Dans l’État d’Imo, au Nigeria, les kidnappeurs encourent la peine de mort

Un nouveau projet de loi adopté par l’Assemblée de l’État d’Imo lundi 11 mai 2009 prévoit l’imposition obligatoire de la peine de mort pour toute personne reconnue coupable d’enlèvement. Les personnes dont les locaux sont utilisés par un ravisseur pour retenir quelqu’un en otage sont elles aussi passibles de la peine capitale.

« Cette loi peut avoir pour effet d’inciter les ravisseurs, persuadés qu’ils n’ont “rien à perdre”, à tuer, ce qui se traduirait par une augmentation des meurtres de victimes, de passants innocents et de policiers s’efforçant d’appréhender les criminels, a déclaré Aster van Kregten, responsable des recherches sur le Nigeria à Amnesty International.

« L’enlèvement est un crime terrible, source d’angoisse tant pour les victimes que pour leurs familles. Toutefois, élargir le champ d’application de la peine capitale à ce crime est une mesure régressive qui, loin d’apporter une protection aux victimes, ne fait que les exposer à de plus grands risques. »

D’après Amnesty International, faire de l’enlèvement un crime passible de la peine de mort va à l’encontre de la tendance nationale et mondiale en faveur de l’abolition de ce châtiment, et risque d’encourager des comportements encore plus violents chez les ravisseurs. L’organisation a exhorté le gouverneur de l’État d’Imo, Ikedi Ohakim, à ne pas promulguer ce projet de loi.

« L’expérience a montré que la menace de la peine de mort n’est pas une réponse efficace à la criminalité violente et qu’elle peut en fait exacerber la violence dans une société », a poursuivi Aster van Kregten.

Le maintien de la peine capitale n’a pas fait baisser le nombre de meurtres ou de vols à main armée au Nigeria. Entre 1970 et 1999, plus de 2 600 condamnés à mort ont été exécutés. Pourtant, le taux de criminalité n’a pas diminué.

Selon des études américaines, la peine de mort n’a pas d’effet dissuasif en ce qui concerne le meurtre. Aux États-Unis, le taux moyen d’homicides est plus élevé dans les États qui recourent à la peine de mort que dans ceux qui n’appliquent pas ce châtiment.

Dans les pays l’ayant aboli, le nombre d’homicides a souvent chuté. Au Canada, 27 ans après la suppression de la peine capitale, le taux d’homicides a baissé de 44 p. cent.

« Pour faire preuve de fermeté face aux crimes violents comme l’enlèvement, il convient de renforcer la capacité de la police à repérer les crimes potentiels avant qu’ils ne se produisent et à les prévenir, a confié Aster van Kregten.

« Le gouvernement fédéral doit mettre l’accent sur la formation et les ressources de la police afin de développer la compétence et l’efficacité des investigations. C’est le meilleur moyen pour commencer à protéger les citoyens nigérians contre la criminalité violente – au lieu de proposer des remèdes aussi épidermiques et surannés que la peine de mort. »

Lors de la 4e session de l’Examen Périodique Universel (EPU) des Nations unies à Genève le 9 février, le ministre nigérian des Affaires étrangères a déclaré : « Le Nigeria continue d’observer un moratoire qu’il s’est lui-même imposé sur l’application de la peine de mort ».

« La récente déclaration du gouvernement nigérian dans le cadre d’un forum de l’ONU quant à son application d’un moratoire sur la peine de mort a été très largement saluée. Aussi sommes-nous fort déçus de voir l’État d’Imo prendre des mesures allant à l’encontre de cette position, a conclu Aster van Kregten.

« Les gouvernements des États nigérians doivent faire feu de tout bois pour faire écho au moratoire volontaire respecté au niveau fédéral, et non tenter de le fragiliser. »