Après le passage du cyclone Nargis qui a provoqué la mort de dizaines de milliers de personnes et le déplacement d’un million d’autres, le gouvernement du Myanmar (anciennement Birmanie) fait délibérément obstacle à l’aide dont le pays a pourtant besoin pour sauver des vies. Son refus d’ouvrir ses frontières empêche la population de recevoir l’aide massive (notamment en termes de compétences techniques) nécessaire, et va provoquer d’autres décès ainsi que des souffrances supplémentaires pour ceux qui ont été touchés par cette catastrophe.
Amnesty International a renouvelé l’appel urgent qu’elle a lancé au gouvernement pour qu’il permette à l’aide technique et matérielle de parvenir à tous les secteurs touchés par le cyclone en veillant à ce qu’elle soit distribuée, sans discrimination, à ceux qui en ont besoin.
Un porte-parole d’Amnesty International a indiqué que l’organisation estime qu’en bloquant délibérément l’aide destinée aux victimes le gouvernement du Myanmar pourrait violer le droit de ses citoyens à la vie, à l’alimentation et à la santé.
« Chaque obstacle qui empêche la population d’avoir accès à l’aide dont elle a besoin d’urgence risque d’accroître le nombre de morts, déjà extrêmement élevé », a souligné Benjamin Zawacki, chargé des recherches sur le Myanmar au sein d’Amnesty International.
Le gouvernement du Myanmar a déclaré que le passage du cyclone avait fait près de 23 000 morts, mais des observateurs indépendants estiment que ce sont près de 100 000 personnes qui ont perdu la vie. Par ailleurs, plus d’un million de personnes sont à présent à la rue et dans l’impossibilité d’obtenir ce dont elles ont absolument besoin en termes de nourriture, d’hébergement et de soins médicaux.
Le gouvernement du Myanmar s’est de plus en plus isolé du reste du monde en raison de son triste bilan en matière d’atteintes aux droits humains et de crimes de guerre. Il n’a pas apporté aux centaines de milliers de ses citoyens les plus durement touchés l’aide dont ils ont cruellement besoin, et a jusqu’à présent empêché les travailleurs humanitaires étrangers et le matériel fourni par l’assistance internationale d’accéder aux régions les plus affectées par le passage du cyclone.
Amnesty International a indiqué qu’elle craignait que des milliers d’autres personnes ne meurent à cause de la malnutrition, des maladies contagieuses et parce qu’elles ne peuvent pas se protéger des intempéries. Les risques de mort ou de blessure permanente augmentent chaque jour qui passe pour les victimes du cyclone.
Dans une déclaration qu’il a faite vendredi et qui a été citée par les médias, le ministre des Affaires étrangères du Myanmar a indiqué que le pays ne recevrait pas d’équipes de secours et de journalistes étrangers. Il aurait ajouté que le Myanmar entendait en revanche réceptionner l’aide et la distribuer « par ses propres moyens ».
En conséquence, le Premier ministre thaïlandais, Samak Sundaravej, qui avait prévu de se rendre au Myanmar pour y rencontrer les autorités, a annulé cette visite. Une équipe de secours qui s’était rendue à Yangon par avion depuis le Qatar aurait été refoulée.
Les autorités refusent ainsi l’assistance technique dont le pays a pourtant tellement besoin. En outre, l’ambassade du Myanmar à Bangkok aurait fermé ses portes vendredi en raison d’un jour férié local au lieu de délivrer des visas aux travailleurs humanitaires en attente de ces documents dans la capitale thaïlandaise.
En raison de ce qu’il considère comme des « restrictions inacceptables », le Programme alimentaire mondial a brièvement suspendu ses vols vers le Myanmar. D’autre part, des organisations de défense des droits humains ont signalé que des représentants des autorités à Yangon avaient vendu du matériel de toiture au lieu de le distribuer aux sinistrés.
Amnesty International a appelé les pays voisins du Myanmar, en particulier ceux qui entretiennent des relations amicales avec son gouvernement – la Chine, l’Inde, la Thaïlande et le Viêt-Nam –, à continuer d’insister auprès de ce dernier afin qu’il facilite les démarches entreprises pour fournir une aide humanitaire et afin qu’il mette en place une coordination transparente de ces initiatives avec la communauté internationale.
Le gouvernement du Myanmar a annoncé qu’il allait se conformer à ce qui avait été prévu pour la tenue d’un référendum national concernant l’adoption d’une nouvelle constitution, le 10 mai. Selon Amnesty International, ce texte vise à saper le respect des droits humains et à consolider le régime militaire et l’impunité.
Alors que des centaines de milliers de ses citoyens luttent pour obtenir un abri, de la nourriture et des soins médicaux élémentaires, le Myanmar s’est donné pour priorité de faire accepter la nouvelle constitution.
« Les dirigeants du Myanmar montrent une fois de plus qu’ils ne se soucient guère du bien-être de la population, a déclaré Benjamin Zawacki. Au lieu de venir en aide aux centaines de milliers de personnes qui se trouvent dans une terrible situation, le gouvernement se préoccupe avant tout de renforcer son pouvoir. »