceux-ci. En vertu de ces modifications, il sera impossible pour les personnes franchissant la frontière de manière irrégulière de demander l’asile en Pologne. Le 20 août, le ministre polonais de l’Intérieur a émis l’ordre de fermer les frontières aux personnes entrant dans le pays « de manière irrégulière » et de les obliger à quitter le territoire polonais immédiatement et jusqu’à nouvel ordre.

Le 25 août, des soldats de l’armée polonaise ont commencé à construire une clôture sur la frontière avec le Bélarus. Le 31 août, le gouvernement polonais a demandé au président de la Pologne de décréter l’état d’urgence pour 30 jours dans les régions frontalières du Bélarus, en invoquant des risques posés par les « 3 000 tentatives de franchissement de la frontière en août ». Le décret instaurant l’état d’urgence prévoit notamment l’interdiction des rassemblements, des manifestations, des événements de grande ampleur et des événements culturels dans les zones où il est en vigueur.