Indonésie. Les exécutions illustrent un mépris total pour les garanties en matière de droits humains

Photo : Dans un cimetière situé à Cilicap, en Indonésie, des ouvriers enterrent l’Indonésien Zainal Abidin, exécuté en même temps que sept autres condamnés à mort (29 avril 2015). © EPA

La mise à mort de huit personnes en Indonésie mardi 28 avril témoigne d’un mépris absolu pour les garanties prévues par la loi, notamment en matière de droits humains, a déclaré Amnesty International. L’organisation a par ailleurs demandé l’abandon des éventuels projets concernant d’autres exécutions. 

Huit personnes, dont un ressortissant indonésien et des étrangers, ont été exécutées par peloton d’exécution sur l’île de Nusakambangan, au large de Java. Elles avaient toutes été condamnées pour trafic de stupéfiants. Au dernier moment, le président Widodo a ordonné le report de l’exécution de Mary Jane Fiesta Veloso, une ressortissante philippine. 

« Ces exécutions sont tout à fait répréhensibles – elles ont eu lieu dans le mépris le plus total pour les garanties universellement reconnues sur le recours à la peine de mort », a déclaré Rupert Abbott, directeur des recherches sur l’Asie du Sud-est et le Pacifique à Amnesty International. 

« Le président Widodo doit immédiatement abandonner les projets concernant d’éventuelles autres exécutions et instaurer immédiatement un moratoire sur ce châtiment, à titre de première étape vers l’abolition. »  

Au moins deux appels interjetés par des condamnés à mort sont actuellement examinés par les tribunaux. Les recours déposés par les huit prisonniers se sont heurtés à un rejet sommaire, ce qui a porté atteinte à leur droit de demander une grâce ou la commutation de leur peine, qui est prévu par le droit international. 

Cela porte à 14 le nombre de personnes exécutées en Indonésie en 2015, et le gouvernement a fait état de son intention de procéder à d’autres exécutions cette année. 

« La peine de mort constitue toujours une violation des droits humains, mais plusieurs facteurs rendent ces exécutions encore plus alarmantes. Certains prisonniers n’auraient pas bénéficié de l’aide d’avocats ou d’interprètes compétents lors de leur arrestation et du premier procès, ce qui est contraire à leur droit à un procès équitable, qui est reconnu par le droit international et indonésien », a déclaré Rupert Abbott. 

« Un des prisonniers exécutés mardi 28 avril, Rodrigo Gularte, était atteint de schizophrénie paranoïde et le droit international interdit le recours à la peine de mort contre les personnes présentant des troubles mentaux. Il est par ailleurs inquiétant que des personnes déclarées coupables de trafic de stupéfiants aient été exécutées alors que cette infraction ne fait pas partie des “crimes les plus graves”, pour lesquels la peine capitale peut être imposée aux termes du droit international. »

Contexte

Amnesty International s’oppose à la peine de mort dans toutes les affaires et en toutes circonstances, quelles que soient la nature du crime commis, la personnalité de son auteur ou la méthode d’exécution utilisée par l’État. La peine de mort viole le droit à la vie tel que reconnu par la Déclaration universelle des droits de l’Homme et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. La protection du droit à la vie est par ailleurs reconnue par la Constitution indonésienne. À ce jour, 140 pays ont aboli la peine capitale en droit ou en pratique. 

Il n’existe aucune preuve convaincante que la peine de mort ait un effet préventif plus efficace contre le crime que d’autres châtiments. Une étude approfondie menée par les Nations unies sur les liens entre la peine de mort et le nombre d’homicides n’a pas permis de prouver scientifiquement que les exécutions avaient un effet plus dissuasif que la réclusion à perpétuité. 

Les huit hommes exécutés mardi 28 avril sont Andrew Chan et Myuran Sukumaran (deux Australiens), Raheem Agbaje Salami (Nigérian, également connu sous le nom de Jamiu Owolabi Abashin), Zainal Abidin (Indonésien), Martin Anderson, alias Belo (Ghanéen), Rodrigo Gularte (Brésilien), Sylvester Obiekwe Nwolise (Nigérian) et Okwudili Oyatanze (Nigérian).