République tchèque : les mots ne suffisent pas pour mettre fin à la discrimination envers les Roms à l’école

La promesse de mettre un terme à la ségrégation et à la discrimination envers les enfants roms dans les écoles tchèques doit être appuyée par des mesures concrètes, ont déclaré Amnesty International et le Centre européen pour les droits des Roms (CEDR) à l’issue de leur rencontre avec le ministre tchèque de l’Éducation, Petr Fiala. Lors de cette rencontre qui s’est déroulée à Prague le 7 novembre, la veille du lancement de leur rapport conjoint intitulé Five more years of injustice: Segregated education for Roma in the Czech Republic, le ministre a assuré aux délégués des deux organisations que la déségrégation et l’école ouverte à tous étaient ses priorités. « Nous saluons l’engagement du ministre de l’Éducation, tout en appelant les autorités à faire preuve du courage politique nécessaire pour s’attaquer à la réforme indispensable du système éducatif », a indiqué John Dalhuisen, directeur adjoint du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International. Le système actuel permet d’orienter trop facilement des élèves vers un enseignement « pratique » destiné aux enfants souffrant de handicaps mentaux légers, qui reçoivent une éducation de moindre qualité. Or, ces dispositions affectent tout particulièrement les enfants roms. Parallèlement, des milliers d’enfants roms subissent une ségrégation de fait dans les écoles et les classes ordinaires qui leur sont réservées. « L’enseignement pratique est le moteur de la ségrégation, les préjugés en sont le carburant. La combinaison des deux se traduit par le fait que des milliers d’enfants roms en République tchèque sont privés d’un enseignement de qualité et n’ont pas les mêmes chances que les autres pour démarrer dans la vie. » Le 8 novembre, un porte-parole du ministère de l’Éducation s’est joint aux militants lors d’une action publique baptisée Le temps presse : ouvrez les livres fermés. Lors de cette action, les militants ont érigé une pyramide de manuels scolaires devant le ministère de l’Éducation. La pyramide était cernée par des chaînes, fermées par quatre cadenas symboliques. Trois intervenants prenant part à cette action, dont une mère rom d’Ostrava, et le porte-parole du ministre ont ouvert chacun un cadenas, symbole d’un avenir enfin déverrouillé pour les enfants roms en République tchèque. Publié le 8 novembre, le rapport conjoint d’Amnesty International et du Centre européen pour les droits des Roms pointe du doigt les lacunes du système éducatif tchèque qui permet la discrimination et la ségrégation des enfants roms. Le rapport rappelle notamment que cinq ans après le jugement historique rendu par la Cour européenne des droits de l’homme en 2007 dans l’affaire D.H. et autres c. République tchèque, selon lequel cet État avait fait acte de discrimination à l’égard d’enfants roms en les plaçant dans des établissements spéciaux, le gouvernement n’a guère progressé vers le changement. Les enfants roms sont toujours privés des possibilités d’éducation offertes aux autres élèves. La Cour européenne a invité le gouvernement tchèque à prendre des mesures visant à mettre fin à la violation constatée par la Cour et à remédier autant que possible aux conséquences. « Les écoles pratiques sont une impasse pour les enfants roms. Tant que ce système subsistera, ils seront prédestinés à recevoir un enseignement limité et au rabais, véritable désastre pour leur avenir. Cela fait cinq ans que la Cour européenne des droits de l’homme a rendu son jugement sur la ségrégation dans le système éducatif et il est temps que le gouvernement passe à l’action », a conclu Dezideriu Gergely, directeur exécutif du Centre européen pour les droits des Roms.