L’Arabie saoudite doit immédiatement cesser d’utiliser des bombes à sous-munitions, détruire son stock et adhérer à la Convention sur les armes à sous-munitions, a déclaré Amnesty International après que le royaume a reconnu avoir utilisé au Yémen ces armes non discriminantes par nature.
Le général Ahmed al Asiri, porte-parole de la coalition militaire dirigée par l’Arabie saoudite, a déclaré le 19 décembre que la coalition cesserait d’utiliser les bombes à sous-munitions BL-755 fabriquées au Royaume-Uni. Cette déclaration vient confirmer les conclusions d’Amnesty International, selon lesquelles ce type d’armes était utilisé depuis au moins décembre 2015 dans le cadre du conflit. L’organisation avait révélé l’utilisation par la coalition d’armes à sous-munitions fabriquées au Royaume-Uni, aux États-Unis et au Brésil.
« Il est étonnant qu’il ait fallu si longtemps pour que la coalition dirigée par l’Arabie saoudite admette officiellement son recours à des armes à dispersion, non discriminantes par nature, dans le cadre du conflit au Yémen, a déclaré James Lynch, responsable du programme Contrôle des armes et droits humains à Amnesty International.
Il est étonnant qu’il ait fallu si longtemps pour que la coalition dirigée par l'Arabie saoudite admette officiellement son recours à des armes à dispersion, non discriminantes par nature, dans le cadre du conflit au Yémen
James Lynch, responsable du programme Contrôle des armes et droits humains à Amnesty International
« Bien sûr, nous le savions depuis des mois. Amnesty International et d’autresont recueilli des preuves accablantes qui attestent que ces armes ont tué et mutilé des civils, dont des enfants, dans des villages de paysans dans le nord du Yémen.
« Ces faits soulignent qu’il est nécessaire de mener une enquête internationale indépendante afin d’examiner les éléments de plus en plus nombreux attestant de violations du droit international au Yémen et de garantir l’obligation de rendre des comptes.
« Les transferts d’armes irresponsables et illégaux à destination des belligérants au Yémen perpétuent les souffrances civiles. Tous les États doivent imposer un embargo total sur les transferts d’armes susceptibles d’être utilisées par l’une des parties au conflit. »
Ces faits soulignent qu'il est nécessaire de mener une enquête internationale indépendante afin d'examiner les éléments de plus en plus nombreux attestant de violations du droit international au Yémen et de garantir l'obligation de rendre des comptes
James Lynch
Complément d’information
Amnesty International et d’autres demandent depuis des années à l’ensemble des États de cesser immédiatement l’utilisation, la production, le transfert et le stockage d’armes à sous-munitions et de devenir parties à la Convention de 2008 sur les armes à sous-munitions. Ni l’Arabie saoudite ni ses alliés au sein de la coalition n’ont adhéré à la Convention. Cependant, aux termes du droit international humanitaire coutumier, les membres de la coalition ne doivent pas utiliser d’armes qui par nature frappent sans discrimination, notamment les bombes à sous-munitions, ce qui représente invariablement un danger pour les civils.
Les armes à sous-munitions, aujourd’hui interdites par plus de 100 pays, présentent un danger considérable pour les civils. Larguées par avion ou tirées depuis le sol, elles sont conçues pour s’ouvrir en l’air et libérer leurs sous-munitions sur toute une zone – sans opérer de distinction entre civils et cibles militaires. Nombre de sous-munitions n’explosent pas à l’impact et se transforment de fait en mines anti-personnel. Les sous-munitions qui n’ont pas explosé peuvent conserver leur capacité meurtrière pendant des années, représentant un fort risque pour la population civile, à la fois pendant et après le conflit. Parce qu’elles sont non discriminantes par nature, les armes à sous-munitions ne doivent être employées en aucune circonstance.
Les membres de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite doivent immédiatement transmettre à l’ONU des informations précises sur les sites visés par des armes à sous-munitions, notamment des cartes, des données incluant la date exacte des frappes, les types et quantités précises d’armes utilisées, en vue de faciliter le déminage et les programmes d’éducation à la réduction des risques, et de limiter le danger que ces armes ne fassent de nouvelles victimes parmi les civils.
L’Arabie saoudite et les membres de la coalition doivent faciliter le déminage de zones contaminées par des munitions non explosées. Les États qui sont en mesure de le faire doivent fournir toute l’aide possible, notamment technique, financière et matérielle, afin de permettre l’identification, ainsi que l’enlèvement ou la destruction de sous-munitions issues d’armes à dispersion, de bombes non explosées et d’autres vestiges explosifs de guerre. En outre, ils doivent fournir une assistance aux victimes, notamment en termes de soins médicaux et de soutien psychologique, et faire bénéficier les victimes et leurs familles de mesures de rééducation, ainsi que d’une éducation aux risques.