L’Ouganda renvoie de force 1700 demandeurs d’asile rwandais

Amnesty International a condamné le retour forcé de quelque 1 700 demandeurs d’asile rwandais, qui étaient installés dans deux camps de réfugiés en Ouganda, lors d’une opération conjointe entre les gouvernements de ce pays et du Rwanda cette semaine. Mercredi 14 juillet, au cours de deux grandes opérations menées dans les camps de réfugiés de Nakivale et de Kyaka II (sud-ouest de l’Ouganda), des policiers armés ont arrêté les demandeurs d’asile et les ont forcés à monter à bord de camions qui attendaient. Quand certains demandeurs d’asile ont tenté de s’échapper, des policiers ont tiré en l’air. Dans la panique et la précipitation qui s’en sont suivies, des personnes auraient été blessées et les enfants ont été séparés de leurs parents. Les demandeurs d’asile ont été conduits au Rwanda et placés dans le centre de transit de Rukomo (province de Byumba). « Tout retour forcé de demandeurs d’asile déboutés doit être effectué dans le respect des obligations incombant à l’Ouganda en vertu du droit international relatif aux réfugiés et aux droits humains, qui comprennent notamment l’accès à une procédure équitable et efficace de demande d’asile, a déclaré Erwin van der Borght, directeur du programme Afrique d’Amnesty International. « Le comportement des autorités et la manière choquante dont ces personnes ont été embarquées suscitent de graves inquiétudes quant au fait que certains demandeurs qui avaient véritablement besoin d’une protection aient été renvoyés. » Selon certaines sources, un certain nombre de réfugiés reconnus comme tels pourraient avoir été placés à bord des camions et renvoyés au Rwanda. Les services du Premier ministre ont néanmoins affirmé que les retours forcés concernaient des demandeurs d’asile déboutés qui avaient épuisé leurs voies de recours. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a indiqué que 25 personnes ne faisant pas partie des demandeurs expulsés avaient été blessées, dont certaines avaient été battues par des policiers. Parmi les blessés figuraient six femmes enceintes, qui ont été prises en charges dans un hôpital local puis libérées. Le HCR a également fait savoir que deux hommes étaient morts au cours de ces opérations, ayant sauté des camions alors qu’ils roulaient vers le Rwanda. Amnesty International doute que la bonne procédure de détermination du statut de réfugié ait été suivie par les autorités ougandaises dans ces cas. Les deux groupes de Rwandais – tous arrivés depuis peu en Ouganda – ont fait l’objet d’une procédure spéciale dans le cadre de laquelle les autorités ont envoyé des unités mobiles de détermination du statut de réfugié pour prendre ces décisions dans les camps, sans respecter les garanties de procédure nécessaires. Malgré les dispositions du droit national en la matière, le HCR n’a pas été informé des procédures de détermination du statut de réfugié appliquées à ces deux groupes. « Le processus décisionnel entaché d’irrégularités pour ces cas laisse craindre que les personnes renvoyées n’aient pas eu réellement accès à une procédure équitable et efficace de demande d’asile », a ajouté Erwin van der Borght. D’après le HCR, depuis le début de l’année 2010, 3 320 Rwandais ont sollicité l’asile en Ouganda. Sur les six derniers mois, 98 % de ces demandes ont été rejetées. Le Comité exécutif du HCR, un organe de 79 États membres qui statue sur des questions ayant trait à la protection internationale et qui comprend l’Ouganda, a souligné « que le retour de personnes dont on estime qu’elles n’ont pas besoin de protection internationale doit s’effectuer de façon humaine et dans le strict respect de la dignité et que la force, si elle est nécessaire, doit être adaptée et appliquée d’une façon qui soit conforme aux droits de l’homme… ».