Halte à la répression contre les «immigrés clandestins» en Grèce

Les autorités grecques doivent mettre un terme à la répression policière contre les « immigrés clandestins » et permettre aux personnes nécessitant une protection internationale d’avoir réellement accès à une procédure de demande d’asile. C’est ce qu’a déclaré mercredi 8 août Amnesty International, réagissant à des informations, selon lesquelles plus de 7 500 étrangers auraient été arrêtés à Athènes dans les jours précédents. Nombre des personnes interpellées étaient apparemment d’origine asiatique et africaine (y compris d’Afrique du Nord). Beaucoup ont été relâchées depuis, les autorités ayant constaté qu’elles disposaient d’un titre de séjour dans le pays en règle. Toutefois, selon la police grecque, environ 2 000 sans-papiers ont été placés en détention administrative. Certains sont actuellement retenus dans les locaux surpeuplés de divers commissariats de la capitale grecque, ainsi qu’à la Direction de la police des étrangers du quartier d’Attika (également connue sous le nom de Petrou Ralli). D’autres ont été conduits dans des académies de police situées dans le nord de la Grèce et qui sont utilisées comme centres de détention. « La Grèce a certes le droit de contrôler les migrations, mais elle n’a pas celui de traiter les gens dans la rue comme s’ils étaient des criminels, uniquement en raison de la couleur de leur peau », a déclaré Jezerca Tigani, directrice adjointe du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.   « L’ampleur de l’opération policière menée à Athènes en fin de semaine soulève de sérieuses inquiétudes quant à des pratiques apparemment discriminatoires, fondées sur l’appartenance ethnique supposée des personnes. » Selon certaines informations, des personnes auraient été emmenées au commissariat alors qu’elles avaient pourtant montré à la police des papiers prouvant qu’elles étaient en situation régulière en Grèce. Un homme interpellé samedi a dit à Amnesty International avoir été détenu à Petrou Ralli dans une pièce où avaient été entassées quelque 170 personnes. Le jour de son arrestation, on lui aurait uniquement donné de l’eau. Par la suite, il n’aurait mangé que du pain, car sa religion ne lui permettait pas de manger le reste de la nourriture qui lui était proposée. Nombre de détenus devaient dormir à même le sol. La surpopulation était telle qu’ils ne pouvaient pas tous s’allonger en même temps et devaient se relayer pour dormir. Étant donné la forte augmentation des agressions racistes enregistrées depuis un an contre des étrangers, Amnesty International craint qu’une opération aussi massive et discriminatoire n’alimente les dérives xénophobes et n’incitent certains à commettre de nouveaux actes de violence.   « Même si la Grèce traverse actuellement des difficultés économiques, en étant dans le même temps confrontée à des flux migratoires qui figurent parmi les plus élevés de l’Union européenne, ces rafles de police sont contraires aux normes internationales relatives aux droits humains et elles doivent immédiatement cesser », a déclaré Jezerca Tigani.    « Ces arrestations peuvent mettre en danger d’expulsion des personnes qui ont besoin d’une protection internationale mais qui ne sont pas en mesure de demander l’asile. » Parmi les personnes récemment interpellées figurent deux hommes, l’un originaire de Guinée, l’autre de Côte d’Ivoire, qui ont été placés en détention à la Direction de la police des étrangers d’Attika, avant d’être transférés hier soir vers un autre centre de détention, dans le nord de la Grèce.  Des délégués d’Amnesty International les avaient rencontrés le mois dernier, alors qu’ils faisaient la queue devant Petrou Ralli pour y déposer une demande d’asile. L’un d’eux a expliqué à Amnesty International qu’il avait à plusieurs reprises demandé à pouvoir solliciter l’asile pendant sa détention à Petrou Ralli, mais que la police avait tout simplement ignoré ses requêtes.  « Les autorités grecques doivent veiller à ce que toute personne souhaitant déposer une demande d’asile puisse le faire sans difficulté », souligne Jezerca Tigani. « Elles doivent également faire en sorte que la détention de personnes soupçonnées d’atteintes à la législation sur l’immigration soit une mesure appliquée uniquement en ultime ressort. Les personnes placées en détention doivent être informées des motifs de la mesure qui les touche et de leurs droits. Elles doivent pouvoir avoir accès à leurs avocats et être en contact avec le monde extérieur. » En Grèce, les demandeurs d’asile sont souvent confrontés à d’importants obstacles lorsqu’ils tentent d’avoir accès à la procédure officielle. Dans leur immense majorité, les demandeurs s’adressent à la Direction de la police des étrangers d’Attika, à Athènes. Or, les autorités n’enregistrent qu’un nombre limité de demandes chaque semaine. Les demandeurs d’asile doivent faire la queue pendant deux ou trois jours devant les locaux de la Direction, dans des conditions extrêmement pénibles, pour avoir une chance de déposer leurs demandes, qui ne sont reçues que le samedi matin. Lors d’une visite en Grèce la semaine dernière, une délégation d’Amnesty International a pu constater les conditions de vie déplorables qui régnaient dans les centres de détention pour immigrés d’Athènes. Les délégués de l’organisation ont pu se rendre dans six centres de détention situés dans la capitale, dont celui de Petrou Ralli. Dans ce dernier, ils ont pu constater que les locaux étaient propres au moment de la visite, mais qu’un certain nombre de travaux étaient nécessaires. Dans deux autres centres, en revanche, (Nouveau et Ancien Elliniko), les conditions de détention étaient inhumaines et dégradantes.