Indonésie. Le nouveau président doit tenir ses promesses en matière de droits humains

Le nouveau président indonésien, Joko Widodo, doit tenir les promesses faites durant sa campagne concernant l’amélioration de la situation des droits humains dans son pays, a déclaré Amnesty International. Joko Widodo, dont la victoire à l’élection présidentielle du 9 juillet a été confirmée mardi 22 juillet, s’est engagé à défendre les droits humains quand il serait au pouvoir – notamment en se préoccupant des violations graves commises par le passé, en protégeant la liberté de religion, en réformant la police et en autorisant des observateurs internationaux à se rendre en Papouasie. « Il est encourageant que le président Widodo ait parlé de son engagement en faveur des droits humains durant la campagne électorale – maintenant, il doit traduire ses paroles en actes », a déclaré Richard Bennett, directeur du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. « Le nouveau gouvernement se voit offrir la possibilité de tourner la page et d’inaugurer une ère de respect véritable des droits humains en Indonésie. La victoire de Joko Widodo aura ranimé l’espoir de nombre de victimes et de militants des droits humains courageux qui luttent contre l’impunité depuis des années – ces espoirs ne doivent pas être déçus. »« En guise de première étape, nous exhortons le nouveau gouvernement à mener un examen exhaustif du bilan de l’Indonésie en matière de droits humains au cours de la décennie écoulée et à élaborer un plan d’action clair. Il est par ailleurs essentiel que cela se fasse en collaboration avec la société civile et d’autres acteurs clés. »Recommandations En avril 2014, Amnesty International a publié un programme en matière de droits humains à l’intention du nouveau président indonésien, mettant en avant huit questions pressantes que le nouveau gouvernement doit inscrire au premier rang des priorités. Celles-ci incluent : La lutte contre l’impunité pour les crimes du passé Le président doit donner au parquet général l’instruction de mener à bien des enquêtes sur les crimes de droit international qui lui ont été signalés par la Commission nationale des droits humains et d’autres organes, et de traduire les auteurs présumés en justice. Par ailleurs, une Commission vérité devrait être établie conformément au droit international et aux normes internationales, et être habilitée à recommander des mesures de réparation pour remédier aux souffrances des victimes. Le respect envers la liberté de religion et la tolérance religieuse Le respect de la liberté de religion et la tolérance religieuse se sont clairement dégradés ces dernières années. Le nouveau gouvernement doit abroger l’ensemble des lois et règlements introduisant une discrimination à l’égard des minorités religieuses qui ont été utilisés pour justifier le harcèlement et les attaques dont ces communautés ont été victimes. Les violations des droits humains imputées à la policeAmnesty International a recueilli des informations sur toutes sortes de violations des droits humains commises par la police, notamment des homicides illégaux, des actes de torture et d’autres mauvais traitements, et un recours injustifié et excessif à la force et aux armes à feu. Il est très rare que des enquêtes soient ouvertes sur les violations des droits humains attribuées à la police, et de nombreuses victimes sont privées de justice et de réparations. Il faut que la Commission nationale de la police acquière une indépendance opérationnelle vis-à-vis du gouvernement, des ingérences politiques et de la police elle-même. Son mandat devrait notamment lui permettre de mener de véritables enquêtes et de soumettre directement des affaires au parquet. La libération des prisonniers d’opinion Des dizaines de prisonniers d’opinion, en particulier ceux qui sont originaires de Papouasie et des Moluques, sont incarcérés en raison de leur militantisme politique pacifique en Indonésie, et doivent être immédiatement relâchés. Leur maintien en détention met en lumière l’absence persistante de respect pour la liberté d’expression dans certaines régions de l’Indonésie. Amnesty International demande également au président Widodo de permettre à des observateurs internationaux, notamment à des organisations non gouvernementales et à des journalistes étrangers, de se rendre librement et sans entrave en Papouasie, comme il l’a promis lors de sa visite en Papouasie durant sa campagne. La protection et la promotion des droits humains dans l’ANASE L’Indonésie, dont le PIB est le plus élevé de la région et où se trouve le siège de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), à Djakarta, est en train de rapidement devenir un véritable chef de file en Asie du Sud-Est. Le prochain président du pays doit prendre ce rôle au sérieux et montrer l’exemple à ses voisins, et au monde, en ce qui concerne les droits humains. L’Indonésie a déjà joué un rôle positif en établissant certains organes importants de protection des droits humains dans l’ANASE depuis 2007 – cet engagement doit se poursuivre sous le nouveau gouvernement, en particulier avec le renforcement de la Commission intergouvernementale des droits humains de l’ANASE, de sorte que celle-ci devienne un organe réellement indépendant et solide de défense et de promotion des droits humains dans la région.