Cuba. La répression à l’occasion de la Journée des droits de l’homme s’inscrit dans la lignée d’un mois d’arrestations massives

Le risque s’accroît pour les défenseurs cubains des droits humains d’être détenus ou harcelés par les autorités, sur fond de manifestations prévues à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’homme, le 10 décembre, a déclaré Amnesty International à la suite de la vague de près de 1 500 arrestations en un peu plus d’un mois. 

Le 9 décembre, la police de la capitale cubaine, La Havane, a restreint de manière arbitraire la liberté de mouvement des membres de l’association de militantes Les Dames en blanc (Damas de Blanco), qui se préparaient à manifester le 10 décembre. Cette mesure intervient alors qu’en novembre 2015, on a enregistré au moins 1 477 détentions à caractère politique, chiffre mensuel record depuis de nombreuses années, selon la Commission cubaine pour les droits de l’homme et la réconciliation nationale (CCDHRN). 

« Depuis des semaines, les autorités cubaines multiplient les arrestations et les mesures de harcèlement pour empêcher les militants des droits humains et les dissidents de manifester pacifiquement. C’est un phénomène systématique qui réduit au silence les militants cubains dans leurs propres rues. Depuis des années, le harcèlement est la règle plutôt que l’exception à l’occasion de la Journée des droits de l’homme, et ce n’est pas acceptable », a déclaré Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques d’Amnesty International. 

Depuis des semaines, les autorités cubaines multiplient les arrestations et les mesures de harcèlement pour empêcher les militants des droits humains et les dissidents de manifester pacifiquement. C'est un phénomène systématique qui réduit au silence les militants cubains dans leurs propres rues. Depuis des années, le harcèlement est la règle plutôt que l'exception à l'occasion de la Journée des droits de l'homme, et ce n'est pas acceptable.

Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques d'Amnesty International

Les Dames en blanc et d’autres organisations rassemblent des militants pour défiler aujourd’hui, à La Havane et ailleurs, afin de soutenir la Déclaration universelle des droits de l’homme et d’exercer leurs droits à la réunion pacifique et à la liberté d’expression. 

Le mouvement et ses sympathisants organisent des marches tous les dimanches depuis plus de 30 semaines consécutives pour réclamer la libération des prisonniers politiques cubains et la protection des droits humains. Face à ces manifestations pacifiques, les autorités répondent par des arrestations arbitraires et d’autres mesures de harcèlement.  

Le mouvement pro-démocratie Union patriotique de Cuba (Unión Patriótica de Cuba, UNPACU) a également signalé de nombreuses arrestations de ses membres à travers le pays ces derniers mois. 

En vue d’entraver les manifestations, les militants interpellés sont fréquemment conduits dans des zones éloignées où ils n’ont d’autre choix que de rentrer à pied chez eux, ou sont placés en détention pendant une à 30 heures. 

Selon les militants cubains des droits humains, l’année 2015 est marquée par un nombre élevé d’arrestations, mais aussi par une violence accrue des autorités de l’État à l’égard des dissidents politiques et des militants pacifiques.  

« Les autorités cubaines doivent s’abstenir de disperser, d’arrêter ou de placer en détention les manifestants pacifiques, a déclaré Erika Guevara-Rosas.  

Le droit des Cubains à la liberté d'expression et de réunion pacifique doit être respecté à l'occasion de la Journée internationale des droits de l'homme et tout au long de l'année.

Erika Guevara-Rosas

« Le droit des Cubains à la liberté d’expression et de réunion pacifique doit être respecté à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’homme et tout au long de l’année. » 

Complément d’information

Au milieu des années 1990, Amnesty International a pu observer un basculement à Cuba : les autorités se sont détournées des nombreuses détentions politiques de longue durée, leur préférant les arrestations arbitraires de courte durée et les mesures de harcèlement ciblant les militants, les dissidents politiques, les défenseurs des droits humains et les journalistes indépendants. 

Le nombre de détentions à caractère politique a progressivement augmenté ces dernières années, selon la CCDHRN. 

Les arrestations et détentions arbitraires connaissent généralement une forte hausse lors des visites ou sommets officiels. En septembre 2015, lors de la visite du pape François à Cuba, la CCDHRN a recensé 882 arrestations de ce type, alors que la moyenne par mois s’élevait à 700 en 2014. Nombre des personnes détenues le sont pour une durée variant entre une et 30 heures. Des militants ont signalé des cas d’usage excessif de la force par la police. 

Les militants politiques et défenseurs des droits humains cubains sont souvent accusés, sans être officiellement inculpés, au titre d’articles du Code pénal cubain dans le but de réfréner l’exercice légitime du droit à la liberté d’expression et de rassemblement pacifique. Les dispositions couramment invoquées englobent l’insulte ou l’outrage envers un fonctionnaire (« desacato »), la résistance à un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions (« resistencia ») et les troubles à l’ordre public (« desórdenes públicos »), disposition qui pénalise tout grand rassemblement ou tout acte dans les lieux publics visant à provoquer la panique ou le trouble.