La Malaisie arrête des migrants, tandis que la vague de répression se poursuit

Selon des informations relayées par les médias, les autorités malaisiennes ont arrêté quelque 140 travailleurs migrants au cours de la semaine écoulée, peu après qu’Amnesty International eut publié un rapport dénonçant les violences policières et l’exploitation de migrants par leurs employeurs. Ces arrestations font partie de mesures de répression annoncées contre les migrants, dont beaucoup viennent du Bangladesh, d’Indonésie et du Népal, et vivent et travaillent en Malaisie sans autorisation, d’après ces mêmes informations. Les médias indiquent que les autorités malaisiennes ont appréhendé des centaines de migrants depuis le début de cette opération de répression, à la fin du mois de février. Les personnes arrêtées risquent de connaître une incarcération prolongée dans les centres de détention surpeuplés destinés aux migrants. Lorsqu’il est établi qu’ils ont enfreint la législation relative à l’immigration, ils sont susceptibles de recevoir des amendes, des peines d’emprisonnement et parfois des bastonnades. « Des travailleurs en règle sont pris dans les rafles visant les migrants tout autant que les travailleurs sans papiers, a indiqué Michael Bochenek, auteur du rapport et directeur des politiques à Amnesty International. Quelle que soit leur situation au regard de la législation sur l’immigration, aucune de ces personnes ne doit faire l’objet d’une arrestation arbitraire ni être détenue dans des conditions déplorables. » Les patrons exigent régulièrement que leurs employés leur remettent leur passeport, ce qui signifie que les migrants qui sont autorisés à travailler en Malaisie n’ont souvent sur eux que des photocopies de leur passeport et de leur permis de travail. Les autorités acceptent rarement comme preuve les photocopies attestant qu’ils sont en règle. Des volontaires dépourvus de formation appartenant au Corps des volontaires du peuple (Ikatan Relawan Rakyat ou RELA) participent souvent aux descentes visant les migrants. Ces volontaires méconnaissent souvent les documents qu’ils examinent, mais jouissent de vastes pouvoirs leur permettant de pénétrer dans des habitations privées sans mandat, d’interroger les suspects et de procéder à des arrestations. Des réfugiés – du Myanmar, notamment –, détenant des cartes délivrées par l’antenne locale du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), font partie de ceux qui ont été appréhendés lors des descentes menées ce mois-ci. La Malaisie ne reconnaît pas le statut de réfugié, mais les autorités s’étaient récemment engagées à ne pas arrêter ni incarcérer ceux qui détenaient une carte du HCR. Le fait que des réfugiés aient été pris dans ces rafles constitue une régression par rapport à cette évolution politique positive, a déclaré Amnesty International. Des policiers et des membres du RELA soumettent les migrants à des actes de harcèlement, d’extorsion et de violence, mais les agents du RELA se rendent coupables des violations les plus flagrantes, indique le rapport d’Amnesty International. De hauts responsables des services d’immigration ont assuré à Amnesty International en juillet 2009 que le RELA n’intervenait plus pour faire respecter la législation relative à l’immigration. Amnesty International a cependant continué à recevoir des informations faisant état d’arrestations et de violations attribuées aux membres du RELA tout au long de l’année 2009 et au début 2010. Le 21 mars, un représentant de l’organisation a vu une quarantaine d’agents du RELA procéder à la vérification des papiers relatifs au statut des migrants en présence, dans la zone du marché central de Kuala Lumpur. Les juges ont le pouvoir de condamner à une bastonnade les migrants reconnus coupables d’être entrés illégalement sur le territoire, et en usent souvent. Le gouvernement malaisien a confirmé que près de 35 000 migrants ont reçu ce châtiment entre 2002 et 2008. Assimilée à une « flagellation » en Malaisie, cette pratique consiste à infliger jusqu’à six coups de rotan, une fine canne en bois. Une bastonnade laisse de profondes marques sur les fesses, qui mettent plusieurs jours à guérir, et il s’agit en outre d’un traitement profondément humiliant. Cette pratique enfreint l’interdiction, au niveau international, de la torture et des autres châtiments cruels, inhumains et dégradants. Amnesty International a cherché à rencontrer des représentants des ministères de l’Intérieur et des Ressources humaines, afin de leur présenter les conclusions de ses recherches et ses recommandations. À ce jour, aucun des ministères n’a répondu favorablement. Après la publication du rapport d’Amnesty International, le ministre de l’Intérieur, Datuk Seri Hishammuddin Hussein, a annoncé dans un entretien accordé à The Star, un journal de Kuala Lumpur, que son ministère sévirait contre ceux qui exploitaient et maltraitaient les travailleurs migrants. Le rapport, intitulé Malaysia: Trapped: The Exploitation of Migrant Workers in Malaysia, met en évidence les violations très fréquemment subies par les travailleurs migrants issus de huit pays d’Asie du Sud et d’Asie du Sud-Est, attirés en Malaisie par la promesse d’un emploi, et faisant finalement l’expérience du travail forcé ou d’autres formes d’exploitation.