La nouvelle mission de l’Union européenne au Kosovo doit apporter la justice

La nouvelle mission conduite par l’Union européenne (UE) au Kosovo doit prendre sans délai des mesures pour résoudre les très nombreux cas de crimes de guerre et d’autres violations des droits humains qui n’ont pas été traités.

EULEX, la mission « état de droit » de l’UE, doit officiellement prendre le relais de la mission de l’ONU le 9 décembre.

Chargée de superviser la réforme de la justice pénale au Kosovo, elle aura aussi la responsabilité de certains aspects du maintien de l’ordre. Comme le faisait précédemment la Mission d’administration intérimaire des Nations unies au Kosovo (MINUK), elle fera appel à des procureurs et des juges internationaux pour enquêter sur les crimes de guerre et autres infractions graves et engager des poursuites contre leurs auteurs présumés.

« Dix ans après la fin de la guerre au Kosovo, la mission dirigée par l’Union européenne doit faire le nécessaire pour que les proches des plus de 3 000 personnes qui ont disparu ou ont été enlevées soient informés de ce qu’il est advenu de ceux qui leur étaient chers, et veiller à ce que les personnes soupçonnées d’être responsables de ces crimes soient déférées à la justice », a déclaré Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

« Avec plus de 1 500 enquêtes sur des crimes de guerre n’ayant toujours pas abouti et des centaines, voire des milliers, de crimes de guerre n’ayant pas encore fait l’objet d’investigations, la mission devra consacrer ses ressources à faire en sorte que la justice soit rendue aux victimes de toutes les parties au conflit. »

Amnesty International a également demandé à l’UE de faire le nécessaire pour que tous les membres de la mission soient amenés à rendre compte de leurs actes.

« La mission de l’UE dans son ensemble doit être soumise à une surveillance et une obligation de rendre des comptes beaucoup plus grandes que la MINUK, dont des membres se sont rendus coupables de violations des droits humains qui, dans de nombreux cas, ne seront jamais élucidées », a ajouté Nicola Duckworth.

« En l’absence d’institution des droits humains pouvant réellement demander des comptes à la communauté internationale, il est très important que EULEX débute sa mission en annonçant quels mécanismes sont mis en place pour faire en sorte que ses membres soient tenus de rendre des comptes. »

Amnesty International a fait part de sa préoccupation quant à l’entente passée avec les États-Unis, selon laquelle les citoyens de ce pays participant à la mission ne relèveront pas de la compétence de EULEX.

L’organisation constate également qu’il n’y a pas actuellement de mécanisme indépendant chargé de surveiller la Force internationale de paix au Kosovo (KFOR) conduite par l’OTAN, qui restera sur place. Pour la KFOR, l’obligation de rendre des comptes dépend des mesures prises par les pays qui envoient des soldats pour que les allégations de violations des droits humains fassent l’objet de véritables enquêtes.

Au cours des dix dernières années, Amnesty International a recueilli des informations sur des affaires dans lesquelles la MINUK ou des membres de son personnel se sont rendus responsables de violations des droits humains – homicide illégal, détention illégale, torture et mauvais traitements, participation à du trafic d’être humains pour prostitution forcée, violation du droit à la santé de Roms, Ashkalis et « Égyptiens » vivant dans des camps de réfugiés contaminés au plomb, entre autres.

Le Groupe consultatif sur les droits de l’homme créé par la MINUK en 2006 doit s’occuper d’une cinquantaine de cas de violations des droits humains, parmi lesquels l’homicide de deux jeunes Albanais par des policiers roumains de la MINUK lors d’une manifestation en février 2007. « Nous déplorons cette insuffisance et regrettons le fait que la plupart des violations des droits humains vont rester impunies », a souligné Nicola Duckworth.