Afrique du Sud. Le grand rendez-vous du secteur minier doit aborder la question des violations des droits humains

Les compagnies minières et leurs partenaires, à savoir les investisseurs, les gouvernements et les responsables politiques, doivent s’attaquer aux atteintes aux droits humains qui sont monnaie courante dans le secteur minier, a déclaré Amnesty International le 3 février 2020, à l’occasion de l’ouverture au Cap, en Afrique du Sud, de la plus grande conférence du monde sur l’investissement minier.

Travail des enfants en République démocratique du Congo (RDC), conditions de vie sordides des ouvriers de la mine de Marikana en Afrique du Sud, le secteur minier est gangréné par des violations des droits humains.

Deprose Muchena, directeur d'Amnesty International pour l'Afrique de l’Est et l'Afrique australe

Baptisée Mining Indaba, cette conférence réunit des investisseurs du monde entier pour discuter des intérêts miniers en Afrique.

« Travail des enfants en République démocratique du Congo (RDC), conditions de vie sordides des ouvriers de la mine de Marikana en Afrique du Sud, le secteur minier est gangréné par des violations des droits humains. Souvent, les compagnies minières causent des violations ou y contribuent dans leur course au profit, tandis que les gouvernements se montrent trop faibles pour réglementer efficacement leurs activités, a déclaré Deprose Muchena, directeur d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe.

« Depuis trop longtemps, les géants du secteur minier ne rendent aucun compte pour la pollution, les expulsions forcées, l’absence de transparence quant à l’octroi des droits d’extraction, la corruption, l’évasion fiscale et les prix de transfert abusifs. Ces questions doivent figurer en première place des discussions qui se tiendront au Cap. »

Amnesty International et ses organisations partenaires ont recensé de nombreux cas de violations des droits humains liées aux activités minières.

En Afrique du Sud, les victimes des violences mortelles de Marikana, au cours desquelles 34 manifestants ont été tués et au moins 70 blessés par des membres de la police nationale sud-africaine lors d’une grève minière en août 2012, attendent toujours que justice leur soit rendue, presque huit ans après les faits.

Depuis trop longtemps, les patrons du secteur font la part belle au profit, au détriment des droits et de l’environnement.

Deprose Muchena

À Marikana, une région minière où le géant britannique de l’extraction du platine Lonmin Plc menait ses activités, les mineurs s’étaient mis en grève pour dénoncer les bas salaires et les conditions de logement effroyables dans lesquelles ils vivaient. En effet, l’entreprise n’avait pas tenu ses engagements s’agissant d’améliorer les conditions de vie des ouvriers comme prévu dans son programme social et professionnel conclu en accord avec le gouvernement, en violation flagrante de ses obligations découlant de la législation sud-africaine.

Au Mozambique, Amnesty International a révélé que les activités minières de la multinationale chinoise Haiyu ont sans doute fortement contribué à une inondation subite dans le village de Nagonha, en 2015, qui a détruit 48 logements et a fait 290 sans-abri. Elle a aussi dévoilé que du fait de ces activités, tout un village côtier de plus de 1 000 habitants avait risqué d’être englouti par l’océan Indien. Les autorités du Mozambique n’ont pas réglementé cette industrie au lendemain de la catastrophe.

En République démocratique du Congo (RDC), nos recherches novatrices sur l’extraction du cobalt ont révélé les risques en termes de droits humains associés au travail dans les mines artisanales, peu ou pas réglementé, notamment les conditions de travail dangereuses pour les mineurs et le travail des enfants. En juin 2019, un accident mortel et le déploiement de l’armée dans deux énormes mines de cuivre et de cobalt ont fait ressortir l’absence de réglementation efficace du secteur minier et la piètre protection des droits humains.

Le thème de la conférence cette année est le suivant : « Optimiser la croissance et l’investissement dans l’économie minière numérisée ». Les discussions devraient également porter sur « le rôle de l’industrie dans la lutte contre le changement climatique et les mesures de décarbonisation et de durabilité ».

« Il ne peut y avoir de croissance ni de durabilité du secteur minier sans droits humains. Depuis trop longtemps, les patrons du secteur font la part belle au profit, au détriment des droits et de l’environnement. Les populations pauvres souffrent des effets du changement climatique dans les communautés minières, notamment du fait de la dégradation des terres et de la perte de leurs moyens de subsistance, comme nous pouvons le constater au Mozambique, a déclaré Deprose Muchena.

« Les groupes miniers comptent parmi les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre ; pourtant, ils commencent seulement à inscrire le changement climatique à l’ordre du jour. Les participants à cette rencontre doivent fixer des échéances précises et s’engager à réduire les émissions de carbone. »

Il ne peut y avoir de croissance ni de durabilité du secteur minier sans droits humains.

Deprose Muchena

Amnesty International demande aux entreprises de mettre en place sans délai des mesures afin de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Les gouvernements doivent adopter des lois qui imposent aux entreprises d’identifier et de prévenir, d’apporter des réponses et de rendre des comptes pour les impacts négatifs en termes de droits humains, notamment ceux liés aux émissions de gaz à effet de serre.

Complément d’information

Tandis que les investisseurs accueillent l’événement Mining Indaba au Cap, des organisations de la société civile, dont Amnesty International, organiseront leur propre édition d’Alternative Mining Indaba, au Cap également, mettant en avant des cas d’injustice et de violations des droits socioéconomiques des communautés minières, notamment en RDC, au Mozambique et en Afrique du Sud.

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@MULEYA MWANANYANDA, directrice adjointe pour l’Afrique australe à Amnesty International