Mexique. Disparition forcée des étudiants d’Ayotzinapa – Chronologie des faits

Le 26 septembre 2014, 43 étudiants de lécole normale rurale Raúl Isidro Burgos dAyotzinapa ont été soumis à une disparition forcée à Iguala, dans lÉtat de Guerrero. Les restes calcinés de lun dentre eux ont été retrouvés des semaines plus tard. Les 42 autres étudiants sont toujours portés disparus.

Voici une liste chronologique de certains des épisodes clés dun des cas les plus choquants de violations des droits humains de lhistoire récente du Mexique.

Septembre 2014

26 – Une centaine détudiants inscrits à lécole normale rurale Raúl Isidro Burgos, à Ayotzinapa, dans lÉtat de Guerrero (sud du Mexique), se rendent dans la ville dIguala, à 120 kilomètres. Ils ont lintention de récolter des fonds et daller en bus à Mexico pour prendre part à une manifestation commémorant lanniversaire du massacre détudiants non armés à Tlatelolco, le 2 octobre 1968.

Les étudiants, qui voyageaient à bord de deux bus, en empruntent trois autres à la gare routière afin de poursuivre leur trajet.

Vers 21 heures ce soir-là, des policiers municipaux sen prennent violemment aux étudiants lors dévénements distincts à travers la ville dIguala. Les autorités ouvrent le feu. Des policiers de lÉtat, des policiers fédéraux et des soldats sont témoins des agressions sans protéger les étudiants ; on ne sait pas encore clairement sils ont participé de manière plus active.

Les événements débouchent sur lexécution extrajudiciaire de trois étudiants et de trois passants cette nuit-là. Vingt-cinq personnes sont blessées. Quarante-trois étudiants sont soumis à une disparition forcée.

27 – Le corps de Julio Cesar Mondragon Fontes, un étudiant de 22 ans, est retrouvé avec le visage écorché et les yeux arrachés. Les proches des 43 étudiants les déclarent disparus.

Le parquet de lÉtat de Guerrero ouvre une enquête sur ces événements.

28 – Les autorités locales attribuent ces crimes au cartel de la drogue Guerreros Unidos et arrêtent 22 policiers dIguala.

Octobre

1er – José Luis Abarca, le maire dIguala, entre dans la clandestinité.

5 – Le procureur général de la République ouvre une autre enquête sur la disparition des étudiants, parallèlement à lenquête menée par les autorités de lÉtat de Guerrero.

À la demande des familles de victimes, lÉquipe argentine danthropologie médicolégale commence à participer à lexpertise légiste qui accompagne lenquête diligentée par le procureur général de la République.

6 – Enrique Peña Nieto, le président mexicain, évoque pour la première fois la disparition des étudiants lors dun discours télévisé. Il dit alors : « La société mexicaine et les proches de ces jeunes étudiants manquant malheureusement à lappel réclament à juste titre que la lumière soit faite sur ce qui sest passé et que justice soit rendue. »

8 – Des milliers de personnes défilent à travers Mexico pour demander que les étudiants soient retrouvés.

10 – Jesús Murillo Karam, le procureur général de la République, annonce larrestation de quatre personnes en relation avec la disparition des étudiants et la découverte de quatre nouveaux charniers à Iguala, dans lÉtat de Guerrero.

14 – Des responsables du bureau du procureur de la République déclarent que 28 des corps retrouvés dans le premier charnier nappartiennent pas aux étudiants.

15 – La police dIguala trouve six autres charniers dans cette zone.

16 – Enrique Peña Nieto affirme que lélucidation de ce cas est une « priorité » pour le Mexique.

17 – Jesús Murillo Karam, le procureur de la République, annonce larrestation de Sidronio Casarrubias Salgado, le chef présumé du gang de narco-trafiquants des Guerreros Unidos, en relation avec la disparition des étudiants.

Il signale par ailleurs que 36 policiers municipaux des villes dIguala et de Cocula, dans lÉtat de Guerrero, ont déjà été appréhendés, de même que 17 membres de bandes criminelles, et que trois autres charniers ont été retrouvés à Iguala.

22 – Jesús Murillo Karam affirme que José Luis Abarca, le maire dIguala, et son épouse ont ordonné lattaque contre les étudiants.

23 – Angel Aguirre, gouverneur de lÉtat de Guerrero, démissionne.

29 – Les familles des étudiants disparus rencontrent le président Enrique Peña Nieto à Mexico pour la première fois.

Novembre

4 – José Luis Abarca, maire dIguala, et son épouse, María de los Angeles de Pineda, sont arrêtés à Mexico. José Luis Abarca est envoyé dans une prison de sécurité maximale.

7 – Le gouvernement mexicain affirme que les étudiants ont été tués par des membres des Guerreros Unidos, un cartel de la drogue local, et que leurs corps ont été incinérés dans une décharge locale.

11 – Les experts légistes argentins déclarent quaucun des corps retrouvés à Cocula, Iguala et La Parota nont été identifiés.

12 – Des représentants du gouvernement mexicain et les familles des étudiants disparus signent un accord pour quun groupe dexperts désignés par la Commission interaméricaine des droits de lhomme apportent son concours dans le cadre des investigations.

18 – Ariel Dulitzky, président du groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ou involontaires, déclare : « Il ny a ni capacité danalyse ni éléments de preuve utiles, ce qui démontre labsence de volonté de lÉtat dans cette affaire, ou si volonté il y a, dénote une incapacité à enquêter sur les disparitions forcées et à juger et sanctionner leurs responsables. »

24 – Des proches dautres personnes ayant disparu à Iguala lors dévénements antérieurs trouvent huit charniers dans cette zone.

Les experts légistes argentins indiquent que trois des 30 corps trouvés dans des charniers à Pueblo Viejo, dans la municipalité dIguala, nappartiennent pas aux étudiants.

27 – Le président Peña Nieto annonce un programme en 10 points pour la réforme de la police et de la justice. Il propose la création de 32 forces de police à léchelon des États et supprime plus de 1 800 équipes de police municipales qui, dit-il, pourraient avoir été infiltrées par le crime organisé.

Décembre

6 – LÉquipe argentine danthropologie médicolégale confirme quun fragment osseux trouvé dans un charnier appartient à Alexander Mora Venancio, 19 ans, un des étudiants.

7 – Jesús Murillo Karam confirme lidentification dAlexander Mora. Il indique que José Luis Abarca, lancien maire dIguala, et son épouse font lobjet dune enquête pour disparitions forcées.

Les experts légistes argentins affirment quil ny a pas suffisamment déléments de preuve permettant détayer la théorie selon laquelle des restes retrouvés dans la rivière à Cocula avaient été incinérés à la décharge locale.

Janvier 2015

14 – Le maire dIguala est accusé dêtre le commanditaire des disparitions forcées des 43 étudiants. Tomas Zerón, responsable de lenquête menée par le bureau du procureur de la République, déclare que lenquête est close.

27 – Jesús Murillo Karam affirme que tous les étudiants ont été tués et incinérés dans une décharge à Cocula.

Février

1er – Plusieurs policiers et membres de bandes criminelles placés en détention disent quon les a torturés afin de leur faire avouer avoir joué un rôle dans la disparition des étudiants.

7 – Les experts légistes argentins contestent la version officielle car ses conclusions étaient prématurées et sappuyaient sur une interprétation biaisée des éléments disponibles. Les experts expliquent que sil nexiste pas déléments médicolégaux liant les étudiants disparus aux restes humains retrouvés à la décharge de Cocula, quelques éléments indiquent en revanche clairement quau moins certains de ces restes appartiennent à des victimes nayant pas de rapport avec cette affaire.

27 – Jesús Murillo Karam, procureur général de la République, est remplacé par Arely Gómez, une sénatrice du parti au pouvoir, le Parti révolutionnaire institutionnel.

Avril

8 – Deux conducteurs de bus livrent leur témoignage pour la première fois, à la suite dune recommandation émise par les experts indépendants désignés par la Commission interaméricaine, qui effectuent une évaluation de lenquête.

15 – Le groupe dexperts mandatés par la Commission interaméricaine des droits de lhomme informe le bureau de la procureure générale de la République de lexistence dun cinquième bus nayant jusquà ce moment-là pas été pris en compte dans lenquête.

Juillet

29-30 – Des vêtements retrouvés sur la scène du crime sont enfin analysés, sur la recommandation des experts indépendants évaluant la conduite de lenquête.

Septembre

6 – Un nouveau rapport rédigé par le groupe dexperts nommés par la Commission interaméricaine des droits de lhomme sur lenquête relative à la disparition des étudiants réfute la thèse selon laquelle leurs corps auraient pu être incinérés dans une décharge, ainsi que laffirment les autorités ; et met en évidence de graves lacunes dans lenquête, notamment des erreurs flagrantes dans la gestion de certains éléments de preuve.

Le président Peña Nieto affirme que lenquête est toujours ouverte.

16 – Les autorités informent les médias quil est possible que certains restes aient été identifiés comme appartenant à Jhosivani Guerrero de la Cruz.

17 – Les experts de lÉquipe argentine danthropologie médicolégale précisent que la coïncidence génétique révélée par les tests ADN était trop ténue pour être interprétée comme une identification positive de Jhosivani Guerrero de la Cruz.