Des militants zimbabwéens, dont Jestina Mukoko, libérés sous caution

Jestina Mukoko et Broderick Takawira, prisonniers d’opinion zimbabwéens, ont été remis en liberté après avoir passé près de trois mois au centre de détention de Chikurubi, une prison à sécurité maximale.

Ils ont tous deux été victimes d’une disparition forcée, d’une arrestation et d’une détention illégales, ainsi que d’actes de torture aux mains d’agents des services de sécurité de l’État. Ils ont été libérés le samedi 1er mars après le paiement d’une caution s’élevant pour chacun à près de 450 euros. Ils ont également dû faire un dépôt de garantie, sous forme de titres de propriété, équivalant à au moins 14 800 euros. Une troisième personne, Fidelis Chiramba, a également été libérée. Cet homme se trouve toujours à l’hôpital, où il reçoit des soins.

Dix autres détenus sont libérables sous caution. Quatre devraient être relâchés sous peu. Les six autres seront maintenus en détention car ils ne sont pas en mesure d’avancer de titres de propriété, une des conditions requises.

Trois autres détenus, Andrison Manyere, Gandhi Mudzingwa et Kisimusi Dhlamini se sont quant à eux vu refuser la liberté sous caution.

Le 3 mars, la Haute Cour de Harare a rejeté la demande formulée par l’État concernant le refus d’accorder la liberté sous caution à Roy Bennett, trésorier général du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), arrêté par la police en février. Le MDC a hâte de voir si les autorités respecteront l’arrêt rendu par la Cour.

« Si nous nous réjouissons du fait que Jestina Mukoko, Broderick Takawira et Fidelis Charamba aient été remis en liberté, et que 11 autres prisonniers politiques puissent bénéficier d’une libération sous caution, nous engageons également le gouvernement zimbabwéen à mettre un terme immédiat à la persécution de défenseurs des droits humains et de militants politiques », a déclaré Véronique Aubert, directrice adjointe du programme Afrique d’Amnesty International.

Plus d’une dizaine de détenus appartenant à ces catégories sont maintenus en détention au Zimbabwe ; il semble qu’ils aient été arrêtés uniquement pour avoir fait l’exercice de leurs droits à la liberté d’expression et d’association.

« Les autorités zimbabwéennes doivent veiller à ce que tous ceux qui sont maintenus en détention ne soient pas soumis à la torture ou à d’autres types de mauvais traitement, et qu’ils soient au contraire traités conformément à ce que prévoient les normes en matière de droits humains régissant le traitement des détenus, a ajouté Véronique Aubert. Les détenus doivent être autorisés à consulter leurs avocats, à entrer en contact avec leurs proches, à recevoir des couvertures et des vêtements chauds, à être nourris correctement et à bénéficier de tous les soins médicaux dont ils pourraient avoir besoin. »

Jestina Mukoko a été enlevée à son domicile par des agents armés de la Sûreté de l’État vers 5 heures du matin le 3 décembre 2008. Nul n’a su où elle se trouvait avant le 23 décembre.

Directrice de l’organisation de défense des droits humains Projet de paix pour le Zimbabwe (ZPP), Jestina Mukoko a été présentée le 24 décembre 2008 devant un tribunal de Harare ; dans une déclaration faite sous serment, elle a dit avoir été torturée par ses ravisseurs.

Broderick Takawira et Pascal Gonzo, d’autres membres du ZPP, ont été enlevés le 8 décembre alors qu’ils se trouvaient dans les bureaux de cette organisation à Mt Pleasant, banlieue de Harare, par un groupe de membres des forces de sécurité ayant pénétré de force dans les locaux.

Jestina Mukoko se trouve actuellement à l’hôpital, où elle reçoit des soins, et sa libération donne l’espoir que les autres personnes toujours en détention puissent également recouvrer la liberté.

Avant ces libérations, au moins 30 personnes étaient semble-t-il toujours détenues à la suite d’une série d’enlèvements ayant commencé fin octobre 2008.

L’État, qui avait initialement nié leur enlèvement, a à plusieurs reprises fait fi des décisions des tribunaux concernant la libération de ces détenus.

Il semblerait que ces arrestations s’inscrivent dans une stratégie plus large des forces de sécurité zimbabwéennes et d’autres instances étatiques, visant à réduire au silence les détracteurs et les opposants politiques.