La Cour suprême des États-Unis déclare les injections létales constitutionnelles

Mercredi 16 avril, la Cour suprême fédérale a estimé que les procédures suivies pour les exécutions par injection létale dans le Kentucky étaient conformes à la Constitution. Du fait de cette décision, un certain nombre de juridictions des États-Unis vont probablement prendre des dispositions pour permettre la reprise des exécutions.

Amnesty International pense toutefois qu’il est peu probable que cet arrêt mette un terme aux recours sur la constitutionnalité des injections létales.

Un moratoire de facto sur les exécutions était observé aux États-Unis depuis fin septembre 2007, dans l’attente de la décision de la Cour suprême. La majorité des 36 États non abolitionnistes, de même que l’État fédéral, recourent à la même association de substances chimiques que le Kentucky pour anesthésier, paralyser et tuer les condamnés à mort.

Dans plusieurs États, notamment la Floride, la Géorgie, l’Arizona et l’Ohio, des responsables ont déjà indiqué que l’arrêt Baze c. Rees devrait ouvrir la voie à une reprise des exécutions. De nouvelles dates d’exécution seront très probablement fixées prochainement dans des États tels que le Texas et l’Alabama.

Amnesty International est opposée à la peine de mort en toutes circonstances et sans condition, quelle que soit la méthode choisie pour tuer le condamné. Pour l’organisation, aucun système d’application de la peine capitale ne peut être considéré comme humain, juste, fiable ou utile.

Le président de la Cour suprême, John Roberts, a indiqué que dans l’avenir, un prisonnier ne pourrait probablement obtenir un sursis en invoquant la question de l’injection létale que si « le condamné établit que le protocole d’injection létale suivi par l’État présente un risque avéré d’entraîner des douleurs intenses ».

« Il doit prouver que ce risque est particulièrement élevé par rapport à ceux que présentent les autres options connues et disponibles. », a-t-il ajouté.

Le juge Stevens, bien qu’au nombre des magistrats ayant estimé que le recours à l’injection létale était conforme à la Constitution, a écrit qu’il avait cru que la décision de la Cour suprême mettrait un terme au débat sur l’utilisation de cette méthode d’exécution.

« Il semble aujourd’hui évident que ce ne sera pas le cas », a-t-il conclu. Il a ajouté qu’il était convaincu que l’affaire relancerait également le débat sur la peine capitale en général.

Le juge Stevens a écrit que sa propre expérience l’avait conduit à la conclusion suivante : « appliquer la peine capitale, c’est supprimer une vie inutilement en ne contribuant que de manière très minime à des objectifs sociaux ou publics identifiables. Une peine qui apporte des bénéfices si négligeables à l’État est manifestement un châtiment excessif, cruel et inhabituel. »

Le juge Breyer, de même, a évoqué les préoccupations que suscite le recours à la peine capitale, au-delà des risques liés aux injections létales :

« La peine de mort en soi, bien évidemment, comporte des risques non négligeables : ainsi, des innocents peuvent être exécutés, une hostilité injustifiée (liée à la race des victimes, par exemple) peut jouer un rôle, les condamnés peuvent passer des années, voire des décennies dans le couloir de la mort […] Mais la question de la légalité de la peine capitale ne nous est pas posée. », a-t-il déclaré.

Le juge Stevens, quant à lui, a fait valoir que le risque d’exécuter des innocents pouvait être « entièrement éliminé » grâce à l’abolition de la peine de mort.

Mettre un terme à la peine capitale, c’est abandonner une politique qui détourne des vrais problèmes et sème la destruction et la division, une politique incompatible avec des valeurs largement partagées, a souligné Amnesty International. Fin 2007, l’Assemblée générale des Nations unies a manifesté son adhésion à ces valeurs en adoptant une résolution historique appelant à un moratoire mondial sur les exécutions.

Amnesty International partage le point de vue exprimé par le juge Stevens au sujet de l’affaire Baze : « Les homicides approuvés par l’État sont de plus en plus anachroniques. »