Les corps de Zarema Sadoulaïeva, défenseure des droits humains, et de son époux, Alik (Oumar) Djabraïlov, ont été retrouvés dans le coffre d’une voiture tôt le matin du 11 août dans la capitale tchétchène, Grozny. Ils avaient tous deux été tués par balle.
Zarema Sadoulaïeva était la présidente de l’organisation caritative russe Sauvons les enfants, qui aide les enfants touchés par la violence en Tchétchénie, en étroite collaboration avec le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF).
Amnesty International a déclaré que ce dernier meurtre en date d’une personne militant en faveur des droits fondamentaux en Tchétchénie témoignait du mépris total actuel pour l’état de droit dans cette république du Caucase du Nord. L’organisation a fermement condamné ces homicides.
« Survenant quatre semaines seulement après le meurtre de l’éminente défenseure tchétchène des droits humains Natalia Estemirova, ces derniers homicides en date sont un rappel brutal du climat d’impunité qui règne en Tchétchénie, a estimé Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.
« La communauté internationale doit prendre conscience que le fait que les autorités russes et tchétchènes s’abstiennent de manière systématique et persistante de mener de véritables enquêtes sur le meurtre de défenseurs des droits fondamentaux ou même sur toute autre atteinte aux droits humains s’étant produite ces dernières années est un signe fort que ces autorités ont au minimum acquiescé à ces crimes. »
« Les promesses de Dimitri Medvedev, le président russe, et de Ramzan Kadyrov, le président tchétchène, selon lesquelles ils trouveront les responsables de ces meurtres valent bien peu au regard de l’échec total des autorités ces dernières années concernant la traduction en justice des responsables présumés des meurtres et enlèvements de défenseurs des droits humains, d’avocats et de journalistes travaillant dans le Caucase du Nord.
« La lumière projetée sur la Tchétchénie du fait de l’attention du public s’amenuise progressivement. Tout d’abord, les organisations internationales et les journalistes ne sont plus autorisés à se rendre dans cette région et désormais, la société civile est éliminée petit à petit. Cela ne peut déboucher que sur l’expansion du non-droit, situation déjà à l’origine de l’instabilité dans le Caucase du Nord depuis de nombreuses années. »
Zarema Sadoulaïeva était une courageuse défenseure des droits humains, qui a connu le harcèlement des autorités en raison de son travail. Il y a quatre ans, elle avait raconté à des délégués d’Amnesty International en mission dans le Caucase du Nord que le siège de son organisation avait été fouillé et son ordinateur confisqué par les autorités. Ce que Zarema Sadoulaïeva a décrit aux délégués d’Amnesty International est toujours d’une actualité brulante.
« Les violations des droits humains perdurent en Tchétchénie sans faiblir – des personnes sont constamment enlevées, soumises à des disparitions forcés, frappées ou tuées. Les autorités font fi des plaintes déposées par leurs proches. Tout cela se produit dans un contexte de blocage total de l’information. Les journalistes et les observateurs indépendants ne sont pas autorisés à se rendre en République de Tchétchénie. »
Le meurtre de Zarema Sadoulaïeva et de son mari doit alerter la communauté internationale quant à la précarité de la situation des défenseurs des droits humains en activité en Russie. Il fait suite aux homicides, plus tôt cette année, de Natalia Estemirova, de Stanislav Markelov, avocat spécialisé dans la défense des droits humains – tous deux amis proches de la journaliste Anna Politkovskaïa, elle-même assassinée en 2006 –, ainsi que de la journaliste Anastassia Babourova.
« Il est crucial dans ces circonstances que les autorités enquêtent de façon approfondie sur ces crimes et ne s’abstiennent pas de mener des investigations sur le rôle qu’ont pu jouer des représentants du gouvernement dans le meurtre de leurs détracteurs, a ajouté Nicola Duckworth.
« La communauté internationale doit agir de façon concrète et commune, et faire pression sur les autorités russes afin de les inciter à mettre fin à cette impunité. »
Amnesty International a demandé qu’un terme soit mis à l’impunité pour le meurtre de militants, de journalistes et d’avocats défenseurs des droits humains en Russie.