Philippines : Les nouvelles attributions de la vice-présidente doivent marquer la fin des homicides liés au trafic de stupéfiants

Faisant suite à l’acceptation par la vice-présidente Leni Robredo de l’invitation du président Rodrigo Duterte à coprésider le comité du gouvernement chargé de la lutte contre les stupéfiants, Nicholas Bequelin, directeur régional pour l’Asie de l’Est et du Sud-Est à Amnesty International, a déclaré :

« Le fait que Madame Robredo a appelé à mettre un terme aux homicides et s’est efforcée de modifier l’approche du gouvernement en matière de lutte contre les stupéfiants est appréciable. Cela montre au moins que la pression internationale produit des effets et que l’opinion publique aux Philippines se détourne peu à peu de l’approche erronée de la “guerre contre la drogue”.

Le mois dernier encore, le président a dit à un responsable de la police d’aller “tuer tout le monde”. Si cette incitation à tuer émanant des plus hautes sphères du pouvoir ne cesse pas, les homicides et les autres violations des droits humains ne s’arrêteront pas non plus.

Nicholas Bequelin, directeur régional pour l’Asie de l’Est et du Sud-Est à Amnesty International

« Il reste à savoir si cette nomination peut amener un véritable changement d’approche. Nous nous demandons si elle aura le pouvoir d’amener les policiers et d’autres représentants des autorités à rendre des comptes, sans parler des hommes non identifiés soupçonnés de nombreux autres homicides par armes à feu. La vice-présidente doit avoir les moyens de faire cesser les homicides quotidiens et de modifier la chaîne de commandement meurtrière que nous avons constatée, sans quoi cette initiative sera vide de sens.

« Sa nomination ne change rien au fait que la “guerre contre la drogue” menée par le gouvernement Duterte est constitutive de crimes contre l’humanité. Le mois dernier encore, le président a dit à un responsable de la police d’aller “tuer tout le monde”. Si cette incitation à tuer émanant des plus hautes sphères du pouvoir ne cesse pas, les homicides et les autres violations des droits humains ne s’arrêteront pas non plus. »

Complément d’information

Le 6 novembre, la vice-présidente Leni Robredo, membre du Parti libéral, qui fait partie de l’opposition, a accepté l’invitation du président Rodrigo Duterte à coprésider le Comité interinstitutionnel de lutte contre les stupéfiants, aux côtés du chef de l’Agence nationale de lutte contre les stupéfiants des Philippines. Critique de longue date de la « guerre contre la drogue », Leni Robredo a récemment réitéré son opinion selon laquelle cette campagne avait échoué, ce qui a conduit la population à demander qu’elle la prenne en mains à la place du président.

Depuis l’arrivée au pouvoir de Rodrigo Duterte en 2016, des milliers de personnes ont été tuées dans une vague de violence cautionnée par l’État. Un grand nombre d’entre elles ont été victimes d’exécutions extrajudiciaires. En juillet 2019, Amnesty International a publié un rapport intitulé “They just kill”: Ongoing extrajudicial executions and other human rights violations in the Philippines ‘war on drugs’, dans lequel l’organisation expose comment de hauts gradés de la police qui supervisaient des opérations brutales à Manille ont été mutés dans la région de Luçon centrale pour continuer d’y diriger une violente campagne d’homicides. Amnesty International considère que ces homicides ont atteint un tel niveau qu’ils constituent des crimes contre l’humanité.