L’Iran doit cesser de harceler un défenseur des droits humains qui risque sept ans de prison

Amnesty International a exhorté les autorités iraniennes à ne pas emprisonner un éminent défenseur des droits humains et journaliste condamné à sept ans de prison au total, dont six pour avoir enregistré un entretien avec un dignitaire religieux réformiste. Emadeddin Baghi, président de l’Association pour la défense des droits des prisonniers (aujourd’hui interdite), qui avait été libéré sous caution en juin après six mois de détention, a été informé mercredi 22 septembre de sa condamnation pour « propagande contre le régime » et « rassemblement et collusion dans l’intention de porter atteinte à la sécurité nationale » alors qu’il assistait à une audience concernant une autre affaire. Ces chefs d’accusation ont été retenus contre lui en raison d’un entretien télévisé avec le grand ayatollah Montazeri réalisé en 2008 et diffusé en décembre 2009 sur la chaîne de télévision en persan de la BBC, peu après la mort de ce dignitaire religieux. Cependant, lorsqu’Emadeddin Baghi a été interrogé après son arrestation en décembre 2009, on lui a posé des questions sur son opinion quant à la peine de mort, ses liens avec des organisations de défense des droits humains, dont Amnesty International, et son travail pour son ONG. L’entretien avec le grand ayatollah Montazeri n’a guère été mentionné, ce qui laissait penser qu’il avait réellement été arrêté en raison de ses activités de défense des droits humains. Emadeddin Baghi avait déjà été condamné en juillet 2010 à une peine d’un an d’emprisonnement assortie de l’interdiction de mener toute activité ayant trait aux médias ou aux ONG pendant cinq ans, pour avoir créé l’Association pour la défense des droits des prisonniers en 2003. Ce défenseur des droits humains qui a été primé pour son action reste libre mais risque d’être emprisonné s’il est débouté de ses recours contre ses condamnations. « Voici un nouvel exemple montrant que les autorités iraniennes persécutent Emadeddin Baghi, un militant qui a été emprisonné à plusieurs reprises en raison de son travail, a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. « Sa situation est caractéristique de la répression permanente de l’État contre les militants en Iran, où ceux qui dénoncent les atteintes aux droits humains sont exposés à des manœuvres d’intimidation, une arrestation ou même pire. » Si cet homme était amené à purger les peines prononcées contre lui, Amnesty International le considérerait alors comme un prisonnier d’opinion. Emadeddin Baghi, qui a obtenu le prix Martin Ennals pour les défenseurs des droits de l’homme en 2009, est systématiquement pris pour cible par les autorités. Plusieurs autres affaires le concernant sont en cours. Cet homme de 49 ans souffre de graves affections cardiaques et rénales dues à des conditions de détention déplorables ou exacerbées par celles-ci ; des soins médicaux dont il avait besoin ont notamment été retardés lors de ses séjours en prison. Dans le cadre des dernières poursuites engagées contre lui, il a été arrêté le lendemain des manifestations de masse contre le gouvernement qui ont eu lieu à Téhéran et dans d’autres villes en décembre 2009, pendant la fête chiite de l’Achoura. D’après son site Internet, au cours des 30 dernières années, il a été convoqué au tribunal ou pour des interrogatoires plus de 85 fois, condamné une fois à une amende, empêché de publier 13 ouvrages, s’est vu interdire tout engagement dans la vie publique pendant cinq ans, a été condamné à 18 ans et demi d’emprisonnement au total et a déjà passé quatre ans et demi en prison. « Bien qu’il soit libre actuellement, la vie d’Emadeddin Baghi est devenue une prison vivante dans un monde kafkaïen où ceux qui font campagne en faveur de la justice pour les autres sont assurés de n’obtenir que l’injustice pour eux-mêmes », a ajouté Hassiba Hadj Sahraoui. Les militants des droits humains sont sans arrêt pris pour cible par les autorités iraniennes en raison de leur action. Parmi d’autres cas récents de ce type figurent les suivants : Le 22 septembre 2010, Noushin Ahmadi Khorasani, célèbre défenseure des droits des femmes, a été formellement inculpée de « propagande contre le régime » pour avoir écrit pour un site Internet féministe et participé à des manifestations à la suite des élections présidentielles controversées de 2009. Elle demeure libre pour le moment. Le 18 septembre 2010, la 26e chambre du tribunal révolutionnaire a condamné Saeed Haeri et Shiva Nazar Ahari à des peines de prison pour plusieurs chefs d’accusation, dont ceux de « troubles à l’ordre public » et d’« inimitié à l’égard de Dieu ». Saeed Haeri a en outre été condamné à une peine de flagellation. Actuellement en liberté, tous deux sont membres du Comité des reporters des droits humains, une organisation fondée en 2006 qui fait campagne contre les atteintes aux droits humains. L’avocate Nasrin Sotoudeh, spécialisée dans la défense des droits humains, a été arrêtée le 4 septembre 2010 et est actuellement détenue à l’isolement à la prison d’Evin, à Téhéran. À la connaissance d’Amnesty International, elle n’a pas été formellement inculpée, mais sa convocation au tribunal indiquait notamment qu’elle était soupçonnée de « propagande contre le régime » et de « rassemblement et collusion dans l’intention de porter atteinte à la sécurité nationale ». Son mari et son avocat ont reçu l’ordre de ne pas parler en public de sa situation. Maryam Bidgoli et Fatemeh Masjedi, qui militent pour les droits des femmes, ont été condamnées à un an de prison le 29 août 2010 pour « propagande contre le régime » et « publication de documents en faveur d’un groupe féministe opposé au régime » parce qu’elles ont recueilli des signatures pour une pétition en faveur de la modification des lois discriminatoires. Elles avaient été arrêtées et détenues pendant près de deux semaines en mai 2009. Toutes deux sont membres de la campagne Un million de signatures (également connue sous le nom de Campagne pour l’égalité), qui vise à mettre fin à la discrimination envers les femmes dans le droit iranien.