Des dizaines de détenus incarcérés dans des conditions terribles, dans des conteneurs de transport maritime en métal, sans aération ou presque, ne recevant de la nourriture qu’une à deux fois par semaine et de l’eau potable en quantité insuffisante, risquent de mourir, a déclaré Amnesty International vendredi 27 mai 2016.
Selon des informations qui lui sont parvenues, ces conditions de détention auraient déjà causé la mort de plusieurs prisonniers sur le site de Gorom, situé à une vingtaine de kilomètres de la capitale Djouba. Régulièrement, les soldats les sortent des conteneurs pour les passer à tabac.
« Les détenus subissent des conditions épouvantables et le traitement qui leur est réservé relève de la torture, a déclaré Muthoni Wanyeki, directrice régionale d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Est, la Corne de l’Afrique et les Grands lacs.
« Ce mépris total pour la vie et la dignité humaine doit cesser et pour cela, il faut fermer sur-le-champ le site de détention jusqu’à ce que les conditions soient mises en conformité avec les normes relatives aux droits humains. »
Sur une image satellite qui, selon Amnesty International est le site de détention de Gorom, on peut voir quatre conteneurs métalliques placés en forme de L, encerclés par deux clôtures. Selon des informations reçues par Amnesty International, ces quatre conteneurs servent à accueillir des détenus et ont été amenés sur le site début novembre 2015.
La plupart des détenus sont des civils qui n’ont été inculpés d’aucune infraction et sont accusés d’entretenir des liens avec l’ex-groupe rebelle Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan en opposition (SPLM/A-IO), qui fait aujourd’hui partie du gouvernement d’unité nationale. Ils ne sont pas autorisés à contacter un avocat ou leurs proches, ni à comparaître devant un juge.
« Tous les détenus doivent être libérés ou inculpés et traduits devant des tribunaux indépendants. Les prisonniers civils doivent toujours être incarcérés dans des centres civils de détention et jugés par des tribunaux civils », a déclaré Muthoni Wanyeki.
Amnesty International a adressé un courrier au général Marial Nour, directeur des services de renseignements de l’armée, demandant des informations supplémentaires sur le site de détention de Gorom, notamment les conditions de détention, le nom des personnes qui y sont détenues et celles qui sont mortes.
Elle a également écrit au président Salva Kiir pour l’informer de la situation à Gorom, et lui demander, en sa qualité de commandant en chef des forces armées, d’intervenir et de mettre un terme aux violations des droits humains perpétrées sur ce site.
« Le président Kiir doit ordonner la tenue d’une enquête indépendante sur ce site et sur les pratiques de détention des services de renseignements militaires en général, en vue de réformer ces pratiques et de faire en sorte que les responsables présumés d’actes de torture, d’homicides et de disparitions forcées soient amenés à rendre des comptes, a déclaré Muthoni Wanyeki.
« Dans l’attente de ces investigations, le président doit suspendre tous ceux qui sont raisonnablement soupçonnés d’avoir commis de tels actes. »
Ces révélations surviennent à peine deux mois après qu’Amnesty International a publié un rapport exposant en détail l’asphyxie délibérée de plus de 60 hommes et garçons dans des conteneurs de transport à Leer, dans l’État d’Unité en octobre 2015. Elle demandait que cessent les homicides illégaux commis par les forces armées.