Zimbabwe : les attaques contre des militants font craindre une nouvelle vague de violence

Amnesty International s’alarme de ce que le Zimbabwe pourrait connaître une nouvelle vague de violence politique à la suite d’une série d’attaques menées ces dernières semaines contre des militants des droits humains par des sympathisants du parti du président Robert Mugabe, la ZANU-PF.Trois observateurs de la situation des droits humains ont été capturés et frappés à coups de rondin de bois par des sympathisants de la ZANU-PF dimanche. Il s’agit de la dernière agression signalée depuis le lancement, le 16 juin, du processus de consultation sur le projet de nouvelle constitution.« Ces actes d’intimidation et de harcèlement visant des militants sapent les initiatives prises par le gouvernement pour élaborer une nouvelle constitution en s’appuyant sur une consultation de la population, et rappellent de manière inquiétante les violences organisées qui ont marqué l’année 2008 », a déclaré Erwin van der Borght, directeur du programme Afrique d’Amnesty International. Le processus d’élaboration d’une nouvelle constitution fait partie de l’accord signé par le président Robert Mugabe et par le dirigeant du MDC, Morgan Tsvangirai, en septembre 2008, après six mois de violences faisant suite à une élection présidentielle contestée. Plus de 300 personnes ont été tuées, 11 000 autres ont été gravement blessées et des dizaines de milliers ont été déplacées par les violences.Le processus de consultation vise à rassembler les avis des uns et des autres au sujet du projet de constitution par le biais d’une série de réunions de proximité avec la population. En raison du long retard provoqué par des désaccords au sein du gouvernement d’union, la consultation a débuté il y a seulement deux semaines. Les militants qui surveillent ce processus de consultation sont pris pour cibles.« Toutes les parties au sein du gouvernement d’union doivent respecter et protéger les droits à la liberté d’expression, d’association et de rassemblement pacifique et veiller à ce que l’ensemble de la population puisse sans entraves avoir accès aux réunions de consultation sur le projet de constitution », a souligné Erwin van der Borght.« Il est impératif que les différentes composantes du gouvernement d’union respectent et protègent ces droits, et que les agents des forces de sécurité accomplissent leur mission de manière non partisane. »Les observateurs Paul Nechishanu, Artwel Katandika et Shingairayi Garira travaillaient pour le Projet indépendant de surveillance de la constitution, mené conjointement par les organisations non gouvernementales Réseau de soutien aux élections au Zimbabwe (ZESN), Projet de paix pour le Zimbabwe (ZPP) et Avocats du Zimbabwe pour les droits humains.Le 27 juin, ils ont été emmenés par des sympathisants de la ZANU-PF dans une ferme du district de Makonde (province du Mashonaland Ouest) et frappés à coups de rondin de bois. Shingairayi Garira a subi des lésions au tympan, et Paul Nechishanu et Artwel Katandika ont été blessés à la tête. Ces passages à tabac ont eu lieu après l’arrestation d’une autre équipe d’observateurs – Godfrey Nyarota, Tapiwa Mavherevhedze et leur chauffeur Cornelius Chengu – à Mutare le 24 juin. Ces hommes ont été inculpés de pratique du journalisme sans accréditation officielle et mis en liberté contre le versement d’une caution de 20 dollars des États-Unis pour chacun. Selon certaines informations la police a agi à l’instigation d’un militant bien connu de la ZANU-PF qui est également un « vétéran ». Toujours à Mutare, Enddy Ziyera, coordonnateur au niveau de la province du projet indépendant de surveillance, a été placé en détention pendant plusieurs heures et relâché sans inculpation le 25 juin, après qu’il eut apporté de la nourriture aux trois militants incarcérés.Le même jour, à Marondera (province du Mashonaland Est), trois militants du Mouvement pour le changement démocratique (MDC-T) ont été appréhendés par des agents des forces de sécurité non identifiés. On a par la suite appris qu’ils étaient détenus au poste de police de Marondera ; ils n’ont toujours pas été inculpés.Le président Robert Mugabe a signé le 15 septembre 2008 un accord de partage du pouvoir avec les dirigeants des deux formations du MDC, en vue de résoudre la crise politique qui avait débuté en 2000.Les violences s’étaient fortement intensifiées au cours des six mois précédant cet accord ; durant cette période des opposants réels ou présumés au président Mugabe ont été victimes de violations des droits humains motivées par des considérations politiques.Au cours des six derniers mois Amnesty International a reçu des informations faisant état de manœuvres d’intimidation visant les habitants de régions rurales : des villageois ont été menacés de subir des violences s’ils ne soutiennent pas la position de la ZANU-PF au sujet de la nouvelle constitution. Le processus de consultation est censé durer 65 jours.