Le rapport remis à l’ONU par le gouvernement mexicain ne reflète pas la réalité

Selon Amnesty International, le rapport présenté par le gouvernement mexicain sur la situation des droits humains au Mexique ne reflète pas la réalité.

Ce rapport, qui a été soumis au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, ne reconnaît pas que les politiques adoptées par le gouvernement ne sont souvent pas mises en œuvre ou suivies d’effets. Il ne fait en outre pas état de l’aggravation de la situation des droits humains dans de nombreuses régions du pays.

Le Mexique fait partie des 16 pays examinés lors de la quatrième session du groupe de travail de l’Examen périodique universel (EPU) qui a débuté lundi à Genève. Ce mécanisme d’examen a été mis en place par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies. L’examen de la situation au Mexique devrait avoir lieu le 10 février.

« Le rapport soumis par le gouvernement mexicain énumère une série de mesures positives et de réformes qui sont les bienvenues, a déclaré Kerrie Howard, directrice adjointe du programme Amériques d’Amnesty International. Le problème, c’est qu’il ne contient aucune information sur les résultats obtenus en matière de prévention des violations persistantes des droits humains et de lutte contre l’impunité. »

Amnesty International a présenté, en vue de l’actuelle série d’examens, ses propres rapports exposant les principales préoccupations en matière de droits humains en ce qui concerne 12 des 16 pays passés en revue. Le rapport de l’organisation consacré au Mexique signale que :

le Mexique n’a, à ce jour, pas encore reconnu dans sa Constitution le statut des traités internationaux relatifs aux droits humains ;
les autorités n’ont encore amené personne à rendre des comptes pour les 100 homicides et les 700 disparitions forcées qui ont eu lieu entre les années 1960 et 1980 ;
les agents de la police fédérale, d’État et municipale impliqués dans de graves violations des droits humains – détentions arbitraires, actes de torture, viols et homicides illégaux, notamment – commises en particulier lors des troubles qui ont eu lieu en 2006 à San Salvador Atenco et à Oaxaca, n’ont toujours pas été traduits en justice ;
la justice militaire continue de juger des cas de violation des droits humains alors que les normes internationales insistent sur le fait que ces affaires doivent être jugées par des juridictions civiles ;
il a été fait état d’une augmentation des atteintes aux droits humains perpétrées par des membres des forces de sécurité – détentions arbitraires, torture et autres formes de mauvais traitements, violences sexuelles et homicides illégaux, notamment – dans le cadre des opérations de lutte contre les bandes criminelles ;
les défenseurs des droits humains, en particulier dans les zones rurales, sont souvent persécutés et parfois détenus de manière prolongée sur la base d’accusations pénales forgées de toutes pièces ou motivées par des considérations politiques ;
les populations indigènes et les autres populations marginalisées sont parfois harcelées en raison de leur opposition à des projets de développement affectant leurs moyens de subsistance ;
les migrants en situation irrégulière qui traversent le Mexique sont fréquemment maltraités par des agents de l’État et victimes de violences sexuelles ou d’autres formes de violence infligées par des groupes criminels ;
des progrès ont été réalisés en matière de législation pour protéger les femmes contre la violence, mais les nouvelles dispositions sont peu appliquées. Le nombre de plaintes, de poursuites et de condamnations restent très rares dans les affaires de violences domestiques, de viols et de meurtres de femmes. La Loi générale de 2007 destinée à prévenir la violence contre les femmes a été adoptée depuis deux ans, mais deux États n’ont même pas adopté les textes nécessaires pour la mettre en application ;
la pauvreté et la marginalisation continuent de priver une partie de la population rurale, en particulier la population rurale indigène, du droit à un niveau de vie décent et du droit au développement dans le respect de ses besoins et de son intérêt.

« Amnesty International reconnaît que le rapport présenté par le Mexique met l’accent sur l’invitation ouverte adressée aux mécanismes internationaux chargés des droits humains, a ajouté Kerry Howard. Étant donné le rôle crucial que le Mexique a joué dans l’élaboration de l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, l’organisation espère que le gouvernement saura se saisir de cette occasion qui lui est offerte de renforcer ses efforts visant à résoudre les problèmes que connaît le Mexique en matière de droits humains. »

L’EPU est le tout premier mécanisme des Nations unies chargé de passer en revue de manière systématique la situation des droits humains dans chacun des 192 pays membres de l’ONU. Au cours de la période 2008-2011, chaque année 48 pays seront examinés. Le groupe de travail de l’EPU passera en revue le bilan de 16 d’entre eux lors de chacune de ses trois sessions annuelles.

Parmi les autres pays qui doivent être examinés ce mois-ci par le Conseil des droits de l’homme figurent, entre autres, l’Allemagne, l’Arabie saoudite, la Chine, Cuba, la Fédération de Russie, et le Nigeria. L’actuelle session de l’EPR s’achèvera le 13 février.