Un militant chinois engagé dans la lutte contre le sida est maintenu en détention à cause d’un «vide juridique»

Jeudi 2 décembre, Amnesty International a demandé que soit relâché un militant chinois engagé dans la lutte contre le sida, lui-même malade ; il est susceptible d’être maintenu en détention pour une durée indéterminée en raison d’une faille dans la législation. Tian Xi a été arrêté en août pour une infraction mineure en relation avec des dégâts matériels, et un jugement sur cette affaire était attendu il y a plusieurs semaines. Le procès est cependant désormais suspendu, potentiellement pour une durée indéterminée, en raison de l’exploitation d’une faille juridique selon laquelle l’accusé ne peut former aucun recours pour que le procès reprenne et n’est pas clairement habilité à demander de libération sous caution. « Tian Xi n’aurait de toute façon jamais dû être placé en détention. Nous craignons que les autorités ne se servent de toutes les excuses et failles qu’elles peuvent trouver afin de mettre un terme à son action de défense des droits des personnes atteintes du VIH ou du sida », a déclaré Catherine Baber, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. Tian Xi a contracté le VIH et les hépatites B et C à la suite d’une transfusion de sang à l’hôpital alors qu’il était enfant. Il a été placé en détention en août après qu’il eût fait tomber, d’un geste du bras, quelques objets se trouvant sur un bureau, lors d’un face à face avec le directeur de l’hôpital où il a été infecté. Liang Xiaojun, avocate de Tian Xi, a écrit sur son blog que son client est maintenu dans « les limbes, dans l’attente d’un jugement qui ne viendra peut-être jamais ». La possibilité pour Tian Xi d’obtenir des soins médicaux pour sa maladie est restreinte depuis le début de sa détention, et il se maintient grâce à sa propre réserve de médicaments. Son avocate a signalé, après lui avoir rendu visite le 24 novembre, que Tian Xi lui semblait pale et faible, et que malgré l’hiver qui arrive, sa cellule n’est pas chauffée. Lui-même et d’autres détenus ne peuvent manger de la viande et des légumes qu’une fois par mois. Avant son incarcération, Tian Xi a subi un harcèlement persistant de la part de la police, a été surveillé et a plusieurs fois fait l’objet d’arrestations arbitraires alors qu’il essayait d’obtenir que les hôpitaux et le gouvernement indemnisent les personnes infectées par le VIH à la suite de transfusions effectuées dans des hôpitaux publics. Des documents internes datant de mars 2010 montrent que la police chinoise considérait Tian Xi comme une cible, à arrêter en raison de l’action de sensibilisation qu’il menait. « Il est inadmissible qu’en Chine un citoyen ordinaire cherchant simplement à obtenir des réparations justes pour des souffrances découlant d’une erreur médicale commise par un hôpital public soit persécuté de cette manière », a expliqué Catherine Baber. « Un maintien en détention par temps froid, associé à une alimentation insuffisante et un approvisionnement irrégulier en médicaments exposent également la santé de Tian Xi à un danger accru. » Récemment, d’autres militants engagés dans la lutte contre le sida en Chine se sont trouvés confrontés à un harcèlement croissant les empêchant de mener à bien leur action pourtant légitime. En novembre, Loving Source, l’organisation de sensibilisation à la lutte contre le sida fondée par Hu Jia, lauréat du prix Sakharov et prisonnier d’opinion, a été contrainte par le gouvernement à mettre la clé sous la porte pour une question de respect des règles fiscales. Aizhixing, une autre ONG de premier plan luttant contre le sida en Chine, a elle aussi été visée par de nombreuses restrictions administratives et des avertissements émanant de la police, ce qui a nui à son activité. Son directeur, Wan Yanhai, s’est exilé en mai pour échapper à la persécution gouvernementale. Chen Bingzhong, 78 ans, ancien haut fonctionnaire travaillant pour les autorités sanitaires, a publié une lettre ouverte en amont de la Journée mondiale de lutte contre le sida (le 1er décembre), demandant au président chinois Hu Jintao de mettre fin au harcèlement subi par les militants engagés dans la lutte contre le sida, et a également engagé deux ministres ayant précédemment dirigé la province du Henan de présenter des excuses pour la propagation du VIH/sida par le biais d’hôpitaux ruraux, survenue à cause de dons de sang rémunérés. La lettre a été rendue publique sur le site d’Aizhixing.