Le nouveau Parlement du Sri Lanka doit abroger les lois relatives à l’état d’urgence

Le premier Parlement post-conflit du Sri Lanka doit en finir avec les dispositions d’urgence draconiennes qui permettent depuis des décennies que des atteintes aux droits humains généralisées soient perpétrées, a déclaré Amnesty International mardi 20 avril 2010. À la veille de la première session parlementaire post-conflit prévue le 22 avril, Amnesty International demande au Sri Lanka de lever l’état d’urgence en vigueur de manière quasi ininterrompue depuis 1971 et d’abolir la Loi relative à la prévention du terrorisme (PTA) et toutes les autres lois et dispositions d’urgence qui lui sont associées, afin d’y substituer des lois respectueuses des droits humains. Les législations d’urgence accordent aux autorités étatiques des pouvoirs étendus en matière de détention et autorisent l’utilisation de prisons secrètes, pratique qui favorise des violations des droits humains telles que les disparitions forcées, les actes de torture et les morts en détention, susceptibles de constituer des crimes relevant du droit international. Au cours des 30 dernières années, des milliers de Sri Lankais ont passé des années en détention sans avoir été jugés. En 2009, le gouvernement a de plus en plus invoqué la législation d’exception en vue de réprimer les journalistes, les opposants politiques et les syndicalistes. « S’il veut aller de l’avant, le Sri Lanka doit abroger ces lois et mettre fin à l’impunité dont jouissent les auteurs d’atteintes aux droits humains, a déclaré Madhu Malhotra, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. La Loi relative à la prévention du terrorisme, l’Ordonnance relative à la sécurité publique et d’autres dispositions d’urgence en vigueur au Sri Lanka permettent aux forces de sécurité de bafouer systématiquement les droits fondamentaux. » Depuis la fin de la guerre avec les Tigres libérateurs de l’Eelam tamoul (LTTE), il y a près d’un an, les législateurs sri lankais continuent d’élargir chaque mois le champ d’application de l’état d’urgence. Les gouvernements successifs ont ignoré les appels en faveur de l’abrogation de la Loi relative à la prévention du terrorisme. « La guerre est terminée. Le maintien de l’état d’urgence sert désormais d’arme contre l’opposition politique et de solution expéditive pour pallier les mauvaises pratiques en matière de maintien de l’ordre et les disfonctionnements du système judiciaire », a indiqué Madhu Malhotra. Amnesty International demande au nouveau Parlement de faire pression en faveur de la libération des personnes détenues en vertu des dispositions d’urgence au Sri Lanka, à moins qu’elles ne soient inculpées d’infractions dûment reconnues par le droit international et jugées devant des tribunaux civils de droit commun dans le respect des normes internationales d’équité. Aux termes des lois relatives à l’état d’urgence, la charge de la preuve est inversée, en cas d’allégations selon lesquelles la police a obtenu des « aveux » sous la torture. L’Ordonnance relative à la sécurité publique, la Loi relative à la prévention du terrorisme et les autres dispositions d’urgence en vigueur protègent également les représentants de l’État contre toute poursuite pour les actes commis au nom de ces lois, à condition qu’ils aient agi « de bonne foi ». En juillet 2006, le président Mahinda Rajapakse a donné des directives aux forces de sécurité visant à protéger les droits humains de toute personne arrêtée ou placée en détention. Bien que le gouvernement ne soit pas tenu en vertu de la réglementation d’urgence de divulguer les lieux de détention, le président a ordonné que toute personne arrêtée se voit « accorder des moyens raisonnables lui permettant de contacter un parent ou un ami afin de l’informer du lieu de sa détention » et que la Commission des droits humains du Sri Lanka soit à chaque fois informée de l’arrestation et du lieu de détention dans les 48 heures et que ses membres puissent rendre visite au prisonnier. Ces garanties n’ont jamais vraiment été mises en œuvre. Au-delà des préoccupations relatives à la nature de la législation et au manque de volonté du gouvernement de rectifier les déficiences, Amnesty International s’inquiète de ce que les forces de sécurité se servent de la menace globale des vastes pouvoirs que leur confèrent les dispositions d’urgence pour intimider la population. Parce qu’elles prévoient des infractions définies de manière vague et nébuleuse telles que le « terrorisme », ces dispositions servent également à restreindre la liberté d’expression et d’association, et à exercer une pression croissante sur les défenseurs des droits humains, les journalistes, les syndicalistes et toute personne exprimant une opinion dissidente.