La FIFA exhortée à s’attaquer à l’exploitation sur les chantiers de la Coupe du monde

Il faut que la Fédération internationale de football association (FIFA) donne suite immédiatement aux recommandations cruciales formulées ce jeudi 9 novembre dans le premier rapport publié par son Conseil consultatif des droits de l’homme, a déclaré Amnesty International.

Dans son rapport, le Conseil évalue les progrès accomplis par la FIFA en ce qui concerne la gestion des risques liés aux droits humains dans le cadre de ses activités et se félicite des mesures prises, comme l’adoption d’une nouvelle politique relative aux droits humains. Néanmoins, il exprime clairement ses craintes au sujet des risques pour les travailleurs, dont de nombreux éléments confirment l’existence, aussi bien en Russie qu’au Qatar.

S’agissant du Qatar, le Conseil exhorte la FIFA à rendre sa position publique et à faire pression sur l’État pour qu’il mette véritablement fin au système de parrainage tristement célèbre appelé kafala, en écho aux appels lancés par Amnesty International et d’autres organisations depuis plusieurs années.

« Ce rapport doit susciter une prise de conscience au sein de la FIFA, qui s’est abstenue jusque là de se servir de son influence considérable sur la question du système de parrainage abusif en vigueur au Qatar, a déclaré James Lynch, directeur adjoint du programme Thématiques mondiales à Amnesty International.

« C’est le Conseil consultatif des droits de l’homme, un organe indépendant créé par la FIFA elle-même, qui demande à celle-ci d’adopter une position claire à l’égard de la loi qatarienne et d’agir sur cette base. Cette démarche doit débuter sans délai, rien ne saurait justifier un retard. »

C’est le Conseil consultatif des droits de l’homme, un organe indépendant créé par la FIFA elle-même, qui demande à celle-ci d’adopter une position claire à l’égard de la loi qatarienne et d’agir sur cette base. Cette démarche doit débuter sans délai, rien ne saurait justifier un retard

James Lynch, directeur adjoint du programme Thématiques mondiales

Dans son rapport, le Conseil fait observer que les responsabilités de la FIFA ne doivent pas s’arrêter à la construction des stades mais porter sur l’ensemble des infrastructures nécessaires à l’organisation de la Coupe du monde 2022. En outre, il demande des informations plus détaillées sur plusieurs décès sans lien direct avec l’activité professionnelle.

En octobre, le Qatar a annoncé qu’il prévoyait de mener, avec l’appui de l’Organisation internationale du travail (OIT), une série de réformes dont on peut se réjouir sur le principe. Cependant, on ne sait pas exactement comment ni quand il réformera le système du kafala.

« La pression et la surveillance de la FIFA seront essentielles pour faire en sorte que les engagements pris par l’État qatarien auprès de l’Organisation internationale du travail soient pleinement tenus », a déclaré James Lynch.

Un rapport qui omet des domaines clés

Le rapport omet certains domaines clés concernant la Coupe du monde 2022. Ainsi, il n’exhorte pas la FIFA à faire pression sur le Qatar pour qu’il enquête sur le décès de travailleurs migrants et supprime le système abusif de l’autorisation de sortie, ce qu’Amnesty International et Human Rights Watch ne cessent d’appeler de leurs vœux.

« Nous souhaiterions entendre des messages plus clairs sur les questions clés, comme l’autorisation de sortie et les décès de travailleurs migrants. Il faudra que le prochain rapport du Conseil soit beaucoup plus explicite quant aux responsabilités de la FIFA dans ces domaines », a déclaré James Lynch.

En 2017, la FIFA a pris une série de mesures institutionnelles concernant les droits humains : elle a notamment instauré une politique relative aux droits humains et élaboré de nouvelles directives sur les candidatures et les modalités d’accueil pour les futures coupes du monde.

« La FIFA a pris une certaine distance par rapport à sa position de 2013 et 2014, ses dirigeants estimant à l’époque que les droits humains n’étaient pas de son ressort. Il est heureux qu’elle indique désormais clairement qu’elle respectera tous les droits humains reconnus et que les pays se portant candidats à l’organisation de la Coupe du monde doivent en faire également la démonstration, a déclaré James Lynch.

« Cependant, la FIFA ne peut pas se reposer sur ses lauriers car elle sera jugée sur la mise en pratique de ces politiques. »

Complément d’information

Le Conseil consultatif des droits de l’homme de la FIFA est composé de représentants d’organisations internationales, de groupes de défense des droits humains et de syndicats.

Son premier rapport contient un ensemble de recommandations importantes, qui appellent notamment la FIFA à limiter le recours à des sous-traitants pour les programmes de construction liés à la Coupe du monde, à veiller à ce que les travailleurs migrants ne paient pas de frais de recrutement et à aider les travailleurs blessés sur les chantiers en Russie et au Qatar à obtenir justice et réparation.

En 2016, Amnesty International a publié des recherches dénonçant l’exploitation des travailleurs migrants sur le chantier d’un stade de la Coupe du monde au Qatar. En 2017, Human Rights Watch a publié un rapport important qui détaille les conditions de travail des personnes participant à la construction des stades de la Coupe du monde en Russie.