Bahreïn doit libérer des prisonniers d’opinion

Il faut que les autorités bahreïnites libèrent immédiatement 13 militants de l’opposition et prisonniers d’opinion, a déclaré Amnesty International vendredi 30 novembre alors qu’une décision doit être rendue sur leur cas lundi 3 décembre. Après leur participation à des manifestations pacifiques contre le gouvernement, ces hommes ont été jugés l’an dernier par une juridiction militaire, qui les a déclarés coupables d’infractions parmi lesquelles la « mise en place de groupes terroristes en vue de renverser la monarchie et de modifier la Constitution ». Leur déclaration de culpabilité et leurs peines ont été confirmées en appel en septembre 2012. Lundi 3 décembre, la Cour de cassation de Manama, la capitale, rendra sa décision sur la demande de libération sous caution déposée par leurs avocats. La Cour annulera ou confirmera leur déclaration de culpabilité et leurs condamnations ultérieurement, à l’occasion d’une autre audience, bien qu’il y ait une petite chance que cela se produise également le 3 décembre. « La décision de lundi sera une véritable pierre de touche pour les autorités bahreïnites et leurs alliés s’ils souhaitent prouver une bonne fois pour toutes qu’ils sont réellement déterminés à respecter et protéger les droits humains », a indiqué Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. « Ces hommes doivent être libérés immédiatement et sans condition. Il faut annuler leur déclaration de culpabilité et leurs condamnations. Les alliés de Bahreïn doivent également faire pression sur les autorités afin qu’elles cessent de faire semblant de mener des réformes et traduisent leurs paroles en actions concrètes. » Ces 13 individus, parmi lesquels figurent Abdulhadi Al Khawaja et Ebrahim Sharif, militants d’opposition de premier plan, ont d’abord été condamnés en juin 2011 par une juridiction militaire à des peines allant de cinq ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité. Tous clament leur innocence. Amnesty International n’a trouvé aucun élément attestant qu’ils aient employé la violence ni prôné son usage lors des manifestations organisées contre le gouvernement l’an dernier. Ils sont donc incarcérés simplement pour avoir exercé leur droit légitime à la liberté d’expression, d’association et de réunion. Le 21 novembre, Amnesty International a diffusé une synthèse soulignant les lacunes observées dans l’application des recommandations émises par la Commission d’enquête indépendante de Bahreïn et l’aggravation de la situation des droits humains dans le pays. Cette diffusion a coïncidé avec le premier anniversaire de la parution du rapport de la Commission d’enquête. Les auteurs de ce rapport avaient estimé que le gouvernement bahreïnite était responsable d’atteintes flagrantes aux droits humains et avaient recueilli des informations sur de nombreuses violations. Le rapport faisait une série de recommandations, demandant notamment aux autorités d’amener les auteurs présumés de violations des droits humains à rendre des comptes, et de diligenter des enquêtes indépendantes sur les allégations de torture et autres abus. Dans sa synthèse, intitulée Bahrain: Reform shelved, repression unleashed, Amnesty International a dénoncé la répression accrue et l’absence d’obligation de rendre des comptes pour les violations passées à Bahreïn, notamment pour l’emprisonnement prolongé de prisonniers d’opinion tels que ces 13 militants de l’opposition et Nabeel Rajab, le président du Centre pour les droits de l’homme de Bahreïn. Le gouvernement bahreïnite a réagi aux critiques en affirmant que ces allégations étaient sans fondement et qu’il était déterminé à mettre en œuvre les recommandations de la Commission d’enquête indépendante de Bahreïn. Amnesty International a cependant relevé des atteintes aux droits humains persistantes ces derniers mois, et constaté que personne n’avait rendu de comptes pour les abus du passé – qui restent de ce fait impunis. Parmi ces violations figurent l’absence d’enquête impartiale et indépendante sur des actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements présumés, notamment sur les allégations selon lesquelles ces 13 militants de l’opposition ont été soumis à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements en détention. Loin de se consacrer aux réformes, les autorités ont passé ces derniers mois à intensifier les opérations de répression. Celles-ci ont atteint leur point d’incandescence en octobre 2012 lorsque le gouvernement a interdit tous les rassemblements dans le pays, ce qui est contraire au droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique. En novembre, 31 figures de l’opposition ont été déchues de la nationalité bahreïnite.