Iran. Un jeune condamné risque d’être pendu, alors que les exécutions de mineurs délinquants se multiplient

Les autorités iraniennes doivent bloquer l’exécution d’un jeune homme qui était mineur au moment des faits qui lui sont reprochés, et mettre fin à la multiplication inquiétante du nombre d’exécutions de mineurs délinquants. Huit personnes condamnées à mort pour des crimes commis alors qu’elles étaient âgées de moins de 18 ans ont été exécutées au cours du premier semestre 2014, a déclaré Amnesty International mardi 15 juillet 2014.

Rasoul Holoumi, aujourd’hui âgé de 22 ans, a été condamné à mort en octobre 2010, pour l’homicide d’un adolescent lors d’une bagarre collective en 2009, alors que Rasoul avait 17 ans. Son exécution peut avoir lieu à tout moment à la demande la famille de la victime, au titre du principe du droit islamique de qisas (réparation).

« Il est cruel et inhumain de pendre quelqu’un, et il est particulièrement répréhensible que l’Iran l’inflige à une personne mineure au moment du crime présumé, et que la pendaison se déroule à l’issue d’une enquête bafouant les normes internationales d’équité », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.

L’Iran compte parmi le peu de pays qui continuent d’exécuter des mineurs délinquants. Amnesty International a recensé au moins huit exécutions de mineurs délinquants au cours du premier semestre 2014 alors qu’elle a été informée de l’exécution de 11 mineurs délinquants pour toute l’année 2013.

« L’exécution de Rasoul Holoumi s’ajouterait au sinistre bilan de l’Iran en matière d’exécutions. Quels que soient les arguments invoqués par les autorités, il s’agit d’une violation flagrante du droit international. Rasoul Holoumi était mineur au moment des faits qui lui sont reprochés et sa condamnation à mort doit être annulée », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui.

La 17e chambre du tribunal pénal de la province du Khuzestan, dans l’ouest de l’Iran, a condamné à mort Rasoul Holoumi en octobre 2010 pour meurtre. Sa condamnation se fondait sur les allégations selon lesquelles, lors d’une bagarre collective en septembre 2009, il avait lancé un objet sur Nasim Nouri Maleki, lui infligeant des blessures mortelles à la tête. Ces accusations auraient été portées par plusieurs personnes elles-mêmes impliquées dans la bagarre.

Rasoul Holoumi n’a pas pu consulter d’avocat lors de l’enquête, et n’a pas bénéficié du temps ni des ressources nécessaires pour préparer et assurer sa défense avant et pendant son procès. Bien qu’il ait reconnu les charges lors de sa première convocation au poste de police, il s’est rétracté au bout de quelques semaines, et son témoignage soulève des doutes quant aux événements qui ont entraîné la mort de la victime et quant à sa présence sur les lieux.

Le 30 septembre 2009, Rasoul Holoumi a affirmé qu’il se trouvait chez lui lorsque la bagarre a éclaté et qu’il avait « avoué » ce crime uniquement parce qu’il se sentait désolé pour un autre adolescent qui lui avait confié avoir frappé Nasim Nouri Maleki au cours de la rixe. Le 2 octobre 2009, il a affirmé qu’il avait ramassé et lancé un objet dur lorsqu’il avait vu certaines personnes impliquées dans la bagarre s’avancer vers lui, mais que le coup n’était pas intentionnel. Le 5 octobre 2009, il a nié avoir jamais lancé cet objet. Les doutes ont été avivés par le fait qu’une hostilité opposait semble-t-il de longue date la famille de Rasoul Holoumi au principal témoin de l’affaire qui a témoigné contre lui.

Malgré tous ces éléments, la Cour suprême iranienne a confirmé la condamnation à mort de Rasoul Holoumi en 2010, sans aucune explication.

Les autorités iraniennes devaient procéder à son exécution le 4 mai 2014, mais l’ont reportée lorsque la famille de la victime a accepté de renoncer à sa demande de châtiment si la famille de Rasoul Holoumi leur versait 3,5 milliards de rials (soit 99 000 euros), au titre de la diya (prix du sang) et leur léguait la propriété de leur maison et de leur ferme.

Il semble que sa famille ne dispose pas du montant demandé pour la diya, exposant le jeune homme de 22 ans à une exécution imminente. Les condamnations prononcées au titre de qisas ne peuvent pas faire l’objet d’une grâce ou d’une amnistie de la part du Guide suprême, en violation du droit international.

Complément d’information

L’Iran compte parmi les États qui exécutent le plus grand nombre de condamnés au monde. Selon le rapport d’Amnesty International intitulé Condamnations à mort et exécutions en 2013, les autorités iraniennes ont reconnu l’exécution d’au moins 369 personnes en 2013, tandis que des sources fiables ont signalé au moins 335 exécutions supplémentaires. Selon les informations recueillies, au moins 11 des prisonniers exécutés avaient peut-être moins de 18 ans au moment des crimes pour lesquels ils avaient été condamnés.

Au 26 juin 2014, 171 exécutions ont été reconnues par les autorités ou les médias autorisés par l’État et, selon des sources fiables, au moins 233 autres exécutions ont eu lieu.

L’exécution de prisonniers pour des crimes commis alors qu’ils étaient âgés de moins de 18 ans est strictement prohibée par l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et l’article 37 de la Convention relative aux droits de l’enfant, que l’Iran a ratifiés.

Au titre de l’article 6-4 du PIDCP, tout condamné à mort a le droit de solliciter la grâce ou la commutation de la peine.