Gambie

Amnesty International ne prend pas position sur les questions de souveraineté ou les conflits territoriaux. Les frontières apparaissant sur cette carte sont basées sur les données géospatiales des Nations unies.
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Gambie 2022

Le gouvernement a accepté de mettre en œuvre la plupart des recommandations de la Commission vérité, réconciliation et réparation, y compris le lancement de poursuites contre l’ancien président Yahya Jammeh pour les violations des droits humains perpétrées sous son régime. La liberté d’expression des personnes qui critiquaient le gouvernement a été menacée. La police a fait un usage excessif de la force contre les manifestant·e·s. Les femmes sont restées sous-représentées dans la vie politique ainsi que dans les médias. Les prisons étaient toujours surpeuplées et des personnes ont été maintenues en détention provisoire de façon prolongée. Au moins cinq personnes ont été condamnées à mort.

Contexte

Adama Barrow a entamé son second mandat de président en janvier. Des élections législatives se sont tenues en avril.

Droit à la vérité, à la justice et à des réparations

En janvier, trois anciens Junglers (membres d’un escadron de la mort paramilitaire qui sévissait sous la présidence de Yahya Jammeh), dont l’ex-commandant de la Garde républicaine, ont été arrêtés à leur arrivée dans le pays depuis la Guinée équatoriale. Aucune accusation n’étant retenue contre eux, la Haute Cour a ordonné leur libération un mois plus tard. En mars, la Commission vérité, réconciliation et réparation (TRRC), qui avait pour mission de dresser un bilan impartial des atteintes aux droits humains perpétrées pendant les 22 ans du régime de Yahya Jammeh, a recommandé de gracier Sanna Sabally, ancien vice-président du Conseil provisoire des forces armées. Celui-ci avait pourtant reconnu sa responsabilité dans l’exécution extrajudiciaire de plusieurs soldats. Les organisations de victimes ont condamné la procédure ayant abouti à la recommandation d’une grâce, à laquelle elles n’ont pas pu contribuer, et appelé le gouvernement à ignorer cette recommandation.

En mai, le gouvernement a publié un livre blanc et accepté 263 des 265 recommandations de la TRRC, dont la suspension des fonctionnaires en poste accusés de violations des droits humains dans le rapport de la TRRC, et le lancement de poursuites contre l’ancien président Yahya Jammeh. Le gouvernement a rejeté la recommandation de la Commission l’invitant à gracier Sanna Sabally. En juin, le ministre de la Justice a révélé que le gouvernement ne disposait pas d’un budget suffisant pour commencer à mettre en œuvre les recommandations de la TRRC en 2022.

Le ministre de la Justice a déclaré en novembre que l’État avait entamé des discussions avec la CEDEAO pour former un tribunal hybride en vue de juger les crimes commis sous le régime de Yahya Jammeh.

Liberté d’expression

Lors de sa rencontre annuelle avec le Conseil des sages musulmans de Banjul en mai, le président s’en est pris verbalement au militant Madi Jobarteh, après que celui-ci a appelé à la destitution d’un ministre soupçonné de mauvaise gestion des terres publiques. Le président l’a qualifié de « fauteur de troubles » et l’a accusé de vouloir mettre le feu au pays. Il a également critiqué les médias pour lui avoir servi de tribune, et averti que cela ne serait pas toléré.

Recours excessif à la force

Le 10 mars, des affrontements ont eu lieu à Brikama entre des sympathisant·e·s du Parti démocratique unifié (UDP), formation de l’opposition, et l’Unité d’intervention de la police, après que la commission électorale eut rejeté la désignation d’un candidat de l’UDP pour la circonscription de Busumbala. Peu après, une vidéo a commencé à circuler en ligne, qui montrait des agents de police frappant un sympathisant de l’UDP non armé à coups de pied et de matraque. Amnesty International a vérifié cette vidéo. Le Centre gambien pour les victimes de violations des droits humains et la Commission nationale des droits humains (NHRC) ont tous deux condamné le recours excessif à la force par la police. La NHRC a exhorté l’inspecteur général de la police à garantir la mise en œuvre des Lignes directrices de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples pour le maintien de l’ordre par les agents chargés de l’application des lois lors des réunions en Afrique.

Discrimination

Droits des femmes

En mars, la mission d’observation électorale de l’UE a noté dans son rapport que la participation des femmes à la vie politique était très faible : elles n’étaient que cinq sur les 58 membres de l’Assemblée nationale, et seulement quatre sur 23 ministres. Un mois plus tôt, l’Assemblée nationale avait examiné une proposition de loi destinée à réserver plusieurs de ses sièges à des femmes et à des personnes en situation de handicap, mais ne l’avait pas adoptée.

En mars, le président du Syndicat de la presse de Gambie (GPU) a exprimé ses préoccupations quant au harcèlement sexuel et à la discrimination à l’égard des femmes, très courants dans les médias, les postes les plus influents au sein des comités de rédaction et des salles de presse étant occupés par des hommes. Il a appelé les médias à adopter la politique du GPU sur le harcèlement sexuel, et à désigner plus de femmes à des postes importants.

En octobre, le président de la NHRC a demandé au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes de recommander à la Gambie d’ériger le viol conjugal en infraction, ce qui n’était pas le cas dans la Loi sur les violences sexuelles.

Droits des personnes détenues

Plusieurs médias se sont fait l’écho du rapport de la TRRC, qui qualifiait les conditions de vie dans la prison centrale Mile 2 de dégradantes et d’inadaptées aux êtres humains. Lors d’une réunion devant la Commission de consolidation de la paix [ONU], le ministre de la Justice a déclaré que les prisons du pays étaient « gravement surpeuplées », avec 25 détenu·e·s dans des cellules prévues pour cinq à Mile 2.

En septembre, à l’issue d’une mission d’établissement des faits menée dans cet établissement, la Commission des droits humains de l’Assemblée nationale a indiqué qu’elle pousserait le président de la Cour suprême à examiner le cas d’une personne détenue dont le procès a duré 10 ans. Le ministre de la Justice a annoncé une enquête sur cette affaire et déclaré que son bureau était en train de dresser une liste de toutes les personnes en détention provisoire, dans le but de réduire le temps d’attente avant leur procès.

Peine de mort

En juillet, la Haute Cour de Banjul a condamné l’ancien directeur de l’Agence nationale de renseignement sous la présidence de Yahya Jammeh et quatre autres hommes à la peine de mort pour le meurtre du chef de file des jeunes de l’UDP.