Amnesty International se réjouit de la libération d’un blogueur et militant bédouin égyptien qui était détenu sans avoir été jugé depuis près de trois ans à la suite de manifestations contre la démolition de plusieurs milliers d’habitations dans la péninsule du Sinaï.Musaad Suliman Hassan Hussein – plus connu sous son nom de plume, Musaad Abu Fagr – a été libéré de la prison d’Abu Zaabal, près du Caire, ce mardi 13 juillet. Il était détenu en vertu de lois d’exception, malgré plusieurs décisions de justice ordonnant sa libération.« La libération de Musaad Abu Fagr est une bonne nouvelle, mais les autorités égyptiennes doivent maintenant libérer tous les autres prisonniers d’opinion, dont beaucoup languissent toujours en détention administrative pour n’avoir fait qu’exercer pacifiquement leur droit à la liberté d’expression », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.Musaad Abu Fagr a été arrêté le 26 décembre 2007 après des manifestations dirigées par Wedna Na’ish (Nous voulons vivre), un mouvement de défense des droits des Bédouins dont il est l’un des fondateurs.Il a été accusé d’avoir « incité d’autres personnes à protester », de « résistance aux autorités » et de « voies de fait contre des fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions ».Lors des manifestations de 2007, plusieurs milliers de manifestants se sont violemment opposés aux forces de sécurité dans le village d’El Masoura, entre les villes de Rafah et d’El Arish, dans le nord du Sinaï, près de la frontière de la bande de Gaza.Ils réclamaient des permis pour construire des maisons, la propriété des terres qu’ils cultivaient et la libération de Bédouins qui étaient détenus sans inculpation ni jugement après des attentats à l’explosif commis à Taba, Charm el-Cheikh et Dahab entre 2004 et 2006.En juillet 2007, un adolescent qui manifestait est mort des suites de blessures par balle et plusieurs dizaines d’autres personnes ont été blessées.Après son arrestation en décembre 2007, Musaad Abu Fagr a été placé en détention à la prison de Borg el Arab, près d’Alexandrie.Le 15 février 2008, à la suite d’un recours formé par ses avocats contre son maintien en détention provisoire dans l’attente de son procès, la cour d’appel d’Ismaïlia a ordonné sa libération.Cependant, utilisant ses pouvoirs en vertu de l’état d’urgence qui est en vigueur en Égypte depuis 1981, le ministère de l’Intérieur a émis une ordonnance administrative pour le maintenir en détention.Ses avocats ont déposé une plainte auprès de la Cour suprêmede sûreté de l’État, instaurée par la législation d’exception, qui a ordonné qu’il soit libéré.Le ministère de l’Intérieur a interjeté appel et, le 12 mai 2008, un autre tribunal a confirmé l’ordonnance de libération. Malgré cela, Musaad Abu Fagr a fait l’objet d’un autre ordre de détention administrative. Au total, les avocats de Musaad Abu Fagr ont obtenu 18 décisions de justice ordonnant sa libération, mais à chaque fois, un nouvel ordre de détention administrative a été délivré à son encontre.« Il est regrettable que les autorités aient choisi de faire fi des nombreuses décisions de justice ordonnant la libération de Musaad Abu Fagr pendant si longtemps », a ajouté Hassiba Hadj Sahraoui.En raison de conditions insalubres, Musaad Abu Fagr a développé un abcès au pied dans la prison de Borg el Arab, où il a été détenu pendant un an.Les autorités pénitentiaires ne lui ont fourni aucun traitement médical, mais un codétenu médecin a pratiqué une intervention sans anesthésie.Musaad Abu Fagr s’est rétabli grâce à sa famille et son avocat, qui lui ont apporté des médicaments pour prévenir l’infection.Musaad Abu Fagr a remercié Amnesty International pour l’action menée en faveur de sa libération. « Le soutien d’Amnesty International est l’un des facteurs qui ont contribué à ma libération, a-t-il déclaré à l’organisation. Vos messages m’ont donné un sentiment de solidarité. »