Des organisations demandent à l’Europe de protéger les détenus de Guantánamo qui ne peuvent pas être renvoyés dans leur pays

Cinq organisations de défense des droits humains ont demandé aux États européens d’accorder une protection humanitaire aux détenus de Guantánamo qui ne vont être inculpés d’aucune infraction mais ne peuvent être renvoyés dans leur pays d’origine car ils risquent d’y être soumis à la torture ou à d’autres mauvais traitements.

Amnesty International, le Center for Constitutional Rights, Human Rights Watch, Reprieve et la Fédération internationale des droits de l’homme ont demandé aux gouvernements européens d’admettre ces détenus sur leur territoire et de leur apporter l’assistance dont ils ont besoin.

Les organisations ont lancé cet appel à l’issue d’un atelier stratégique tenu durant deux jours à Berlin avec d’autres acteurs internationaux actifs dans le domaine de la protection humanitaire. Cette solution, qui constituerait un pas important vers la fermeture du centre de détention installé sur la base navale américaine de Guantánamo (Cuba), doit être trouvée en collaboration avec le nouveau gouvernement des États-Unis.

Parmi les détenus présents à Guantánamo – qui, ont indiqué les autorités américaines, ne vont pas être inculpés – une cinquantaine de personnes ne peuvent légalement être renvoyées vers leur pays d’origine car elles risquent d’y subir la torture ou d’autres formes de mauvais traitements. Ces personnes sont originaires de Chine, de Libye, d’Ouzbékistan, de Russie et de Tunisie.

Les organisations ont souligné dans une déclaration commune que les États-Unis avaient la responsabilité fondamentale et l’obligation légale de trouver des solutions pour ces personnes détenues illégalement depuis des années, notamment de leur trouver un lieu sûr où vivre et se réinsérer.

« Tout le monde semble d’accord, à juste titre, sur le fait qu’il faut fermer Guantánamo, et le président élu Barack Obama a déclaré qu’il allait le faire, a indiqué Daniel Gorevan, directeur de la campagne Contre le terrorisme : la justice à Amnesty International. Les autres États ont la possibilité d’agir en ce sens en offrant une protection aux personnes qui ne peuvent être renvoyées dans leur pays après leur remise en liberté. Cette démarche aurait un double effet : d’une part elle soulagerait les souffrances d’une personne détenue illégalement et dont les droits fondamentaux ont été bafoués, d’autre part elle permettrait de progresser sur la voie qui doit mettre un terme à ce scandale des droits humains qu’est Guantánamo. »

Cori Crider, juriste à Reprieve, a déclaré : « Les deux côtés de l’Atlantique disposent là d’une occasion en or de dépasser les actes désastreux commis dans le cadre de la “guerre contre le terrorisme” : restitutions, détention secrète, torture. Le président élu Obama dit qu’il va fermer Guantánamo. Il reste à savoir quand et comment. L’un des détenus suivis par Reprieve a été renvoyé en Tunisie. Là, il a été drogué et frappé, et on a menacé de violer sa femme et sa fille. »

« Un autre se démène actuellement pour rester à Guantánamo car des responsables tunisiens ont menacé de le soumettre au “supplice de l’eau dans le tonneau”. Les États-Unis ont tout le pouvoir de le renvoyer chez lui. L’Europe peut envoyer un message fort en s’adressant à Barack Obama et en proposant une solution permettant à ces quelques personnes de vivre en toute sécurité. »

« Le président élu Barack Obama s’est engagé à fermer Guantánamo, mais il va avoir besoin de l’aide de l’Europe, a souligné pour sa part Joanne Mariner, directrice du programme Terrorisme et Contre-terrorisme de Human Rights Watch. Les États européens peuvent apporter une aide cruciale en décidant d’accueillir quelques-uns des détenus qui ne peuvent être rapatriés. »