Iran. Arrestation d’une défenseure des droits humains en quête de vérité sur la «disparition» de membres de sa famille

Les autorités iraniennes doivent libérer immédiatement et sans condition une défenseure des droits humains arrêtée chez elle le 10 septembre. Elle avait déjà été prise pour cible par les autorités en raison de son militantisme pacifique, a déclaré Amnesty International.

Raheleh Rahemipour a passé des années à tenter de découvrir la vérité sur ce qui est arrivé à son frère et sa nièce, victimes d’une disparition forcée alors qu’ils se trouvaient en détention au début des années 1980. Elle a été condamnée à un an de prison au mois de février en raison de ces démarches et attend la conclusion de son appel.

« Raheleh Rahemipour a déjà enduré l’angoisse et le désespoir de voir ses proches ” disparaître ” de force et encourt désormais une peine de prison injuste pour ses démarches visant à connaître la vérité sur le sort qui leur a été réservé. Son arrestation illustre une nouvelle fois la détermination des autorités iraniennes, résolues à l’intimider pour la faire taire et prolonger sa souffrance, a déclaré Magdalena Mughrabi, directrice adjointe du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient à Amnesty International.

« Au lieu de s’en prendre à des familles de victimes qui recherchent leurs proches, les autorités iraniennes doivent répondre à leurs demandes légitimes de vérité et de justice. »

Au lieu de s'en prendre à des familles de victimes qui recherchent leurs proches, les autorités iraniennes doivent répondre à leurs demandes légitimes de vérité et de justice.

Magdalena Mughrabi, directrice adjointe du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient à Amnesty International

La nuit dernière, trois représentants de l’État sont arrivés au domicile de Raheleh Rahemipour à Téhéran et ont présenté un mandat d’arrêt émis par le bureau du procureur à la prison d’Evin. Ces agents, sans doute du ministère du Renseignement, ne se sont pas identifiés et n’ont pas donné de motif pour son arrestation, expliquant simplement qu’elle était amenée en garde à vue pour être interrogée. Elle n’a pas été autorisée à entrer en contact avec son avocat depuis.

En février 2017, Raheleh Rahemipour a été condamnée à un an de prison pour « diffusion de propagande contre le régime » par un tribunal révolutionnaire, à Téhéran. Le tribunal a cité à titre de « preuves » ses interviews dans les médias sur la disparition forcée de ses proches et sa participation à des rassemblements pacifiques, où elle brandissait une pancarte sur laquelle on pouvait lire : « Vous avez tué mon frère. Qu’avez-vous fait de son bébé ? » L’ONU a déjà demandé aux autorités iraniennes de cesser de la harceler.

La nièce de Raheleh Rahemipour, Golrou, est née à la prison d’Evin en avril 1984, mais elle a été enlevée à sa mère alors qu’elle n’avait que 15 jours, apparemment pour passer des tests médicaux. On a ensuite dit à la famille qu’elle était décédée, mais les autorités n’ont jamais fourni de certificat de décès ni aucune information sur les circonstances de sa mort ou de son enterrement.

Le père du bébé, le frère de Raheleh Rahemipour, Hossein, a été arrêté en août 1983 avec sa femme enceinte en raison de son affiliation à un groupe politique de l’opposition. Environ un an après son arrestation, ses proches ont reçu un appel de la prison d’Evin, leur disant de venir chercher ses effets personnels. Ils ont alors compris que cela signifiait qu’il avait été exécuté. Son corps n’a jamais été restitué à sa famille et aucun certificat de décès n’a été délivré.

Complément d’information

Raheleh Rahemipour figure parmi des défenseurs des droits humains dont les cas ont été présentés dans le récent rapport d’Amnesty International intitulé Caught in a web of repression, qui expose en détail la répression visant les activités en faveur des droits humains dans le pays.

La disparition forcée est un crime aux termes du droit international. Les organismes internationaux de défense des droits humains reconnaissent que la disparition forcée peut causer une grave détresse psychologique qui bafoue le droit des membres de la famille de ne pas être soumis à la torture ni à d’autres traitements ou sanctions cruels, inhumains ou dégradants.