Les arrestations se poursuivent au Myanmar

Le gouvernement du Myanmar continue d’arrêter des moines et des dissidents alors même que le Premier ministre Thein Sein s’était engagé début novembre auprès du représentant spécial du secrétaire général de l’ONU, Ibrahim Gambari, à mettre fin aux arrestations. Deux mois après la violente répression des manifestations pacifiques, les droits à la liberté d’expression et d’association sont toujours étouffés. Cette situation est en contradiction avec les déclarations du gouvernement qui a à plusieurs reprises fait état d’un retour à la normale dans le pays. Reste la question de savoir ce que veut dire «retour à la normale» dans le contexte du Myanmar. Pour le gouvernement militaire, cela signifie peut-être un retour à des violations des droits humains systématiques et généralisées perpétrées à l’abri de l’attention des médias. La communauté internationale ne doit donc plus tolérer cette situation. Amnesty International regrette vivement que les arrestations se poursuivent, alors que le gouvernement prétend le contraire. La semaine dernière, le gouvernement du Myanmar a assisté au 40e sommet de l’ASEAN, au cours duquel il a signé la nouvelle charte de l’organisation – les signataires s’engagent notamment à promouvoir et protéger les droits humains. Pas moins de 700 personnes arrêtées pendant et depuis le mouvement de protestation du mois de septembre sont toujours derrière les barreaux, de même que les 1150 prisonniers politiques qui étaient déjà incarcérés avant ces événements. Des détenus sont maltraités et parfois même torturés. Certains ont été condamnés à de longues peines de prison à l’issue de procès inéquitables. Le Myanmar ne s’est toujours pas expliqué sur les disparitions forcées et sur les homicides qui ont été commis au cours des manifestations. Les autorités n’ont pas mené d’enquêtes indépendantes et impartiales sur les morts en détention ni même tenté de déférer à la justice les responsables présumés d’homicides illégaux et d’autres violations des droits humains. Bien au contraire, elles ont annoncé que des poursuites en justice seraient engagées contre les 91 personnes qu’elles reconnaissent avoir placées en détention en raison de leur participation aux manifestations – elles ont mentionné la «conspiration en vue de commettre des actes de terrorisme». Amnesty International appelle de toute urgence le gouvernement du Myanmar à mettre un terme aux arrestations, et à libérer toutes les personnes détenues ou emprisonnés simplement parce qu’elles ont exercé, de manière pourtant pacifique, leur droit à la liberté d’expression, de réunion et d’association, y compris les prisonniers d’opinion incarcérés depuis peu ou de longue date.

  Amnesty International a obtenu confirmation des arrestations suivantes, opérées depuis le début du mois de novembre:

4 Novembre, U Gambira, président de l’Alliance panbirmane des bonzes, a été arrêté. Cet homme, qui a été l’un des dirigeants du mouvement de protestation du mois de septembre, aurait été inculpé de trahison. Deux membres de sa famille qui avaient été arrêtés et retenus en «otages» pour le contraindre à sortir de la clandestinité sont toujours détenus; 13 Novembre, le gouvernement a arrêté Su Su Nway, membre de la section des jeunes de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), le principal parti d’opposition; un autre jeune militant, Bo Bo Win Hlaing, a été arrêté en même temps qu’elle alors qu’il posait des affiches antigouvernementales; 14 Novembre, au moins trois personnes ont été arrêtées à Yangon parce qu’elles distribuaient des tracts antigouvernementaux; 15 Novembre, les autorités ont effectué une descente dans un monastère de l’État d’Arakan, dans l’ouest du pays, et arrêté le moine U Than Rama, recherché pour sa participation au mouvement de protestation du mois de septembre. Il aurait été frappé pendant son arrestation et on ignore depuis où il se trouve; 20 Novembre, Myint Naing, personnalité de la NLD, a été arrêté; 20 Novembre, U Tin Ohn, responsable politique de l’ethnie rakhine, a été arrêté; on ignore depuis où il se trouve; 20 / 21 Novembre, d’autres personnalités appartenant à différentes minorités ethniques, dont Cin Sian Thang et U Aye Thar Aung, de l’ethnie rakhine, Naing Ngwe Thein, du Front démocratique national mon (MNDF), et U Hkun Htoo, dirigeant politique kachin, ont été arrêtées puis relâchées après avoir été interrogées; 24 Novembre, huit membres de l’Organisation pour l’indépendance kachin (KIO) ont été arrêtés. On pense que leur arrestation est due au fait que le KIO a refusé d’obéir au gouvernement qui lui avait demandé de désavouer publiquement une déclaration de Daw Aung San Suu Kyi (rendue publique le 8 novembre par le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU, Ibrahim Gambari); 26 Novembre, Aung Zaw Oo, membre de l’organisation Défenseurs et promoteurs des droits humains (HRDP), a été arrêté à Yangon, probablement pour avoir participé à l’organisation d’événements pour la journée internationale des droits de l’homme qui a lieu le 10 décembre; 27 Novembre, trois autres personnes ont été arrêtées ensemble dans un salon de thé de Yangon. Il s’agit de: Win Maw, guitariste de Shwe Thansin, l’un des groupes phares des années 1990 au Myanmar – il a été emprisonné de 1997 à 2003 pour avoir écrit des chansons soutenant Daw Aung San Suu Kyi; Myat San, ancien prisonnier politique détenu pendant une longue période et membre de l’Organisation étudiante tricolore – il a assuré la sécurité de Daw Aung San Suu Kyi en 1989; et Aung Aung, un ami des deux hommes.