Certaines propositions menacent l’indépendance de la Cour pénale internationale

Amnesty International a appelé mardi 8 juin 2010 les États parties à rejeter les propositions qui pourraient compromettre gravement l’intégrité du Statut de Rome et politiser en profondeur la Cour pénale internationale (CPI). Ces amendements sont examinés dans le cadre de la première Conférence de révision du Statut de Rome qui s’achève à Kampala le 11 juin 2010. « Les États doivent avant toute chose veiller à ce que cette première Conférence de révision renforce le système de la justice pénale internationale, a déclaré Claudio Cordone, secrétaire général par intérim d’Amnesty International. « Les négociations menées actuellement ne garantissent pas l’indépendance de la Cour, indépendance durement gagnée il y a 12 ans à Rome. » Les délégués semblent s’orienter vers un compromis qui autoriserait le Conseil de sécurité des Nations unies, organe politique, à contrôler la capacité de la Cour à mener des enquêtes et engager des poursuites à l’égard des crimes d’agression. S’il est mis en place, il risquerait d’ébranler l’indépendance de la Cour acquise à Rome et d’ouvrir la voie à la politisation de ses travaux et aux attaques contre sa crédibilité. Les représentants des États à Kampala s’efforcent également de faire en sorte que la Cour ne puisse pas enquêter ni engager des poursuites pour de nouveaux crimes commis par les ressortissants d’États n’ayant pas ratifié le Statut de Rome ou par les ressortissants d’États l’ayant ratifié mais n’ayant pas accepté l’amendement négocié à Kampala. Cet amendement s’appliquerait au crime d’agression et à plusieurs crimes de guerre commis lors des conflits armés non internationaux. « Si la Cour ne peut enquêter ni engager des poursuites à l’égard de nouveaux crimes commis par des ressortissants de pays n’ayant pas ratifié le Statut de Rome, cela débouchera sur une justice à deux vitesses, a expliqué Claudio Cordone. « Les États qui ont compté parmi les plus fervents défenseurs de la Cour promeuvent aujourd’hui des propositions préjudiciables qui nuiraient à l’indépendance de la Cour et à sa capacité à déterminer si un acte d’agression a été perpétré. » La Conférence de Kampala passe aussi à côté de l’occasion de supprimer l’article 124 du Statut de Rome, aux termes duquel un État qui devient partie à ce traité peut déclarer que, durant les sept premières années, il n’accepte pas la compétence de la Cour en ce qui concerne les crimes de guerre commis par ses ressortissants. Cette disposition avait initialement été introduite provisoirement dans le Statut de Rome, à condition qu’elle soit révisée lors de la Conférence de Kampala. « Un petit nombre de délégués s’opposent à la suppression de l’article 124, largement considéré comme un permis de tuer délivré pour sept ans, qui va à l’encontre de l’objectif même du Statut de Rome – mettre fin à l’impunité pour ces crimes, a indiqué Claudio Cordone. « Cet article doit être supprimé ou, tout au moins, la Conférence de révision doit fixer une date dans un futur très proche pour rayer définitivement cette disposition du Statut de Rome. » La Conférence de révision qui se tient à Kampala doit s’achever officiellement le 11 juin.