Centrafrique. La force de maintien de la paix de l’ONU doit être déployée dans sa totalité pour protéger les civils

La nouvelle mission de maintien de la paix des Nations unies en République centrafricaine doit être déployée de toute urgence dans son intégralité pour être en mesure d’assurer la protection d’une population civile exposée à de graves atteintes aux droits humains, a déclaré Amnesty International lundi 15 septembre 2014, date où la mission commencera à exécuter son mandat. La mission de maintien de la paix de l’ONU prend en effet le relais de celle de l’Union africaine (UA) et Amnesty International craint que le déploiement initial (65 % seulement de son effectif total) ne lui permette pas d’accomplir son mandat étendu, qui inclut la protection des civils et la stabilisation et la sécurisation du pays. « La passation de l’UA à l’ONU ne doit pas se limiter à un changement d’uniforme : l’échange des bérets verts contre les casques bleus. Elle doit au contraire signifier un nouveau départ pour l’opération de maintien de la paix en République centrafricaine, a déclaré Steve Cockburn, directeur régional adjoint pour l’Afrique de l’Ouest et centrale à Amnesty International. « Si nous saluons la nouvelle mission pour la paix, nous craignons qu’elle ne soit pas en mesure de protéger efficacement les civils contre les violences tant qu’elle ne sera pas totalement déployée. » La Mission intégrée multidimensionnelle de stabilisation des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA), qui prend le relais de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (MISCA ) dirigée par l’UA, est chargée de protéger les civils contre les violences, et plus particulièrement de protéger les femmes et les enfants touchés par le conflit armé. Afin de remplir cette mission, la MINUSCA doit montrer à la population centrafricaine que sa présence peut fait une réelle différence sur le terrain. Le déploiement initial de la MINUSCA se compose de quelque 7 600 casques bleus. Amnesty International demande à l’ONU de l’amener à sa capacité totale de 12 000 soldats et policiers le plus tôt possible, et de déployer rapidement son personnel essentiel, notamment les observateurs chargés de veiller au respect des droits humains. « Il faut combler sans attendre l’écart entre le nombre de casques bleus promis et déployé. Ce n’est que lorsqu’ils seront tous présents sur le terrain, effectuant des patouilles et protégeant la population civile, que la MINUSCA pourra remplir son mandat », a déclaré Stephen Cockburn. Amnesty International a recensé toute une liste de graves violations des droits humains, notamment des homicides illégaux, imputables à des troupes de la MISCA. L’organisation demande à l’ONU de veiller à ce que les membres des forces de maintien de la paix soupçonnés d’avoir bafoué les droits humains en République centrafricaine lorsqu’ils servaient au sein de la MISCA n’intègrent pas la MINUSCA. Ils doivent faire l’objet d’enquêtes et, en cas de preuves suffisantes, être amenés à rendre des comptes. « Il faut enquêter sur tous les incidents impliquant des troupes de l’UA et améliorer le système d’évaluation lacunaire afin de garantir que la mission de l’ONU n’intègre pas des agents du maintien de la paix soupçonnés d’avoir bafoué les droits humains », a déclaré Stephen Cockburn. À la suite d’un épisode survenu à Bangui le 29 mars 2014 dans lequel des soldats de la paix tchadiens ont ouvert le feu sur des civils, faisant une trentaine de morts et des centaines de blessés, le Tchad a unilatéralement retiré ses troupes de la MISCA le mois suivant. Le 24 mars, le contingent de la République du Congo (Brazzaville) de la MISCA a été impliqué dans la disparition forcée d’au moins 11 personnes. À la connaissance d’Amnesty International, aucun membre de la MISCA n’a été poursuivi en justice pour des violations des droits humains. « Il importe de mettre en place une procédure de sélection afin que les soldats et les policiers soupçonnés d’avoir commis de graves violations des droits humains n’intègrent pas la MINUSCA, a déclaré Stephen Cockburn. « L’ONU doit veiller à ce que sa politique d’évaluation du respect des droits humains par son personnel s’applique à tous moments et à ce que les soldats, les policiers et le personnel civil n’aient commis aucune atteinte aux droits humains dans leur pays et à l’étranger. »