Les réfugiés détenus par la Thaïlande doivent être remis en liberté

Il y a 92 enfants parmi les 158 réfugiés Hmongs du Laos emprisonnés depuis deux ans dans un centre de détention en Thaïlande.

Ces réfugiés qui vivent dans des conditions très dures sont sous la menace constante d’être renvoyés de force au Laos, où ils risquent d’être victimes de violations graves de leurs droits fondamentaux. Ils sont enfermés vingt et une heures par jour dans un bâtiment où ils s’entassent dans des cellules dépourvues de fenêtres. Protestant contre leur détention, certains ont mené des grèves de la faim ou menacé de se suicider.

Un grand nombre de ces personnes sont en mauvaise santé. Les enfants, notamment les 11 bébés nés en détention, souffrent particulièrement des conditions de vie pénibles. Beaucoup d’entre eux ne vont pas bien et ce n’est que récemment que des soignants ont été autorisés à intervenir dans le centre de détention.

Ces personnes ont fui la persécution dont elles étaient victimes au Laos. Bien que reconnues réfugiées par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), elles ont été arrêtées en novembre 2006 à Bangkok et dans la province de Phetchabun, dans le nord de la Thaïlande. Elles sont emprisonnées dans le centre de détention pour immigrés de Nong Khai, dans le nord du pays.

Les autorités thaïlandaises ont essayé de les expulser vers le Laos en janvier 2007. Elles ont fait monter de force les femmes et les enfants dans des bus et les ont emmenés à la frontière laotienne, tandis que les hommes se barricadaient dans leur cellule.

Devant les protestations exprimées par plusieurs États ainsi que par le HCR et des ONG, dont Amnesty International, le gouvernement thaïlandais a renoncé à son projet de rapatriement forcé.

Un haut représentant de l’armée thaïlandaise s’est rendu dans le centre le 10 avril 2008 et a indiqué que le groupe allait être renvoyé au Laos, ce qui a accentué les peurs et le désespoir de toutes ces personnes.

« Les réfugiés ont indiqué à Amnesty International que des représentants des pouvoirs publics thaïlandais avaient menacé d’expulser tout le groupe vers le Laos si l’un d’eux cherchait à s’évader ou si une femme tombait enceinte, a indiqué Brittis Edman, qui s’occupe des recherches sur l’Asie du Sud-Est au sein d’Amnesty International. Ces menaces de punition collective ne font qu’accroitre la peur dans laquelle vivent les réfugiés. »

Les gouvernements de l’Australie, du Canada, des États-Unis et des Pays-Bas se sont engagés à examiner la possibilité d’une réinstallation dans leur pays.

Tenu à l’écart du groupe depuis août 2007, le HCR a obtenu ces derniers temps de pouvoir rencontrer les réfugiés une fois par mois dans une salle d’entrainement du centre de détention. Les détenus évoquent lors de ces rencontres leur remise en liberté et leur réinstallation, bien que les autorités thaïlandaises n’aient manifesté aucun signe laissant supposer qu’elles allaient les autoriser à quitter les lieux.

La construction d’une annexe sur l’arrière du bâtiment où sont actuellement détenus les réfugiés vient nourrir la crainte qu’ils ne soient jamais remis en liberté. Accessible uniquement par le bâtiment existant, cette extension est totalement dépourvue de portes et de fenêtres. Les réfugiés craignent de n’être plus du tout autorisés à sortir une fois les travaux achevés.

Les Hmongs sont l’un des multiples groupes ethniques présents au Laos. La plupart sont bien intégrés dans la société laotienne, mais certains groupes vivent isolés dans la jungle depuis la fin de la guerre du Viêt-Nam, en 1975. En butte aux attaques de l’armée laotienne, qui les considère toujours comme des membres d’un mouvement très ancien de résistance armée, ils sont contraints à la clandestinité. La plupart des réfugiés et des demandeurs d’asile hmongs en Thaïlande affirment être liés d’une manière ou d’une autre à ces groupes.

Des milliers de Hmongs laotiens vivent en Thaïlande. On estime que 6 500 personnes, notamment des demandeurs d’asile, sont présentes dans un camp de la province de Phetchabun depuis 2004. En 2007, le gouvernement thaïlandais a décidé avec les autorités laotiennes qu’il allait renvoyer ces personnes dans leur pays d’origine, y compris celles dont la demande d’asile n’a pas été examinée dans le cadre d’une procédure équitable et satisfaisante.

Plus de 1 500 Laotiens ont été rapatriés entre février et septembre 2008. Certains ont de toute évidence été renvoyés contre leur gré, notamment une femme dont les enfants sont restés dans le camp en Thaïlande. Depuis décembre 2005, ce sont plus de 2 000 Hmongs du Laos – parmi lesquels des demandeurs d’asile – qui ont été renvoyés de force dans leur pays d’origine. À leur retour, certains ont été arrêtés arbitrairement et torturés.

Amnesty International a fait part de sa préoccupation quant au fait que de nombreux Hmongs laotiens présents en Thaïlande risquent de subir de graves violations des droits humains si on les expulse vers le Laos. Un grand nombre de ceux qui ont été renvoyés jusqu’à présent ont été placés dans des villages hmongs spécifiques après avoir suivi une « rééducation ».

Les autorités laotiennes ont emmené à plusieurs reprises des diplomates et des journalistes dans ces villages de réinsertion, mais les agences des Nations unies et les ONG ne peuvent, elles, s’y rendre en toute liberté. On ignore où se trouvent la plupart des personnes rapatriées.

« Amnesty International demande aux autorités thaïlandaises de remettre immédiatement en liberté les 158 réfugiés hmongs laotiens qui sont détenus illégalement et de faire en sorte que les préparatifs en vue de leur réinstallation dans un pays tiers puissent s’effectuer sans plus attendre », a déclaré Donna Guest, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International.