République dominicaine. L’assassinat d’une femme transgenre met en évidence la nécessité d’une protection contre les discriminations

L’assassinat d’une femme transgenre en République dominicaine – le deuxième recensé cette année et le 38e depuis 2006 – met en évidence l’extrême violence à laquelle de nombreuses femmes transgenres sont confrontées dans ce pays et la nécessité d’adopter des dispositions juridiques pour renforcer la protection des groupes discriminés, a déclaré Amnesty International.

« L’assassinat de Jessica Rubi Mori vient rappeler de manière tragique que les autorités dominicaines doivent prendre des mesures plus fermes pour éradiquer les discriminations, notamment celles fondées sur l’identité de genre et l’orientation sexuelle », a déclaré Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques d’Amnesty International.

L'assassinat de Jessica Rubi Mori vient rappeler de manière tragique que les autorités dominicaines doivent prendre des mesures plus fermes pour éradiquer les discriminations, notamment celles fondées sur l'identité de genre et l'orientation sexuelle.

Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques d'Amnesty International

Le corps de Jessica Rubi Mori (Elvis Guerrero à l’état civil), travailleuse du sexe transgenre et militante de l’organisation communautaire Este Amor (Cet amour), a été retrouvé le 3 juin 2017 sur un terrain vague dans la municipalité de Higüey, dans l’est du pays. Il avait été démembré. Selon les médias, un suspect a été arrêté.

D’après Cristian King, directeur exécutif de TRANSSA – Trans Siempre Amigas (Trans toujours amies), 38 cas d’homicides de femmes transgenres ont été recensés depuis 2006 par son organisation, mais quatre personnes seulement ont été reconnues coupables à ce jour. Cristian King a indiqué à Amnesty International que son organisation travaillait en étroite collaboration avec l’Unité des droits humains du Bureau du procureur général sur les affaires récentes.

Il y a quelques semaines, une peine de 20 ans de réclusion a été prononcée pour le meurtre d’une autre femme transgenre, Kimberly Sody, tuée en 2014.

Les organisations LGBTI dominicaines réclament depuis longtemps l’adoption d’une loi sur l’identité de genre pour protéger les droits des personnes transgenres. Une proposition de loi anti-discrimination a été élaborée l’année dernière, dans le but de remédier aux discriminations ancrées de longue date qui affectent de nombreux groupes dans le pays, notamment celles fondées sur l’identité de genre, l’orientation sexuelle et l’appartenance ethnique. La proposition n’a pas encore été soumise au Congrès.

« Les autorités dominicaines doivent continuer à travailler avec les groupes de la société civile pour donner effet à ces propositions. Ce crime doit donner lieu à une enquête indépendante et impartiale. Les autorités doivent prendre toutes les mesures qui s’imposent pour découvrir, le cas échéant, s’il a été motivé par des considérations discriminatoires. »

En République dominicaine, selon une étude de la coalition des Communautés vulnérables des Caraïbes (CVC) publiée en 2012, moins de 35 % des travailleuses du sexe transgenres vont jusqu’au bout de leurs études secondaires. Lorsqu’elles sont poussées vers la sortie du système scolaire, beaucoup entrent dans la prostitution, à 16 ans à peine. Cette exclusion sociale précoce conduit à la pauvreté et à une violence accrue. Les personnes transgenres sont souvent poussées vers des activités illégales, comme le travail du sexe, qui les exposent davantage encore aux violences policières et aux détentions arbitraires.

La même étude a montré que 80 % des travailleuses du sexe transgenres se sentaient davantage visées par des discriminations en tant que transgenres qu’en tant que travailleuses du sexe. Plus de 35 % des travailleuses du sexe transgenres avaient été victimes de violences physiques dans la rue, plus de 40 % avaient été victimes de violences physiques de la part de clients et plus de 20 % de violences physiques de la part d’un compagnon. Quatre-vingts pour cent d’entre elles avaient été arrêtées ou placées en détention au moins une fois, et 36 % avaient eu des rapports sexuels avec des policiers pour éviter des arrestations.