Amnesty International demande aux autorités iraniennes de libérer une journaliste et militante des droits des femmes incarcérée en raison de ses activités politiques au lendemain de l’élection présidentielle contestée de 2009. Hengameh Shahidi a commencé à purger sa peine de six ans d’emprisonnement à la prison d’Evin, à Téhéran, le 25 février 2010, après que sa condamnation a été confirmée en appel. Son incarcération est le dernier épisode d’une série d’attaques qui visent actuellement les journalistes et les médias proches de l’opposition. Peu après son arrestation, le Conseil de surveillance de la presse a ordonné le 1er mars 2010 la fermeture du quotidien Etemad, dirigé par Elias Hazrati, partisan du candidat battu à l’élection présidentielle Mehdi Karroubi, et de l’hebdomadaire Iran Dokht, dirigé par l’épouse et le fils de Mehdi Karroubi. L’hebdomadaire de province Sina a également été fermé, au motif qu’il aurait enfreint la Constitution. Hengameh Shahidi a été notamment condamnée à cinq ans d’emprisonnement pour « rassemblement et collusion dans l’intention de porter atteinte à la sécurité nationale intérieure » et à un an pour « propagande contre le régime ». La cour d’appel a annulé une autre condamnation pour « outrage au président », sanctionnée par une peine de 91 jours de prison et une amende. Amnesty International considère Hengameh Shahidi comme une prisonnière d’opinion, détenue uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion. Elle était conseillère sur les questions des droits des femmes auprès du candidat malheureux à l’élection présidentielle Mehdi Karroubi lors de sa campagne et est membre du Parti de la confiance nationale. Arrêtée une première fois le 30 juin 2009, elle a été incarcérée à la prison d’Evin pendant quatre mois avant d’être libérée sous caution le 1er novembre, à la suite d’une grève de la faim observée pour dénoncer son maintien en détention. Hengameh Shahidi affirme qu’elle a été torturée au cours de sa détention et menacée d’exécution à plusieurs reprises. Elle déclare avoir été soumise à un simulacre d’exécution. Les personnes chargées de l’interroger ont également menacé d’arrêter des membres de sa famille. Lors de son procès le 4 novembre 2009, Hengameh Shahidi a été accusée d’avoir participé à des manifestations dénonçant le résultat contesté de l’élection présidentielle entre les 13 et 17 juin, d’avoir accordé une interview aux médias et d’avoir recueilli des signatures pour la campagne Un million de signatures (également appelée Campagne pour l’égalité, qui vise à mettre fin à la discrimination légalisée envers les femmes en Iran). Elle a aussi été accusée de soutenir une campagne s’efforçant de mettre un terme aux exécutions par lapidation en Iran, d’avoir signé de nombreuses déclarations adressées aux organes de défense des droits humains des Nations unies dénonçant les atteintes aux droits humains en Iran et de publier des articles sur son blog. Hengameh Shahidi a été arrêtée une nouvelle fois le 25 février 2010 et conduite à la prison d’Evin, après avoir été convoquée au bureau des investigations du ministère du Renseignement « pour répondre à quelques questions ». Deux jours plus tard, la décision confirmant en appel sa condamnation à une peine d’emprisonnement a été transmise à son avocat, Mohammad Mostafaei. Amnesty International exhorte les autorités iraniennes à veiller à ce que Hengameh Shahidi, durant son incarcération, puisse recevoir des visites de sa famille, consulter son avocat et bénéficier de tous les soins médicaux dont elle a besoin, notamment pour troubles cardiaques. En outre, l’organisation a demandé qu’une enquête approfondie et impartiale soit ouverte sans délai sur les allégations de torture en détention formulées par Hengameh Shahidi, et que tous les responsables présumés soient rapidement traduits en justice dans le cadre d’une procédure équitable. Par ailleurs, elle a préconisé la réouverture des journaux fermés et la levée de toutes les restrictions abusives imposées à la liberté de la presse. Depuis l’élection présidentielle contestée de juin 2009, les autorités ont reconnu que plus de 5 000 personnes avaient été arrêtées, dont plus de 1 000 pendant et après les manifestations massives qui ont eu lieu lors de la fête religieuse de l’Achoura, le 27 décembre. Ces chiffres sont sans doute en deçà de la réalité. Parmi les personnes interpellées figurent des personnalités et des militants politiques, des étudiants, des défenseurs des droits humains et des journalistes. Nombre d’entre eux ont été condamnés à l’issue de procès contraires aux règles d’équité les plus élémentaires à de lourdes peines d’emprisonnement et parfois à des peines de flagellation. Pas moins de 13 prisonniers ont été condamnés à mort, dont deux ont été exécutés et trois ont vu leurs sentences commuées en peines d’emprisonnement. Les autorités iraniennes continuent de réprimer sévèrement la liberté d’expression en Iran : elles arrêtent des journalistes, dont beaucoup seraient toujours derrière les barreaux, restreignent l’utilisation d’Internet, y compris l’accès aux sites de réseaux sociaux, et ferment des journaux.