Une chef de chœur turque accusée de propagande terroriste

Les autorités turques restent déterminées à arrêter une chef de chœur accusée, de même que les enfants qui chantent dans sa chorale, de propagande en faveur d’un groupe séparatiste interdit.

Un mandat d’arrêt a été lancé contre Duygu Ozge Bayar après que la chorale de Yenisehir, un quartier de Diyarbakir, eut chanté un hymne en langue kurde intitulé Ey Raqip lors d’un festival musical international qui a eu lieu à San Francisco en octobre 2007. Cette chorale a chanté dans neuf langues différentes et a notamment interprété un chant patriotique turc (Canakkale Marsi).

Amnesty International a diffusé le 18 juin une déclaration publique dans laquelle elle se dit préoccupée par la menace que font peser ces poursuites sur le droit à la liberté d’expression, et souligne que l’interprétation d’Ey Raqip ne peut pas être considérée comme menaçant l’ordre public.

Les choristes et leur chef de chœur ont été accusés de « propagande en faveur d’une organisation terroriste ou de ses objectifs » après que le ministère public turc eut déclaré que ce chant était l’hymne du PKK, l’organisation séparatiste que l’armée turque combat depuis vingt ans. Ce conflit a coûté la vie à près de 40 000 personnes.

Les neuf choristes âgés de douze à dix-sept ans qui ont été accusés de cette infraction ont été jugés par deux tribunaux différents. Ils encouraient chacun une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.

Trois garçons dont deux étaient âgés de quinze ans et le troisième de dix-sept ans au moment où des faits qui leur étaient reprochés ont été jugés par un tribunal pour adultes à Diyarbakir, dans le sud-est de la Turquie, le 19 juin. Six autres choristes âgés de moins de quinze ans ont été poursuivis pour la même infraction devant un tribunal pour enfants.

Les accusations ont été abandonnées dans les deux cas car les juges ont estimé que les enfants avaient interprété le chant en langue kurde parce qu’on le leur avait demandé, et qu’ils n’avaient pas eu l’intention de commettre un crime.

L’avocat des enfants, Baran Pamuk, a déclaré qu’il n’était pas satisfait car la décision rendue impliquait que le fait de chanter Ey Raqip restait un crime.

Le directeur du San Francisco World Music Festival, Michael Santoro, qui avait invité le chœur à participer à cet événement culturel, a déclaré : « Il ne s’agissait pas de propagande politique, et il n’y avait aucune visée séparatiste. »

Duygu Ozge Bayar a indiqué que ce chant avait été réclamé par le public à San Francisco. « Nous avons fait partager notre culture là-bas, au festival, a-t-elle ajouté dans une déclaration. Nous avons interprété plusieurs chants représentatifs des styles de Diyarbakir […] Si le fait de les chanter constitue du séparatisme, alors nous nous sommes rendus coupables d’avoir promu le séparatisme. »

Duygu Ozge Bayar continue de faire l’objet d’un mandat d’arrêt. Après le festival elle est restée aux États-Unis pour y étudier l’anglais.