Témoignage de Marvin Ortiz, journaliste à Radio Globo
Lundi [28 septembre], vers 5 heures du matin, nous avons débuté nos émissions comme d’habitude, en commençant par les nouvelles de Radio Globo qui sont présentées de 5h à 8h par le directeur de notre radio et deux autres journalistes. Vers 5h20, ils ont entendu quelqu’un donner des coups sur la porte et des personnes crier « sortez d’ici ! ». C’était des soldats et des policiers qui venaient confisquer l’équipement radiophonique.
Mes collègues ont entendu que l’on tirait des coups de feu sur le verrou de la porte, comme pour le faire sauter et pénétrer à l’intérieur du bâtiment. C’est à ce moment-là que les journalistes ont sauté du troisième étage du bâtiment de la radio. Ils sont blessés et couverts d’ecchymoses. Par chance, un passant les a vus, leur a donné les premiers secours et les a emmenés en lieu sûr.
Lorsque les soldats et les policiers sont entrés dans la station de radio, sans préavis, ils ont pris tout l’équipement, tout ce dont vous avez besoin pour faire tourner une radio : les ordinateurs, les micros, la console, le standard téléphonique, les amplis et même les antennes. Après avoir complètement détruit la table de rédaction, ils ont tout emporté dans une voiture de patrouille de la police.
Après cela, ils ont occupé le bâtiment. Nous partageons les lieux avec le service public de recensement des particuliers et, lorsque le personnel de cet organisme est arrivé dans les bureaux, la police a voulu les empêcher d’entrer. Les employés ont simplement pu passer à la pointeuse et ont dû rentrer chez eux.
Je suis arrivé à la station de radio vers 7 h. J’étais avec une collègue. Les policiers et les soldats nous ont tout de suite harcelés. Ils nous ont menacés et agressés. Ils nous ont pris en photo et nous ont insultés.
Ils ont confisqué le matériel de plusieurs journalistes qui faisaient un reportage sur la fermeture de la station de radio et ont arrêté plusieurs d’entre eux.
Tout le monde a quitté le bâtiment vers 9 h.
Tout ceci est arrivé à cause d’un décret pris par le gouvernement de facto de Roberto Micheletti, qui suspend les garanties constitutionnelles et restreint la liberté d’expression. Le décret mentionne spécifiquement Radio Globo et Canal 36 [chaîne de télévision], qui a également été fermée.
Depuis le coup d’état, Radio Globo n’a pas renoncé à informer le public sur ce qui se passe dans notre pays. Nous avons condamné le coup d’état. Nous donnons la possibilité aux gens de s’exprimer librement et de faire connaître leurs griefs.
Nous sommes une cinquantaine de personnes environ à travailler dans cette station radiophonique : reporters, présentateurs, techniciens et personnel administratif. Nous sommes soumis à de très fortes pressions et un climat de peur extrême. Nous ne nous sentons jamais en sécurité.
De nombreuses personnes se sont rassemblées devant la station de radio pour protester contre la décision du gouvernement [de facto] de la fermer.
Pour l’instant, Radio Globo n’émet que par le biais d’Internet sur www.radiohonduras.com. Hier [lundi 28 septembre], nous avions environ 400 000 auditeurs. Les gens attendent de savoir ce qui va arriver à la station de radio.
À la suite de l’intervention de plusieurs organisations de défense des droits humains, l’armée et la police ont décidé de mettre fin à l’occupation de la station de radio. Un groupe d’avocats est en train d’étudier la question pour que la radio puisse émettre de nouveau sans aucune restriction.
Aujourd’hui [mardi 29 septembre], nous ne sommes que deux, tous les deux présentateurs. Nous émettons via Internet parce que l’interdiction, le décret, ne nous permet pas d’émettre sur une fréquence radiophonique.
Les journalistes continuent de faire l’objet de menaces, de répression et d’arrestations, mais nous les reporters continuons de travailler. Nous devons aller là où les événements se passent mais cela fait peur parce que nous savons que nous pouvons faire l’objet d’une répression, surtout parce qu’ils savent bien qui nous sommes. Ils savent que nous faisons partie de l’équipe de Radio Globo.
Nous avons un engagement vis à vis de la population, de la profession et de notre famille.
Nous allons malgré tout continuer à faire notre travail : informer.