Fidji. Frank Bainimarama doit mettre fin au climat de peur

Depuis l’entrée en fonction, en 2006, de l’actuel Premier ministre de Fidji, Frank Bainimarama, des atteintes aux droits humains graves et récurrentes alimentent un climat de peur qui doit prendre fin, écrit Amnesty International dans une synthèse publiée à l’approche de la visite du dirigeant en Nouvelle-Zélande cette semaine. Alors que Fidji se prépare à tenir, en septembre, les premières élections législatives depuis le coup d’État militaire de Frank Bainimarama en 2006, la synthèse d’Amnesty International, intitulée Fiji: Play Fair, A human rights agenda, dénonce la répression permanente de la liberté d’expression, les violations des droits des travailleurs et le recours à la torture par les forces de sécurité, des faits auxquels le gouvernement doit remédier sans délai. « Des lois draconiennes, des actes répétés d’intimidation et de harcèlement vis-à-vis des critiques du gouvernement, ainsi que des allégations de torture par les forces de sécurité sont autant de facteurs qui contribuent à un climat de peur à Fidji », a déclaré Rupert Abbott, directeur adjoint du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. Bien que le Premier ministre se soit engagé à créer « l’égalité des chances pour tous les Fidjiens », les défenseurs des droits humains, les journalistes et les dirigeants syndicaux continuent d’être confrontés à des actes de harcèlement et d’intimidation en raison de l’exercice pacifique et légitime de leurs activités. La synthèse d’Amnesty International présente le cas de Kris Prasad, un militant pacifique qui défend les droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres ou intersexuées (LGBTI). Il fait partie d’un groupe de 12 personnes arrêtées en septembre 2013 pour avoir manifesté pacifiquement contre la nouvelle Constitution, entrée en vigueur ce mois-là. À la fin d’avril 2014, la police a de nouveau contacté Kris Prasad et d’autres militants pour les informer qu’elle souhaitait rouvrir l’enquête et mener des interrogatoires supplémentaires – des méthodes que Kris Prasad qualifie de « tactiques d’intimidation ». « Les restrictions imposées aux libertés d’expression, de réunion et d’association à Fidji doivent être levées, et les actes d’intimidation et de harcèlement dirigés contre les détracteurs du gouvernement et les militants pacifiques doivent prendre fin », a affirmé Rupert Abbott. Le gouvernement continue de violer les droits des travailleurs en interdisant les grèves dans de nombreux secteurs et en intimidant et en harcelant les représentants syndicaux. Un autre cas présenté dans la synthèse révèle que les dirigeants syndicaux Felix Anthony et Daniel Urai ont été arrêtés et inculpés de multiples infractions pénales au cours des deux dernières années pour avoir milité pacifiquement en faveur des droits des travailleurs. Ils ont notamment été inculpés de sédition, un chef d’accusation grave. Le climat de peur est renforcé par les allégations répétées selon lesquelles les forces de sécurité fidjiennes auraient recours à la torture et à d’autres mauvais traitements contre les personnes en détention. Les responsables de ces violations et d’autres atteintes aux droits humains bénéficient de l’impunité grâce aux nombreuses mesures d’amnistie que prévoit la nouvelle Constitution. Dans une vidéo diffusée sur Internet en mars 2013, on peut voir les forces de sécurité attaquer un détenu qui avait été repris. Sur ces images choquantes, Iowene Bendito est frappé à de nombreuses reprises avec des bâtons et des matraques, pendant qu’un autre homme est traîné au sol par un chien. Lorsque cette vidéo est devenue publique, Frank Bainimarama aurait déclaré qu’il « soutenait ses hommes ». « La torture et les mauvais traitements auxquels se livrent les forces de sécurité doivent prendre fin et les responsables de ces agissements doivent être traduits en justice », a déclaré Rupert Abbott. « Il n’est pas acceptable de tenir un discours approprié à l’étranger tout en poursuivant la répression au niveau national. Le Premier ministre Frank Bainimarama et son gouvernement doivent prendre des mesures dès aujourd’hui pour mettre un terme à ce climat de peur. » Complément d’information Amnesty International appelle tous les partis politiques et les candidats aux prochaines élections fidjiennes, prévues pour le 17 septembre 2014, à respecter et protéger les droits humains s’ils venaient à former le prochain gouvernement. La synthèse Fiji: Play Fair, A human rights agenda comprend une série de recommandations visant à améliorer le respect des droits humains dans un certain nombre de domaines, d’un point de vue juridique, politique et pratique.