Des manifestations dénonçant le problème des exécutions extrajudiciaires imputables aux forces de sécurité se sont déroulées à Bogotá et dans d’autres grandes villes de Colombie le 6 mars.
Ces dernières années, les organisations colombiennes et internationales de défense des droits humains se sont efforcées d’attirer une attention nationale et internationale sur cette question et d’obtenir des mesures de la part des autorités.
Au moins 330 civils auraient été victimes d’homicides extrajudiciaires commis par des membres des forces de sécurité en 2007. L’armée a souvent affirmé que les victimes, pour la plupart des petits paysans, étaient des « membres de la guérilla tués au combat ».
Un grand nombre de ces affaires ont été déférées à la justice militaire mais, le plus souvent, le dossier a été clos sans que le juge ait fait montre d’une intention sérieuse de demander des comptes aux auteurs présumés.
Les manifestations ont été organisées à l’initiative du Mouvement des victimes des crimes de l’État (MOVICE), une coalition de défense des droits humains.
Parce qu’ils s’efforcent dans leur travail de dénoncer les exécutions extrajudiciaires et l’impunité qui caractérise ces cas, des membres d’organisations colombiennes de défense des droits humains ont reçu des menaces de mort et sont publiquement critiqués par des représentants du gouvernement, qui laissent entendre que leur travail s’inscrit dans une stratégie de la guérilla visant à jeter le discrédit sur les forces de sécurité.
Plusieurs syndicalistes et défenseurs des droits humains colombiens ont été tués ou menacés, juste avant ou peu après les grandes manifestations du 6 mars 2008, également organisées par le MOVICE. De nombreuses organisations colombiennes de défense des droits humains avaient alors reçu des menaces par courriel, émanant semble-t-il de groupes paramilitaires.
Le président Álvaro Uribe doit soutenir le travail important et légitime des défenseurs des droits humains dans une déclaration ferme et publique.
« S’il ne le fait pas, cela risque de donner le feu vert à ceux qui souhaitent les prendre pour cibles », a déclaré Marcelo Pollack, du Programme Amériques d’Amnesty International.
« On ne peut laisser se reproduire les menaces et les homicides qui ont marqué de manière tragique les manifestations de l’an dernier. Les autorités colombiennes se doivent de garantir le droit légitime de chacun de manifester pacifiquement », a ajouté Marcelo Pollack.
Amnesty International a engagé les autorités colombiennes à assurer la sécurité des organisateurs des manifestations du 6 mars, ainsi que celle des participants. L’organisation les exhorte par ailleurs à mener une enquête impartiale et efficace sur les menaces et les homicides survenus en 2008, ainsi que sur les violences visant les défenseurs des droits fondamentaux, les syndicalistes et les militants, en vue de déférer tous les responsables présumés à la justice.
Le conflit armé que connaît la Colombie depuis plus de quarante ans met aux prises les forces de sécurité et les paramilitaires avec les groupes de guérilla. Les civils demeurent les principales victimes du conflit, les deux parties s’obstinant à bafouer le droit de la population civile de ne pas se laisser entraîner dans les hostilités.
Tous les belligérants – forces de sécurité, groupes paramilitaires et mouvements de guérilla – sont responsables d’atteintes aux droits humains systématiques et généralisées et de violations du droit international humanitaire.