Iran. Des Kurdes manifestent, la police doit faire preuve de retenue

Les forces de sécurité iraniennes ne doivent pas utiliser une force excessive et inutile lorsqu’elles assurent le maintien de l’ordre lors des manifestations, a déclaré Amnesty International. La police en tenue antiémeute a en effet dispersé une manifestation dans la ville à majorité kurde de Mahabad, dans la province de l’ouest de l’Azerbaïdjan, le 7 mai.

Des représentants de l’État ont confirmé vendredi 8 mai qu’au moins 25 personnes, dont sept policiers, ont été blessés dans les affrontements qui ont éclaté dans la soirée du 7 mai.

On craint une nouvelle répression policière, des informations ayant fait état d’arrestations et des appels à manifester ayant été lancés.

« Après les violences de la nuit dernière, les tensions sont vives à Mahabad et dans d’autres villes à majorité kurde. Les responsables de l’application des lois ont le droit de se défendre et le devoir de protéger la population, mais ils doivent le faire en respectant les normes internationales régissant le recours à la force lors des prochaines manifestations, a déclaré Said Boumedouha, directeur adjoint du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.

Après les violences de la nuit dernière, les tensions sont vives à Mahabad et dans d’autres villes à majorité kurde. Les responsables de l’application des lois ont le droit de se défendre et le devoir de protéger la population, mais ils doivent le faire en respectant les normes internationales régissant le recours à la force lors des prochaines manifestations.

Said Boumedouha, directeur adjoint du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International

« Une réponse brutale de la police pour réprimer des actes de violence commis par une minorité, tandis que la majorité des manifestants sont non violents, ne ferait qu’aviver les tensions dans une situation déjà explosive. Les autorités doivent respecter le droit de manifester et de se rassembler pacifiquement, et privilégier les moyens non violents lorsqu’elles sont face à des personnes qui commettent des infractions prévues par la loi. »

Un vaste groupe de manifestants s’est rassemblé devant le Tara Hotel, à Mahabad, dans la soirée du 7 mai, pour exprimer leur colère : quelques jours plus tôt, une femme kurde âgée de 25 ans, Farinaz Khosravani, est morte en tombant du quatrième étage de l’hôtel.

Les circonstances de sa mort restent inexpliquées, mais l’inquiétude s’est emparée de certains habitants de Mahabad, selon lesquels un membre des services de sécurité et de renseignements iraniens avait menacé de la violer, ce qui avait conduit à sa chute. Un fonctionnaire provincial a publiquement nié cette accusation.

À un certain moment dans la soirée, la manifestation qui se tenait devant l’hôtel a dégénéré. Sur des vidéos postées sur les réseaux sociaux, on peut voir des manifestants jeter des pierres et piller l’hôtel, tandis qu’une partie du bâtiment est la proie des flammes.

Selon des militants kurdes des droits humains qui se trouvent hors d’Iran, ces violences ont éclaté lorsque la police antiémeutes a commencé à utiliser des matraques, des gaz lacrymogènes et probablement des balles réelles pour disperser la foule, faisant plusieurs blessés. D’après ces militants, des agents du ministère du Renseignement ont interpellé au moins 20 personnes, et certains manifestants blessés ont préféré ne pas se rendre à l’hôpital, de peur d’être arrêtés.

Amnesty International n’est pas encore en mesure de confirmer le nombre précis d’arrestations et de victimes.

« Nous dénonçons depuis longtemps le recours excessif à la force des forces de sécurité iraniennes pour disperser les manifestations, en violation directe du droit international, a déclaré Said Boumedouha.

« Au lieu de recourir à une force excessive et à des mesures d’intimidation, les autorités doivent ouvrir rapidement une enquête indépendante et impartiale sur les circonstances qui ont conduit à la mort de la jeune femme à Mahabad, ainsi que sur les allégations concernant un recours excessif à la force lors des manifestations déclenchées par sa mort. »

Conformément au droit international et aux normes internationales relatives aux droits humains, la police peut recourir à la force seulement lorsque cela est strictement nécessaire et son action doit être proportionnelle à l’objectif légitime à atteindre. Les responsables de l’application des lois ne doivent recourir aux armes à feu qu’en dernier recours, en cas de légitime défense ou pour défendre des tiers contre une menace imminente de mort ou de blessure grave. Ils ne doivent recourir intentionnellement à l’usage meurtrier d’armes à feu que si cela est absolument inévitable pour protéger des vies humaines.