Guinée équatoriale : les Nigérians accusés d’avoir participé à une tentative de coup d’État doivent être rejugés

Amnesty International demande que sept ressortissants nigérians, reconnus coupables par un tribunal équato-guinéen de participation à une tentative de coup d’État, soient rejugés équitablement.Le 5 avril, un tribunal de Malabo, la capitale de la Guinée équatoriale, a condamné ces personnes – six hommes et une femme – à 12 ans d’emprisonnement chacun pour tentative d’assassinat sur la personne du président Teodoro Obiang Nguema Mbasogo lors d’une attaque qui aurait été lancée contre le palais présidentiel l’année dernière.Selon les informations recueillies par Amnesty International, les Nigérians accusés ont plaidé « non coupable » ; ils ont affirmé être des pêcheurs et des commerçantes qui avaient dérivé jusqu’aux eaux équato-guinéennes, où ils ont été arrêtés par la marine. Une Nigériane également appréhendée en mer est décédée en garde à vue.« Les autorités équato-guinéennes doivent prendre des mesures afin de garantir que ces personnes soient jugées équitablement, a indiqué Tawanda Hondora, directeur adjoint du programme Afrique d’Amnesty International.« Elles n’ont pas pu bénéficier d’une représentation juridique appropriée et leurs allégations faisant état d’actes de torture en garde à vue n’ont fait l’objet d’aucune enquête, tout comme le décès d’une Nigériane survenu dans les mêmes circonstances. »Par ailleurs, Amnesty International demande la libération de deux membres du parti d’opposition équato-guinéen Union populaire (UP) qui sont toujours incarcérés six semaines après avoir été acquittés de toutes les charges liées à l’attaque en question.Selon certains médias, des hommes armés sont arrivés sur des hors-bords et ont lancé une attaque contre le palais présidentiel, à Malabo, le 17 février 2009 à l’aube.Le gouvernement a imputé cette attaque à Mend, un mouvement de rébellion basé au Nigeria, dans le delta du Niger, une région riche en pétrole.Le jour de l’attaque, la marine équato-guinéenne a arrêté dans ses eaux territoriales les hommes et femmes originaires du Nigeria à bord de leur embarcation.Ceux-ci ont affirmé être des pêcheurs et des commerçantes perdus en mer car leur cayuco (pirogue) avait dérivé dans le brouillard.Aucune arme n’a été trouvée à bord de l’embarcation. Après leur arrestation, ces personnes et deux membres de l’UP ont été détenus au secret et sans inculpation jusqu’à la mi-octobre 2009 à la prison de Black Beach, à Malabo. Ils auraient tous été torturés en vue de leur extorquer des « aveux ».Les sept Nigérians concernés (Marck Etim Marck, Eyoh Okon Ikara, Eyon Kun Jhon, Effiong Matew, Okokon Iyanam, également appelé Mintay, Isangadighi et Ekaette Eyo Okon, une femme) ont été jugés entre le 17 et le 22 mars 2010 par la cour d’appel de Malabo.Ils n’ont pu consulter un avocat que quelques jours avant le début du procès et ont été, par conséquent, privés du droit de présenter une défense efficace.Aucune arme et aucun autre élément de preuve n’ont été présentés au tribunal pour étayer les charges retenues contre les ressortissants nigérians.Malgré cela, le tribunal a ignoré les déclarations selon lesquelles il s’agissait de pêcheurs et de commerçantes, et a reconnu ces personnes coupables sur la base des rapports météorologiques des 16 et 17 février 2009.D’après ces documents, le temps était clément et la visibilité bonne. Le tribunal a donc estimé que ces personnes ne pouvaient pas s’être perdues et avoir dérivé jusqu’aux eaux équato-guinéennes à cause du brouillard.Au cours de l’audience, les accusés et leurs avocats ont évoqué les actes de torture et le décès d’une Nigériane en garde à vue, mais le président du tribunal ne leur a pas permis de poursuivre et aurait affirmé que leurs allégations étaient hors de propos.Les autorités n’ont pas donné aux ressortissants nigérians la possibilité d’interjeter appel de la déclaration de culpabilité et de la peine.« Les autorités doivent permettre aux détenus de consulter leurs avocats, d’entrer en contact avec le personnel consulaire et de recevoir tous les soins médicaux dont ils pourraient avoir besoin », a ajouté Tawanda Hondora.Les trois membres de l’UP, Santiago Asumu, Marcelino Nguema Esono et Faustino Ondó Ebang, ancien dirigeant de ce parti, ont été inculpés de tentative d’assassinat sur la personne du président.Faustino Ondó Ebang, ancien prisonnier d’opinion, a été jugé par contumace. Il est actuellement exilé en Espagne.Le 5 avril, ces trois hommes ont été acquittés de toutes les charges pesant contre eux.Par ailleurs, les poursuites engagées à l’encontre de huit autres membres de l’UP ont été abandonnées au début du procès.Amnesty International est inquiète car six semaines après leur acquittement, et malgré la requête écrite demandant officiellement leur libération que leur avocat a présentée au président de la cour d’appel, Santiago Asumu et Marcelino Nguema Esono sont toujours incarcérés.