Huit personnes inculpées à la suite d’un coup de filet visant des internautes en Malaisie

Alors que les autorités malaisiennes intensifient cette semaine la répression visant les blogueurs du pays, huit personnes ont été inculpées pour avoir critiqué le sultan de Perak sur Internet.

Fuad Ariff Abdul Rashid, homme d’affaires, et son épouse Fatimah Maisurah Abdullah, avocate, ont été inculpés le 9 mars de deux infractions en relation avec la publication en ligne de commentaires critiques à l’égard du sultan malaisien sur le site Internet officiel du dirigeant. Cette inculpation fait suite à un coup de filet national lancé contre des blogueurs le 13 mars, à l’issue duquel des charges similaires ont été retenues contre six personnes.

Amnesty International a demandé aux autorités malaisiennes d’abandonner toutes les poursuites engagées contre les blogueurs.

« Cet événement met à mal la liberté d’expression en Malaisie et crée un dangereux précédent pour toutes les personnes qui souhaitent exprimer leurs points de vue sur Internet », a déclaré Sam Zarifi, directeur du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International.

Les inculpations prononcées contre ces huit personnes surviennent alors que la tension est vive dans l’État de Perak au sujet du rôle de la monarchie et que le gouvernement est accusé par certains de vouloir empêcher le débat à ce sujet. La Malaisie a un système de monarchie par rotation, les chefs de chacun des neuf États occupant à tour de rôle le trône pendant cinq ans.

« Alors qu’Internet a donné aux Malaisiens l’une des rares possibilités qu’ils ont eues d’exprimer relativement librement leurs opinions, le gouvernement semble vouloir étendre à la Toile les restrictions qu’il a déjà infligées à la presse libre, a ajouté Sam Zarifi. Pour un pays qui se proclame à la pointe des technologies de la communication, poursuivre en justice ces blogueurs constitue un pas en arrière très préoccupant. »

En vertu de la Loi sur les communications et le multimédia, les faits reprochés sont passibles d’une peine d’emprisonnement d’un an et d’amendes pouvant aller jusqu’à 50 000 ringgits malaisiens (environ 10 500 euros). Cependant, certaines dispositions de cette loi elles-mêmes prohibent son utilisation à des fins de censure d’Internet. C’est la première fois que les autorités ont invoqué ce texte afin d’inculper des personnes pour des commentaires publiés en ligne.

Un des six blogueurs inculpés la semaine dernière a déjà plaidé coupable et a été condamné à payer une amende de 10 000 ringgits (environ 2 100 euros). Les sept autres sont en attente de procès, après avoir été libérés sous caution.

Parallèlement, Karpal Singh, député de l’opposition et avocat, a été inculpé de sédition pour avoir menacé d’intenter un procès à ce même sultan au sujet de la crise politique que connaît l’État de Perak. Karpal Singh avait déclaré que le sultan avait enfreint la constitution de l’État lorsqu’il a exigé la démission du Premier ministre de l’État.

L’avocat a depuis lors reçu des menaces de mort, et a été assailli par de jeunes membres courroucés de l’Organisation d’union nationale malaise, à la tête de la coalition au pouvoir. Il a cependant bénéficié du soutien solide de l’Ordre des avocats malaisien, fort de 13 000 juristes, qui a défendu son droit d’exprimer une opinion.