Les pays européens doivent amener d’anciens hauts responsables guatémaltèques à rendre des comptes

D’anciens hauts responsables guatémaltèques qui ont fui vers l’Europe pour échapper aux accusations d’implication dans des exécutions extrajudiciaires doivent comparaître en justice, a déclaré Amnesty International mardi 4 septembre. Dans la nuit du 3 septembre, un tribunal de Genève a ordonné qu’Erwin Sperisen, ancien directeur national de la police guatémaltèque, soit maintenu durant au moins trois mois en détention administrative, alors qu’il est poursuivi pour meurtre, inculpation qui découle de la période où il dirigeait les services de police de 2004 à 2007. Les autorités suisses ont arrêté le 31 août Erwin Sperisen, qui ne peut être extradé vers le Guatemala car il a aussi la nationalité suisse. Il est accusé de chefs d’inculpation liés à plusieurs exécutions extrajudiciaires qu’auraient perpétré des agents de la police guatémaltèque placés sous son commandement. D’autres anciens représentants guatémaltèques qui se trouveraient en Europe, notamment en Autriche et en Espagne, doivent encore être amenés à rendre des comptes pour les crimes présumés commis dans ce pays d’Amérique centrale. « L’arrestation d’Erwin Sperisen en Suisse devrait donner à réfléchir à tous ceux qui pensent que le rang et le statut – ou le fait de détenir un passeport étranger – leur permettront d’échapper à la justice », a indiqué Sebastian Elgueta, chercheur sur le Guatemala pour Amnesty International. La responsabilité pénale d’Erwin Sperisen est engagée dans les exécutions extrajudiciaires de quatre détenus qui se sont évadés de la prison d’El Infiernito en 2005, ainsi que de celles de sept prisonniers d’El Pavón en 2006. En 2007, il a démissionné de son poste de chef de la police et a fui vers l’Europe avec plusieurs de ses co-accusés, semble-t-il pour se soustraire à la justice. Il s’est installé en Suisse, tandis que l’ancien ministre de l’Intérieur Carlos Vielman fuyait vers l’Espagne et l’ancien directeur du département de police judiciaire des forces de police du Guatemala, Javier Figueroa, vers l’Autriche, où il a obtenu le statut de réfugié. Si les poursuites intentées contre ceux qui sont restés au Guatemala n’ont guère progressé devant les tribunaux nationaux – sept attendent d’être jugés et cinq sont sous le coup de mandats d’arrêt – il est encore plus difficile de traduire Sperisen, Vielman et Figueroa en justice à l’étranger. Les autorités espagnoles ont arrêté Carlos Vielman en octobre 2010 et il fait actuellement l’objet d’une enquête en Espagne pour son rôle présumé dans les exécutions extrajudiciaires. Les autorités autrichiennes ont arrêté Javier Figueroa en mai 2011, après qu’une demande d’extradition vers le Guatemala a été rejetée. Il est actuellement détenu jusqu’à la fin de l’enquête. « Le procès de l’ancien directeur national de la police guatémaltèque, Erwin Sperisen, devant s’ouvrir dans quelques mois, il faut désormais se concentrer sur ce qu’entreprennent les autorités autrichiennes et espagnoles pour que ces graves allégations d’atteintes aux droits humains fassent rapidement l’objet d’enquêtes impartiales, a estimé Sebastian Elgueta. « L’arrestation d’Erwin Sperisen prouve que la recherche de la justice ne s’arrête pas aux frontières ; lorsque les procureurs et les enquêteurs de différents pays autour du globe coopèrent, il est possible d’amener les auteurs présumés de graves violations des droits humains à rendre des comptes. Il incombe aux autorités autrichiennes et espagnoles de faire en sorte que les familles des victimes d’exécutions extrajudiciaires au Guatemala obtiennent justice. »