Iran. Une écrivaine, condamnée à de la prison pour une fiction sur la lapidation, a été arrêtée chez elle

Les autorités iraniennes doivent libérer immédiatement et sans condition l’écrivaine et militante des droits humains Golrokh Ebrahimi Iraee, qui vient d’être arrêtée le 24 octobre, a déclaré Amnesty International.

Sans qu’aucune convocation officielle ne lui ait été présentée, Golrokh Ebrahimi Iraee a été arrêtée par des agents à son domicile dans la matinée du 24 octobre. Ils ont fracassé sa porte d’entrée et l’ont emmenée à la prison d’Evin à Téhéran. Selon certaines informations, elle a été conduite dans le secteur réservé aux femmes pour y purger sa peine de six ans d’emprisonnement. Elle a notamment été condamnée pour « atteinte aux valeurs sacrées de l’islam », pour avoir écrit une histoire non publiée sur la pratique de la lapidation en Iran. L’époux de Golrokh Ebrahimi Iraee, Arash Sadeghi, militant des droits humains et prisonnier d’opinion, a depuis entamé une grève de la faim pour protester contre son incarcération.

« Golrokh Ebrahimi Iraee s’inscrit dans la lignée des jeunes écrivains et militants ciblés par la répression implacable des autorités iraniennes contre l’expression artistique. Son incarcération pour avoir pacifiquement exprimé son opposition à la lapidation est une injustice terrible et une attaque contre la liberté d’expression. Elle témoigne également d’un soutien inquiétant à ce châtiment cruel et inhumain, a déclaré Magdalena Mughrabi, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

« Les autorités iraniennes doivent briser ce cycle d’injustice et libérer Golrokh Ebrahimi Iraee immédiatement et sans condition. Elles doivent également veiller à ce que sa condamnation soit annulée. »

Golrokh Ebrahimi Iraee s'inscrit dans la lignée des jeunes écrivains et militants ciblés par la répression implacable des autorités iraniennes contre l'expression artistique.

Magdalena Mughrabi, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International

La fiction que Golrokh Ebrahimi Iraee a écrite, mais qui n’a pas été publiée, pour laquelle elle a été déclarée coupable d’« atteinte aux valeurs sacrées de l’islam », raconte la réaction d’une jeune femme qui regarde le film La lapidation de Soraya M – l’histoire vraie d’une jeune femme lapidée à mort pour adultère – et qui, de colère, brûle une copie du Coran.

Les autorités ont découvert cette histoire au moment de l’arrestation de Golrokh Ebrahimi Iraee et de son époux Arash Sadeghi, qui purge actuellement une peine de 15 ans à la prison d’Evin, notamment pour « diffusion de propagande contre le régime », « rassemblement et collusion dans le but de nuire à la sécurité nationale » et « outrage au fondateur de la république islamique d’Iran ». Ces accusations sont liées à ses activités pacifiques en faveur des droits fondamentaux.

Le 6 septembre 2014, tous deux ont été interpellés sur le lieu de travail d’Arash Sadeghi à Téhéran par des hommes qui étaient apparemment des gardiens de la révolution. Ces derniers, qui n’ont produit aucun mandat d’arrêt, ont emmené le couple à son domicile, qu’ils ont fouillé méthodiquement. Ils ont alors trouvé l’histoire qu’avait écrite Golrokh Ebrahimi.

Arash Sadeghi a ensuite été transféré à la prison d’Evin, et Golrokh Ebrahimi Iraee dans un lieu de détention secret. Elle y a été gardée jusqu’au lendemain, avant d’être transférée elle aussi à la prison d’Evin. Elle y a été détenue pendant 20 jours, sans pouvoir communiquer avec sa famille, consulter un avocat ni comparaître devant un juge. Elle a été placée à l’isolement pendant les trois premiers jours.

Golrokh Ebrahimi Iraee a déclaré que durant ses périodes de détention, elle a été soumise à de longues heures d’interrogatoire, alors qu’elle avait les yeux bandés et que les agents qui l’interrogeaient lui répétaient qu’elle serait exécutée pour avoir « insulté l’islam ». Elle entendait clairement des agents menacer et insulter son époux dans la cellule voisine. Arash Sadeghi a plus tard déclaré avoir été roué de coups de pied, frappé à coups de poing à la tête, giflé et étranglé pendant sa détention.

Au lieu de s’entêter à intimider et emprisonner les voix critiques, les autorités doivent abolir définitivement ce châtiment cruel

Magdalena Mughrabi

Golrokh Ebrahimi Iraee a été jugée lors de deux brèves audiences devant un tribunal révolutionnaire à Téhéran, et condamnée à six ans de prison. Elle n’a pas bénéficié de l’assistance d’un avocat lors de son procès. Le premier avocat qu’elle a engagé a subi des pressions de la part des services de renseignements et de sécurité pour se désister de l’affaire et le second s’est vu interdire de prendre connaissance de son dossier et de la défendre. Elle n’a pas été en mesure d’assurer sa propre défense, car la première audience était consacrée aux activités militantes de son époux. Pour la seconde, elle se trouvait à l’hôpital en convalescence après une grave opération et ne pouvait donc être présente. Elle a soumis au tribunal son dossier médical, mais celui-ci a rejeté sa demande d’ajournement de l’audience.

Début octobre, Golrokh Ebrahimi Iraee a reçu un appel du Centre pour l’application des peines lui ordonnant de se présenter à la prison d’Evin afin de purger sa condamnation à six ans d’emprisonnement. En cas de refus, elle serait arrêtée dans la rue ou lors d’une descente effectuée à son domicile. Cependant, elle n’a jamais reçu de convocation officielle.

« Golrokh Ebrahimi est punie pour avoir exercé pacifiquement ses droits humains. En effet, le crime à la base de cette affaire est le maintien par l’Iran de la pratique de la lapidation, qui constitue une forme de torture. Au lieu de s’entêter à intimider et emprisonner les voix critiques, les autorités doivent abolir définitivement ce châtiment cruel », a déclaré Magdalena Mughrabi.