La Papouasie-Nouvelle-Guinée doit laisser entrer l’aide humanitaire et s’abstenir d’utiliser la force contre les réfugiés

La Papouasie-Nouvelle-Guinée a fait savoir jeudi 9 novembre dans la matinée au centre de détention pour réfugiés de Lombrum, sur l’île de Manus, que les réfugiés devaient quitter les lieux d’ici samedi 11 novembre, sans quoi ils seront expulsés de force. En réaction à cet ultimatum, Amnesty International a déclaré :

Il est impératif que les autorités de Papouasie-Nouvelle-Guinée et d’Australie permettent immédiatement l’acheminement d’une aide humanitaire dans le camp, et qu’elles ne répondent pas à la dégradation des conditions dans le centre de détention de Lombrum en essayant de faire partir les réfugiés par la force vers de nouveaux sites. Tout recours à la force dans cette atmosphère très tendue risque de se solder par de graves blessures, voire des pertes humaines.

Des chercheurs d’Amnesty International viennent de rentrer de l’île de Manus où ils ont été témoins des conditions de vie choquantes dans le centre.

« Il s’agit là d’une crise imputable à des décisions humaines. Ce sont les gouvernements australien et papouan-néo-guinéen qui ont laissé ces hommes sans eau ni nourriture, et sans installations sanitaires décentes ni électricité. Ayant créé cette situation, ils ne peuvent pas désormais l’aggraver en envoyant les forces de sécurité pour contraindre les réfugiés à quitter les lieux », a déclaré Kate Schuetze, spécialiste du Pacifique à Amnesty International.

« Il existe une solution à la situation que nous observons dans le camp – permettre immédiatement qu’une aide humanitaire parvienne sur place afin de rétablir l’accès à la nourriture, à l’eau, à l’électricité et à des soins de santé. C’est la seule solution qui serait compatible avec le droit international relatif aux droits humains à l’heure actuelle. »

Amnesty International demande depuis longtemps que le camp de l’île de Manus soit fermé et que les réfugiés soient mis en sécurité en Australie. Or, ce qui a été décidé est la fermeture d’un camp puis l’ouverture d’un autre sur un site où les réfugiés seraient encore plus vulnérables.

Les quelque 600 hommes se trouvant à Lombrum ont été forcés à choisir entre des produits et services de première nécessité essentiels à leur survie ou un transfert vers un lieu où ils risquent de subir de violentes attaques de la part de membres de la population locale et de connaître des années supplémentaires de conditions assimilables à une détention.

Comme on pouvait s’y attendre, une fois tous les services suspendus, la situation s’est gravement détériorée dans le camp. Si ces services ne sont pas rétablis, des maladies feront leur apparition et des décès sont à redouter. Plusieurs réfugiés sont déjà tombés malades en raison des conditions déplorables prévalant à Lombrum. Le weekend du 4 novembre, un homme souffrant de problèmes cardiaques a perdu connaissance et les secours ont mis plusieurs heures à arriver.

Amnesty International craint que les autorités n’utilisent les images choquantes du camp pour justifier le déploiement des forces de sécurité et le transfert forcé des réfugiés vers de nouveaux sites.

« Nous mettons les gouvernements de Papouasie-Nouvelle-Guinée et d’Australie en garde : un recours à la force débouchera presque inévitablement sur des violations des droits humains. Les conséquences d’une telle décision sont prévisibles, et nous serions face à une affaire très sérieuse si les mesures prises par les autorités se soldaient par de graves blessures ou des décès », a déclaré Kate Schuetze.

« Une autre voie se présente clairement. Les services doivent être rétablis jusqu’à ce qu’une solution sûre et digne, respectueuse des droits des réfugiés, soit trouvée. »

La décision prise par la Papouasie-Nouvelle-Guinée et l’Australie de suspendre tous les services à Lombrum semble avoir eu pour but de forcer les réfugiés à se rendre dans de nouveaux centres. Les réfugiés ont cependant dit à Amnesty International qu’ils sont déterminés à rester sur place parce qu’ils craignent pour leur sécurité dans ces nouveaux sites. Les travaux de recherche effectués par Amnesty International confirment que leurs craintes sont fondées. Des réfugiés ont été agressés et grièvement blessés par des membres de la population locale ayant clairement indiqué qu’ils ne veulent pas de ces hommes en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Les réfugiés ne bénéficient guère de protection contre ces attaques à moins de vivre à l’intérieur de centres de détention.

« Priver délibérément des réfugiés de nourriture et d’eau, dans un contexte où ils n’ont aucun moyen de subsistance, dans le but de les contraindre à partir constitue une atteinte grave à leurs droits fondamentaux. Cela est cruel, inhumain et dégradant », a déclaré Kate Schuetze.

« Les autorités australiennes pourraient également mettre fin à cette crise en transférant immédiatement les réfugié-e-s et les hommes vulnérables en Australie, où ils avaient sollicité une protection dès le début. »