En réaction à la décision de la Cour internationale de justice (CIJ), qui a ordonné au Myanmar le 23 janvier 2020 de prendre des « mesures conservatoires » pour prévenir des actes de génocide envers les Rohingyas, Nicholas Bequelin, directeur régional d’Amnesty International, a déclaré :
La décision prise le 23 janvier 2020 envoie un message aux dirigeants du Myanmar : le monde ne saurait tolérer leurs atrocités et n’acceptera pas aveuglément leur discours creux sur la situation actuelle dans l’État d’Arakan.
Nicholas Bequelin, directeur régional d’Amnesty International
« La décision prise le 23 janvier 2020 envoie un message aux dirigeants du Myanmar : le monde ne saurait tolérer leurs atrocités et n’acceptera pas aveuglément leur discours creux sur la situation actuelle dans l’État d’Arakan. Selon les estimations, les 600 000 Rohingyas encore sur place sont fréquemment et systématiquement privés de leurs droits les plus élémentaires. Ils risquent véritablement de subir de nouvelles atrocités.
« Il faut que le Myanmar respecte le jugement de la CIJ et prenne des mesures immédiates pour mettre un terme aux atteintes dont ce peuple est victime en ce moment même et empêcher la destruction de preuves.
« Cette décision intervient quelques jours seulement après que le Myanmar a publié un rapport de synthèse sur les conclusions de la commission d’enquête indépendante mise en place par l’État. En réalité, celle-ci n’était ni indépendante ni impartiale et ne peut être considérée comme relevant d’une démarche d’investigation crédible sur les crimes contre les Rohingyas. De même, rien n’a été fait pour enquêter sur les violations graves et de grande ampleur commises contre d’autres minorités ethniques ou ailleurs dans le pays.
« Tant que tous les responsables présumés de graves violations, y compris les donneurs d’ordre, ne seront pas amenés à répondre de leurs actes, ces crimes atroces demeureront endémiques. Le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) doit de toute urgence saisir la Cour pénale internationale de la situation au Myanmar. »
Complément d’information
Le 11 novembre 2019, la Gambie a saisi la CIJ au motif que le Myanmar ne respectait pas ses obligations au regard de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Elle demandait notamment à la CIJ d’ordonner de toute urgence des « mesures conservatoires » pour empêcher la perpétration de tout acte pouvant s’apparenter ou contribuer au crime de génocide contre les Rohingyas et pour protéger ce peuple de nouvelles atrocités, en attendant qu’il soit statué sur l’affaire.
Des audiences publiques sur les mesures conservatoires se sont tenues à La Haye du 10 au 12 décembre 2019. La délégation du Myanmar, qui avait à sa tête la conseillère d’État et dirigeante de facto Aung San Suu Kyi, a nié les accusations de génocide et appelé la CIJ à rejeter l’affaire et la demande de mesures conservatoires.
Le 20 janvier 2020, la commission d’enquête indépendante mise en place par le gouvernement a présenté son rapport final au président du Myanmar. Elle a conclu que les forces de sécurité s’étaient peut-être rendues coupables de crimes de guerre et d’un « recours disproportionné à la force » mais a indiqué n’avoir trouvé aucune preuve d’intention génocidaire. La version intégrale du rapport n’a pas encore été rendu publique.