Les États-Unis doivent autoriser Bradley Manning à invoquer la défense de l’«intérêt public»

Bradley Manning doit être autorisé à plaider qu’il a agi dans l’intérêt public en fournissant des informations à Wikileaks, a déclaré Amnesty International lundi 3 juin, alors que s’ouvre le procès de ce soldat américain dans l’état du Maryland, aux États-Unis. Bradley Manning fait face à plusieurs accusations liées à l’obtention et à la diffusion à des tiers non autorisés de milliers de documents classifiés ; il est accusé notamment de « collusion avec l’ennemi ». Cette dernière charge est passible de la peine de mort, même si l’accusation a dit qu’elle ne requerrait pas ce châtiment. Bradley Manning encourt toutefois des dizaines d’années d’emprisonnement, voire la perpétuité. « Le tribunal doit permettre à Bradley Manning d’expliquer en détail les motivations l’ayant conduit à transmettre des informations à Wikileaks. Il est troublant qu’il n’ait pas été autorisé à invoquer la défense de “l’intérêt public”, alors qu’il a déclaré avoir exposé des violations des droits humains et du droit humanitaire », a expliqué Anne Fitzgerald, directrice de l’unité Recherche et réaction aux crises d’Amnesty International. « Permettre à cet homme d’expliquer ses motivations seulement au stade de la condamnation pourrait avoir un effet dissuasif sur d’autres personnes pensant agir dans l’intérêt public lorsqu’elles divulguent des informations ou rapportent des anomalies. » « Bradley Manning aurait dû être autorisé à expliquer comment, à son avis, l’intérêt du public à être mis au courant des informations transmises l’emportait sur l’intérêt du gouvernement à garder ces informations confidentielles. » Bradley Manning a déjà plaidé coupable pour 11 des charges, après que la juge présidant le tribunal, la colonel Denise Lind, eut décidé qu’il ne pouvait pas prétendre avoir agi dans l’intérêt public en transmettant des informations à Wikileaks. Au début de son procès, dans une déclaration lue au tribunal, Bradley Manning a déclaré qu’il estimait dénoncer des abus. La juge Lind a statué que les motifs de Bradley Manning ne pouvaient pas être retenus pour décider qu’il avait intentionnellement violé la loi, mais pouvaient seulement constituer des circonstances atténuantes dans la détermination de la peine. Bradley Manning risque un maximum de 20 années d’emprisonnement du fait des 11 chefs d’accusation pour lesquels il a plaidé coupable. Bradley Manning a été arrêté en mai 2010 alors qu’il était stationné avec l’armée américaine en Irak, et a été placé en détention militaire depuis lors. Les informations qu’il a transmises comprennent une vidéo d’une attaque d’hélicoptère Apache à Bagdad, en 2007, où des soldats américains ont tué 12 personnes, dont des civils. Cette vidéo n’avait pas été rendue publique jusqu’à présent. Une enquête interne militaire américaine sur cet événement a conclu que les soldats avaient agi de manière appropriée, mais il n’y a eu aucune enquête indépendante et impartiale sur cette attaque. Amnesty International continuera à suivre cette affaire de près et enverra un observateur à des moments cruciaux du procès, qui devrait se dérouler tout au long des prochains mois.